Patronne?

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Oh putain, je suis trop excitée pour me coucher ce soir ! Il est deux heures du matin et pas moyen de fermer l'œil ! La première journée au salon d'ostéopathie était vraiment trop bien, bordel. Quatre clientes au final : trois séances d'ostéo et un massage. Et ouf, tout le stress est redescendu ! Les clientes, non, les patientes, c'est vrai, dans le monde médical on parle de patientes. Elle étaient adorables et j'ai débloqué un cou et deux dos sans rien faire craquer.

Enfin, pas un boulot à la con derrière un ordi pour faire des trucs qui ne servent pas vraiment à grand-chose ! J'ai même eu les compliments les plus adorables :

  • Enfin une ostéopathe qui ne me tord pas dans tous les sens à tout faire craquer.

Ça fait plaisir pour un premier jour !

Demain, il n'y a qu'une réservation, mais c'est que le début, je suis bien trop contente d'avoir passé cette journée ! Et j'avais oublié à quel point j'aimais bien les petits commérage des inconnues qui viennent pour la première fois. Le premeir blocage de dos était lié à monsieur "un peu brutal au lit", mais qu'elle aime bien, a-t-elle dit toute rouge. Le blocage de cou, c'était à cause d'une collègue chiante à côté d'elle qui lui fait tourner la tête tous les jours à poser des questions. L'autre blocage de dos, c'était la faute au petit dernier qui veut toujours être porté. Trop mignons les informations qu'on me donne alors qu'on ne se connais pas du tout!

J'avais un peu oublié l'aspect petit secret et information intime de ce métier. Pendant le massage, j'ai eu droit à un :

  • Wow, vous êtes si douce, c'est trop agréable.

Oui, j'aime les compliments d'une inconnue en culotte sur ma table de massage qui me raconte combien son travail la stresse et que monsieur ne fait rien à la maison et ne fait pas à manger.

  • Le vôtre est pareil, enfin si vous en avez un ?
  • Oui, il fait à manger, en fait c'est moi qui en fais le moins à la maison.
  • Vous l'avez bien dressé, m'a-t-elle dit en rigolant.
  • Disons que j'ai de la chance.

J'allais avoir le retour des discussions gênantes et stéréotypées de tout genre, et en vrai, ça me rend super heureuse. Avec monsieur, on est deux pour faire en sorte que notre boîte marche avec le chômage qui compense. Je vais enfin pouvoir dire la phrase favorite des gros nazes de LinkedIn : "J'ai monté ma boîte, ça fait un an que je ne me verse pas de salaire", bande de cons, tout le monde sait que tu touches le chômage! Y'a des trucs comme ça qui me mettent en colère pour rien, je ne sais pas pourquoi.

  • En tout cas, j'aimerais être comme vous, une femme forte, avec ma boîte, mais j'ai trop peur...

Cette femme ne se rendra jamais compte à quel point cette phrase m'a marquée de fou, genre retourné le cerveau ! Une femme forte comme moi. Putain, je suis l'opposé, j'ai toujours vu ma vie via le spectre de ma soumission. Ma vie, je l'ai tellement construite, structurée sur ma sexualité soumise à un dominant. Et en fait, là, cette femme venait de me dire que j'étais forte. Merde, faudrait peut-être que je réfléchisse autrement. Que je change un peu mon fusil d'épaule.

Et si je n'étais pas qu'une salope, pas que la petite soumise de maître. Putain, je suis co-gérante d'une entreprise ! Bordel, moi, co-gérante d'une entreprise avec maître. On a refait mon appartement, fait un site internet, fait des papiers administratifs, même si ce n'est pas compliqué, et là, j'ai eu quatre clientes. Je ne suis pas qu'une soumise, j'ai d'autres choses à faire valoir. Ça fait que un jour, mais que c'est bon d'être son propre chef, que les personnes apprécient ce qu'on leur apporte.

Certes, hier, maître n'a pas bluffé pour me faire déstresser. Maître était très joueur, très dur, humiliant, mais aujourd'hui, je n'ai pas été que soumise, j'ai été patronne. Il est peut-être temps pour moi d'arrêter de me cacher derrière mon rôle de soumise pour tout. Oh oui que c'est rassurant de laisser mon corps au désir de maître et de ne plus avoir à réfléchir, mais c'est aussi très grisant d'être patronne. Va falloir que j'apprivoise cette nouvelle vision de ma vie.

Je pense que c'est cette idée qui fait que je ne peux pas fermer l'œil ce soir, cette idée d'un nouveau moi. Et aussi que j'attends avec impatience que maître puisse aussi travailler avec moi. On va faire nous deux un boulot qui nous semble utile. Même si maître a quelques doutes en ce moment car un esthéticien va falloir qu'il trouve sa clientèle après, mais franchement, j'ai toute confiance après cette journée, comme sur un petit nuage ! Je sens bien que maître a hâte que sa formation soit finie.

En tout cas, un an et je n'aurais jamais mis une piécette sur le fait d'écrire à deux heures du matin que je suis heureuse. Simplement heureuse que tout cela soit arrivé, dans l'absurdité de ma vie.

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