Stéphanie est la petite dernière d’une famille que l’on appelait par le passé classique. Des parents mariés avocats de professions, deux enfants ; un garçon et une fille. Dans leur belle maison sur la plage, son frère et elle ne manquaient de rien, ils leur suffisaient de demander pour qu’Anthony leur offre. Anthony a grandi dans une famille pauvre où ses parents ne pouvaient lui offrir ni nourriture, ni vêtements, ni jouets sans l’aide d’associations. Il rêvait de pouvoir porter un jour des vêtements neufs, que personnes n’aurait porté avant lui, de jouer à des jeux qui lui appartiendrait réellement et non les vieux jeux dont les autres enfants ne voulaient plus.

En ce sens, ils refusaient catégoriquement que ses enfants ne soient pas comblés et répondait ainsi à chacun de leur désir, au grand désarroi de leur mère qui tentait, en vain, de leur fixer des limites. Il était trop tard, du moins pour Sean, il avait compris comment fonctionnait son père et en abusait, le manipulait pour obtenir ce qu’il désirait. Si tel n’était pas le cas, il se mettait dans une colère noire et détruisait tout ce qu’il y avait autour de lui.

Contrairement à son grand frère, Stéphanie s’était renfermée sur elle-même. Un manque d’affection blessait son cœur depuis toute petite. Elle ne réclamait jamais rien à ses parents, espérant tout simplement et silencieusement qu’ils la verraient un jour, qu’ils travailleraient moins. Plus que tout, elle voulait de l’attention, que l’on fasse attention à elle jusqu’à ce qu’elle finisse par comprendre qu’ils ne changeraient pas et qu’elle devait se débrouiller par elle-même, seule sous peine d’être triste pour le restant de sa vie.

Seul Sean l’avait soutenu lors de son coming-out au collège, ses parents n’ayant jamais abandonnée l’espoir de lui trouver un petit ami avec qui elle se marierait et aurait des enfants. Dès que son frère eut quitté la maison, elle trouva refuge chez lui, refusant de rester une seconde dans cet antre solitaire qu’était la maison familiale. Fusionnels, c’était eux deux contre le monde entier.

Pour la première fois de sa vie, elle allait se séparer de son frère, prendre son envol. Ils n’étaient qu’à quelques heures de routes mais c’était déjà beaucoup trop pour elle, habituée à sa présence. Pour fêter son entrée à la fac, Sean l’avait emmenée dans un bar histoire de prendre un verre. C’est là qu’elle avait aperçu Lola pour la première fois, sans pour autant oser l’aborder.

Peu encline à faire la fête, elle décida d’aller faire une balade sur le front de mer. Le port de Saint Pierre la nuit était beau à voir. C’est sur le chemin du retour, deux heures plus tard qu’elle retrouva la fille sur qui elle avait flashé au bar, allongé par terre, inconsciente.