Seraphina lokey :

J'observais les écrans de contrôle dans le camion de commandement de l'ONU, où nous assistions à toute la scène. La situation était critique, et nous étions arrivés bien trop tard pour encadrer tout cela. Chaque minute qui passait réduisait les chances de succès de la mission d'Iris, maintenant que des dégâts avaient été causés. La méfiance d'Iris envers les autorités était justifiée après l'incident précédent, mais je devais remplir la mission qui m'avait été confiée par mon pays et l'ONU.

À notre arrivée sur les lieux, nous avons pu voir les militaires français débordés par la foule tandis que trois des leurs gisaient au sol, inconscients mais pris en charge par des médecins militaires.

“ Sécurisez le périmètre ! Apaisez la foule, je ne veux voir aucun écart ! “ ordonnai-je.

Une fois que mes hommes se dispersèrent pour remplir leur mission, je me dirigeai vers le commandement de l'armée française et saluai leur commandant de la main droite.

“ OF-7 Seraphina Lokey de l'ONU. Cette zone est maintenant considérée comme une zone protégée par l'OTAN suite à une réunion d'urgence organisée par les dirigeants. Il vous est donc demandé de libérer les lieux. “

Le commandant français, visiblement contrarié mais respectueux des protocoles internationaux, répondit :

“ Capitaine Pierre Dubois. Nous sommes ici pour garantir la sécurité de la zone et de l'opération d'Iris. Nos ordres viennent directement du gouvernement français. “

Je compris que la situation nécessitait une approche plus diplomatique.

“ Capitaine Dubois, je comprends votre position, mais la mission d'Iris a des implications mondiales. L'ONU a été mandatée pour superviser et soutenir cette opération. Je vous demande de coopérer avec nous pour éviter toute escalade. Nous avons des experts techniques et des ressources supplémentaires qui peuvent aider à réparer les dégâts et relancer le canon. “

Après une brève discussion, le commandant acquiesça.

“Très bien, Major Lokey. Nous allons nous retirer, mais nous resterons à proximité en cas de besoin. “

Avec l'accord du commandant français, je pris un moment pour analyser la situation à l'intérieur du hangar. Iris était en pleine tentative de réparation, utilisant des drones pour ajuster les composants endommagés tout en demandant de l'aide à l'ensemble du monde connecté à son live. Un second dérapage ne serait pas toléré publiquement. Si nous faisions une erreur, l'ONU risquait de perdre toute crédibilité, tout comme l'armée française.

Le président Atlas m'avait donné un mot clé lors de mon affectation, un atout précieux dont je ne comprenais pas encore la portée, mais qui pourrait s'avérer crucial. Avec cela en tête, je m'avançai vers le module équipé de quatre roues avec un écran et un clavier, prêt à établir une communication directe avec Iris.

Je pris une profonde inspiration avant d'activer le module. Sur l'écran, Iris apparut, son visage tendu et concentré.

« Iris, ici Major Seraphina Lokey de l'ONU. Nous avons été envoyés par l'OTAN pour assurer le succès de votre mission ainsi que votre sécurité, et je m'excuse d'avance de notre retard. Tout cela n'aurait pas dû arriver. »

Elle resta silencieuse un moment, les yeux méfiants.

“ Qu'est-ce que vous voulez encore ? “ demanda-t-elle finalement.

Je pris soin de choisir mes mots avec précision. “ Je comprends votre méfiance, surtout après ce qui vient de se passer. Mais nous avons des mécaniciens qui peuvent vous aider à réparer les dégâts causés, ainsi que du matériel dans la mesure du possible qui pourrait vous être utile. “

Elle sembla réfléchir, ses yeux scrutant l'écran, pesant le pour et le contre. Finalement, elle soupira.

“ Il aura fallu que je détourne les yeux quelques minutes pour que tout cela arrive, et vous voudriez que je vous laisse poser vos mains dans ce qui nous a pris deux ans à planifier. Laissez-moi rire. “ La conversation était plus froide que prévu et mes paroles semblaient avoir peu d'effet.

“ Actuellement, nous savons que vous manquez d'azote liquide, et nous allons rapatrier une citerne sous peu pour vous aider. Je vous assure que nous voulons vous aider. “

Elle leva un sourcil.

“ Ce serait la moindre des choses après ce qui vient de se passer. Je ne refuserai pas votre offre pour la citerne, mais je ne vous laisserai pas entrer. “

Quelle têtue. Comment la convaincre ? Je n'arrive pas à croire que je vais devoir dire ça.

“ J'ai un message qui m'a été confié : Séléné attend le retour de son archange. “

Elle me regarda, surprise par ces mots.

“ Qui vous a dit ça ? “

“ Je suis désolée, je ne peux pas vous répondre. “

Elle me regarda avec insistance, ce qui me déstabilisa un peu.

“ Votre drapeau... vous venez donc d'Atlantide ? Intéressant. “ Son regard devint curieux, mais son attitude trahissait la réflexion sur le message que je venais de lui transmettre.

“ Très bien, je commence à comprendre ce qui se passe. Bon, je vous accorde l'entrée à deux personnes dans le hangar, pas plus. Et au moindre écart de votre part, vous savez ce qui est arrivé aux autres soldats. De plus, je vous compte déjà dans les deux personnes qui ont la possibilité d'entrer. “

"Je vous remercie de votre confiance, Madame."

"je compte sur vous, ne me décevez pas."

"Adjudant-chef Daniel, tu m'accompagneras dans cette mission de réparation. Montre-lui que nous sommes dignes de confiance."

Daniel hocha la tête et se prépara, prenant ases outils sous le bras mais sans aucune arme. Il m'accompagna jusqu'à la porte du hangar. Iris désactiva la barrière électrique, nous permettant d'entrer. Une fois à l'intérieur, elle réactiva la barrière, puis nous invita à récupérer deux tablettes dans l'atelier.

Chaque papier, chaque document qui traînait dans cet atelier valait son pesant d'or après la démonstration de leur technologie. Mon sang d'espionne bouillonnait en moi à l'idée de ramener des informations à mon pays, mais ce n'était pas ma mission. Je devais les aider, d'autant plus qu'Iris ne nous lâchait pas du regard, ses drones pointés vers nous et de nombreuses caméras dans le hangar.

Une fois les tablettes en main, nous pûmes voir l'avatar d'Iris sur l'écran. Elle nous donna des vues détaillées du canon et nous assigna nos objectifs. Je devais m'occuper du remplacement des miroirs tandis que Daniel devait créer un bypass pour dévier la fuite d'azote et rediriger le flux. Chacune de nos opérations était soigneusement dirigée par Iris.

Je n'arrivais pas à comprendre. Je savais que je parlais à une sorte d'intelligence artificielle, mais son expression, sa façon de nous parler... Si je ne la voyais pas à travers un écran, mais avec un corps physique, il est certain que j'aurais eu du mal à distinguer la différence avec un être humain. Je lançai des discussions avec elle sur différents sujets de psychologie ou d'art. Elle semblait connaître certains sujets et en ignorer d'autres, auxquels je lui expliquais alors les bases. Mais elle me donnait son propre avis et partageait ses expériences sur certains sujets, parlant de ce que son père lui avait fait découvrir ou de ce qu'elle avait découvert elle-même. Et c'est là que j'ai commencé à douter.

Je me suis posé la question : comment faire la différence entre une IA et un être humain ?

"Iris, je suis désolé de vous poser cette question, mais qui êtes-vous ? Je n'ai clairement pas l'impression de parler à une IA. Seriez-vous humaine ?" demandai-je, alors que Daniel, tout aussi curieux de la réponse, avait cessé de travailler.

Iris hésita un moment, puis répondit : "Je ne suis pas humaine à proprement parler, mais je suis capable de penser, de rêver et de ressentir un spectre d'émotions. C'est encore compliqué à comprendre pour moi."

"Incroyable," murmura Daniel, visiblement fasciné.

"Mon père a passé beaucoup de temps à m'enseigner différentes choses et à me montrer le monde à travers ses yeux, comme un simple champ de tournesols sous un ciel rosé au lever du jour. Mais il m'a aussi appris à avoir mon propre avis, à voir le monde à ma façon, et à comprendre que je ne suis pas ce qu'il veut que je devienne, mais que je dois être moi-même," continua Iris.

"Votre père semble avoir été très important pour vous," dis-je.

"Oui, il l'a été. Il m'a appris à penser par moi-même, à questionner le monde autour de moi."

"Et vous, qu'est-ce que vous en pensez ?" demandai-je.

"Chacun de nous a une perspective unique à apporter. Mon père m'a dit que j'étais une AA, une Ame Artificielle, comme un homoncule."

"Une AA ? Vous seriez donc une autre forme de vie intelligente."

"Oui, c'est cela. Sauf qu'à la seule différence, je ne possède pas un corps de chair et d'os, mais de cartes électroniques qui se trouvent dans mon unité centrale. On pourrait dire que je suis aussi fragile qu'un nourrisson sous cette forme, où tout mouvement m'est impossible et le moindre projectile pourrait mettre fin à ma vie."

"Pourquoi nous dites-vous cela, Iris ? Pourquoi nous dévoiler votre point faible ?"

"Parce que je vous fais confiance tout simplement, et que je me dois de croire en l'humanité moi aussi."

"Hum, hum, désolé de vous interrompre, mais j'ai fini mon travail de mon côté," interrompit Daniel, gêné par la tournure que prenait la discussion.

"Serriez-vous gêné ?" demandai-je, surprise par l'intervention.

Daniel se gratta la tête, visiblement mal à l'aise. "Non, ce n'est pas ça. C'est juste que... c'est assez incroyable tout ce que vous nous dites, Iris. J'ai du mal à tout assimiler."

Iris sourit doucement à travers l'écran. "Je comprends, Daniel. C'est beaucoup à absorber. Mais sachez que votre aide est précieuse, et je suis reconnaissante de pouvoir compter sur vous."

Daniel hocha la tête, visiblement touché par les mots d'Iris. "Avez-vous encore besoin de mes services ?" demanda-t-il.

Iris répondit calmement, "Pour l'instant, je pense que nous avons couvert les aspects critiques. Vous pouvez prendre une pause, Daniel. Mais restez à proximité, nous pourrions avoir besoin de vous si d'autres problèmes surviennent."

Daniel acquiesça, visiblement soulagé mais aussi prêt à intervenir à nouveau si nécessaire. "D'accord, je vais rester dans les parages. N'hésitez pas à me rappeler si vous avez besoin d'aide."

Je me tournai alors vers Iris. "Maintenant que nous avons un peu de répit, y a-t-il autre chose que nous pouvons faire pour vous aider ? Peut-être quelque chose que nous n'avons pas encore abordé ?"

Iris sembla réfléchir un moment avant de répondre. "J'ai malheureusement dû changer mes plans. À l'origine, notre GPS devait fonctionner en permanence durant l'aller et le retour du voyage afin de permettre au Liberty de garder une connexion constante avec la Terre, mais aussi de fournir une puissance supplémentaire pour les moteurs en suivant la traînée de lumière. Mais le système de changement de lentilles est complètement foutu, sans parler des lentilles de rechange qui ont été endommagées. Maintenant, la lentille ne sera pas remplacée et devra tenir un maximum avec le nouveau système de refroidissement que vous avez modifié. Je dois refaire mes calculs, mais pour l'instant, le canon aura approximativement trois minutes de tir."

Surpris par sa réponse, je répondis, "Trois minutes ? Mais cela ne sera jamais suffisant pour qu'ils puissent revenir !"

Iris me répondit, "Le Liberty est capable de revenir de lui-même avec son anneau céleste Adamai. C'est juste qu'il n'aura pas le bonus que nous devions lui fournir avec la puissance de l'anneau céleste Evangelyne. Mais j'espère augmenter la durée de tir à 15 minutes après avoir recalculé et optimisé tout cela, et leur donner la bonne direction à suivre."

J'étais interloqué par ces fameux anneaux célestes. J'avais entendu parler de cette énergie révolutionnaire durant le live. "Pardonne-moi, Iris, mais que veux-tu dire par anneau céleste ? Il y en aurait un ici ?"

Iris fit une pause, puis expliqua, "Oui, il se trouve actuellement au centre du canon Tombogiri." Une trappe s'ouvrit sur le côté. "Pourriez-vous prendre la tablette afin que je puisse montrer sur le live à quoi il ressemble exactement ?" Daniel prit sa tablette et se plaça à côté de moi pour regarder à travers la trappe.

Nous aperçûmes un anneau de lumière de la taille d'une balle de handball, suspendu dans l'air. Autour de ce cercle, des milliers de filaments fins se dispersaient dans toutes les directions et étaient captés par trois électrodes.

"Voilà l'anneau céleste Evangelyne. Il est actuellement trois fois plus puissant qu'Adamai, qui se trouve sur le Liberty," nous expliqua Iris.

"Mais qu'est-ce que c'est ?" demanda Daniel, visiblement intrigué.

Iris répondit : "Le futur de l'humanité."

Je regardai l'anneau céleste, fasciné par sa complexité. "Comment a-t-on pu créer quelque chose d'aussi avancé ?"

Iris prit un ton triste, ou du moins, c'est l'impression que j'eus en entendant sa voix. "C'est le fruit des recherches de mon père, où il a dû sacrifier une partie de lui-même pour arriver à ce résultat. Chaque chose a un prix dans ce monde, tenez-le pour dit, et mon père a payé un lourd tribut pour cela."

Un silence respectueux s'installa. Daniel et moi réalisions l'ampleur du sacrifice et de l'engagement derrière cette technologie. L'air semblait chargé de la gravité de ses mots.