Chapitre 3

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Alors que le dîner était avancé, le Roi et la Reine entrèrent dans la grande salle accompagné de Lowrak et sa femme, leurs suivants et les dames de la Reine, jusqu'à ce que l'aura glacial des Ravageurs et de leur maître étrange ne prenne la place à le suite, faisant vaciller les flammes des bougies ou des torches, le feu dans l'âtre de la cheminée souffrit de l'entrée de la faction. On se murmurait que le Prince des Glaces était de retour avec les siens, mais que la Princesse qui avait disparu durant une année avait été vu vivante à ses côtés. On avait bien sûr appris que Kaerthage avait subit un acte magique qui l'avait plongé dans le sommeil, mais elle restait une Solaris, une de ceux qui avaient voulu détruire la famille royale et le pays du froid. En ça résidait une haine sourde envers la jeune femme et son fils.

Et quand on les vit entrer dans la salle aux côtés du second Prince, les regards se firent plus durs, plus méfiants alors que ceux qui osaient porter les leurs sur le Prince se virent blesser par un vent si froid que même la neige se mit à cristalliser.

- Nulle besoin d'annoncer ceux qu'on ne désire pas voir, gronda la voix de Nohan alors que l'homme à la grande porte énumérait l'arrivée des personnages important de la famille.

Pris sur le fait de vouloir ignorer la jeune femme à sa droite, l'homme se tut, mais le Roi ne le vit pas de cette façon et, alors que tous s'installèrent, il pris son épée à sa taille pour en faire tomber la lourde lame sur la table, faisant crier de peur les convives présents.

- M... Majesté ?

- Puis-je savoir pourquoi ma belle-fille ici est ainsi traitée comme une paria ?

- Parce que je suis encore vu comme une Solarienne et que je le serais toujours Votre Altesse, répondit cette dernière.

- Alors c'est ainsi... Personne ne sait donc que c'est vous même ma chère qui avait tué le Roi alors qu'il tentait de tuer mes fils et moi ainsi que Sir Kamille qu'il tenait du point de son épée ?

- Je le crains Mon Seigneur.

- Ne savent-ils donc pas que c'est, au péril de votre vie que vous avez même protégé ma femme et la Princesse Stalia de ses femmes cupides cachées dans cette salle tandis que nous autres, là haut, combattions avec acharnement ? Ne savent-ils donc pas que vous avez combattu seule une de ces créatures ramené par le Roi Edmond pour vous tuer avec nous ?!

- Encore une fois Majesté, je crains que non. Pas plus qu'ils ne connaissent les raisons de ma disparition.

- Femme, suffit, gronda Nohan en lui prenant la main.

Kaerthage resta silencieuse mais la colère du Roi qui avait été si ignorant de la façon dont la jeune femme avait été traitée par son propre peuple le mettait en rage.

- Père, inutile de vous occuper de ça, déclara Nohan.

- Le Prince n'a t-il pas envie de protéger sa femme ?

- Peut-être n'en a t-il plus envie...

- A t-elle réellement fait tout ça ?

Les murmures autour de la grande table alimentèrent la colère du Prince et de son fils dont l'attitude déteignait sur le jeune garçon de façon spectaculaire. Les grondements de l'autre côté de la salle donnèrent au dîner un aspect bien plus sombre que ce qui avait été annoncé quand ils avaient reçu la réponse du retour du Prince au palais.

S'attendaient-ils à le voir arriver seul ? Les voilà bien déçus mais surtout se questionnant sur la véracité des propos de leur dirigeant qui tenait beaucoup à cette solarienne. Thomas était incapable de rester à sa place, mais son père le retint de quitter la table, de plus... il ne pouvait le faire avant le Roi ou la Reine ou du moins pas sans leur accord. Une torture quand on était en douleur, mais pour le cas de ces deux-là ils se retenaient surtout de se lever pour effrayer ceux qui s'en prenaient à Kaerthage.

Un vent chaud traversa la pièce, surprenant son monde, la belle solarienne murmura quelques mots pour apporter un peu de paix dans ce dîner qui commençait à tourner au cauchemar.

- Voyez Majesté ! C'est une sorcière ! s'écria une femme en se levant d'un bond la pointant du doigt.

- Je le suis Ma Dame, répondit la jeune femme posément. Puis-je vous montrer ce que je sais faire avant que je ne puisse plus retenir mon mari et mon fils de vous couper la langue et plus ? Pensez-vous qu'ils ne réagissent pas parce qu'ils n'en ont que faire ? Regardez bien.

Nohan et Thomas étaient en colère mais ne pouvaient effectivement bouger à cause d'elle et d'un sort qui les immobilisaient sur le banc.

- Kaerthage, gronda Nohan.

- Je puis me défendre seule cher époux. dit-elle en lui adressant un regard calme.

- Assez, déclara le Roi fatigué. Douce enfant, veuillez excuser ces ignorants.

- Mon Seigneur ! s'écria la femme offusquée, ne croyez pas cette sorcière ! Vous aurait-elle jeté un sort ?

- Voilà donc le prix d'avoir des imbéciles à la table des Rois, soupira le vieux guerrier qui leva sa lourde épée pour la replacer dans son fourreau.

- Ne vous fustigez point Seigneur, dit alors sa femme. Nous avons tous été témoin des exploits de Kaerthage et de son sacrifice, laissons ceux qui ne la connaissent pas et ne le veulent pas, penser qu'ils ont encore le droit de l'insulter jusqu'à ce que le dîner soit terminé. Kaerthage.

- Ma Reine ?

- Mon enfant, j'ai encore le souvenir de ton chant, peux-tu nous jouer quelque chose pour apaiser les tensions ?

- Bien entendu.

Elle se leva alors avec grâce pour se diriger vers l'estrade des ménestrels. On lui tendit la main pour l'aider à monter et s'installer sur une chaise. Elle prit un lute, l'accorda et se mit alors à jouer sans magie aucune cette fois, laissant simplement le temps faire son œuvre seul et sa voix transporter son auditoire dans une paix intérieure.

Une fois fini, elle rendit son lute au musicien puis regagna sa place tranquillement, mais l'esprit tourmenté par tant de choses qu'elle fini par garder le silence durant tout le dîner.

Épiée, la jeune femme était trop perdue pour se rendre compte de quoi que ce soit.

- Libère moi, entendit-elle.

D'un claquement de doigts, la jeune femme libéra mari et enfant.

- NON ! entendit-elle crier.

Malheur ! Elle n'avait pas réalisé ce qu'il c'était passé et les avaient libéré sans se douter non plus qu'elle avait failli passer par la mort bien plus tôt que prévue.

- Nohan...

- Douce femme, je sais ce qui te perturbe tant, mais cette vipère a bien failli profiter de ton état pour t'empoisonner. Sa jalousie et son ignorance ont parfaitement joué leurs rôles dans son esprit maladif.

Kaerthage se sentit soudainement lasse et demanda à quitter la salle.

- Bien sûr mon enfant, allez vous reposer, vous m'avez l'air si peu remise encore. fit la Reine inquiète.

Kaerthage s'inclina puis quitta, suivi de ses aides ainsi que deux des Ravageurs attachés à sa sécurité, pour remonter dans l'aile qui leur était réservée.

- Majesté.

- Hm ?

- Qu'est-ce qui vous tracasse à ce point ? demanda Térém inquiet.

- L'attitude au dehors tout comme l'avenir que j'ai pu voir. répondit-elle encore trop perturbée par ce qui ce passait en elle et autour d'elle depuis son réveil.

- Ne vous en faites pas Majesté, vous êtes protégée et en sécurité, lui assura Cyral, le deuxième Ravageur qui accompagnait Térém.

- Merci, mais je ne puis éternellement compter sur vous et vous voir blesser comme Sir Kamille et Sir Leron. Ce souvenir m'est encore bien trop pénible à supporter. déclara t-elle.

Elle se leva pour aller derrière un rideau de fourrures et se changea avec l'aide de ses aides.

- Vous êtes encore bien marquée Majesté, fit Capucine en la trouvant encore trop maigre.

- Je n'ai jamais été très en chaire, répondit la jeune femme qui étudiait son corps.

- Capucine, cesse donc, la réprimanda Ellan, faisant rire leur maîtresse.

- Vous entendre rire est déjà un exploit ! entendirent-elles de l'autre côté du rideau.

- La flatterie ne vous aidera pas vous savez ? leur lança Cassia.

- Oh Dame Cassia, ne soyez pas si dur avec nous ! l'implora une voix.

- Messire Siméon, un plaisir de vous voir.

- Votre Altesse, c'est une étrange façon de vous rencontrer.

- Je vous le certifie.

- Kabal Majesté.

- Sir Kabal, c'est également un plaisir, mais puis-je poser une question ? demanda t-elle en apparaissant dans une grande robe de chambre chaude, les cheveux lâchés.

Son apparition accompagné de ses dames fit soupirer les deux démons et leurs partenaires.

- Veuillez nous excuser.

- C'est un phénomène bien étrange, mais je pense comprendre pourquoi il a lieu, répondit la jeune femme en s'installant près du feu.

- Quelle est donc votre question ? repris Térém.

- Sir Kabal.

- Majesté ?

- Votre nom ne m'est pas inconnu, ou du moins son origine ne l'est pas.

- Oh sans doute parce que je suis de Solaris également. répondit le démon sous les traits de Cyral.

- Ainsi vous êtes de Solaris. dit-elle, intéressée par l'information.

- Les démons comme nous venons certes d'un autre monde pour les humains, mais nous avons été façonné sur terre. Bon nombre d'entre nous ne viennent pas de Kaolan. Hormis le Maître, Sir Storke, Karssian ou encore Leron, les autres viennent d'un peu partout.

- Prenez Fran et Derek par exemple, continua Siméon, nous trois venons de Yenesse.

- Vraiment ? s'étonna Capucine.

- Bien sûr.

- D'où venez vous ?

- De Ténéris, le pays Rose. répondit Siméon en souriant.

- Tant d'endroits à visiter, murmura Cassia.

Kaerthage se mit alors à rêver de vouloir visiter tout ces lieux, découvrir les nombreux royaumes de ce monde et découvrir plus sur le monde.

- Avna est un solarien également, leur appris Cyral.

- Cela ne puis m'étonner, pouffa la Princesse.

- En quoi cela ne vous étonne pas Majesté ? demanda Siméon dont le regard brillait d'attention envers la jeune femme intrigante.

- Sa façon d'être, tout en lui me rappelle Solaris et je ne me sens plus aussi loin de chez moi quand je descend à la forge ou quand il est dans la salle. expliqua t-elle en repensant à une ou deux anecdotes qui lui avait fait comprendre que le démon et l'homme venaient du même endroit.

Si Kaerthage avait trouvé très étrange que les démons aient pu avoir des origines humaines, elle n'avait pu être plus surprise de comprendre qu'ils étaient bien plus humains qu'ils n'y paraissaient. Se savoir aussi proche de ces hommes la faisais se sentir étrange, comme si elle avait toujours appartenue à ce côté là du monde. Comme si le voile de l'étrange se déchirait enfin pour lui montrer sa véritable appartenance.

Alors que sa femme était en haut se préparant au couché, Nohan, dans la grande salle, se savait libre de pouvoir faire ce qu'il voulait. C'est alors qu'il laissa glisser sur le sol, la froideur de sa colère, le tranchant de sa fureur. Son regard changeant pris une teinte plus acide, son fils à ses côtés vit son propre regard prendre des teintes plus violente encore.

Ce duo père fils faisait peur, mais à juste titre, car ils étaient les protecteurs d'une créature que les humains allaient bientôt leur convoiter.

Les Ravageurs réveillés, démons grondant, les armes frappant le sol, voilà que la salle de repas se transformait en un cercle de combat où personne ne pourrait en réchapper au risque de se voir dévorer par les sbires de la nuit.

Le dallage vibra, les murs tremblèrent, les vitraux avaient du mal à tenir en place et les flammes souffraient du froid au point de se voir figées, prises au pièges dans une glace sombre et maléfique.

Le regard de Nohan laissait voir le démon qui partageait son corps, être plus menaçant que le Prince.

Nohan et Atlas avaient, au fil du temps, développé une complicité et une amitié bien difficile à définir et dont l'amour commun qu'ils avaient tous les deux pour Kaerthage et pour leur fils était devenu un sujet qu'ils partageaient comme si ils ne faisaient qu'un. Aucun n'y voyait de jalousie mais Atlas savait bien que l'amour du Prince était le plus fort et sa dépendance à sa femme était une dangerosité qu'il devait maîtriser pour ne pas les perdre tous les deux. Sachant que son propre amour partageait maintenant l'enseignement de cette douce créature avec les Hauts Dirigeants, il ne pouvait se sentir plus proche d'elle que de ses propres hommes qui pourtant, comptaient beaucoup pour lui. Fieren leur avait offert la chance de vivre encore à travers de valeureux guerriers morts au combat ou dans d'injustes méprises.

L'amour que l'ange et le démon se partageait depuis la nuit des temps était à l'image de ceux dont ils avaient la charge : puissant, vorace, dangereux et pourtant si beau et lumineux.

- La Princesse n'étant plus présente pour retenir mon fils, fit le Roi qui contenait sa peur face à la situation. J'exige que ceux qui ont besoin de se montrer odieux envers Kaerthage Karsan, Princesse de Kaolan et femme du second Prince Karsan, se montre pour dire ce qu'ils ont a dire avant de voir leur vie être prise par celui qui la protège.

La voix était dur malgré son manque d'assurance face à son fils et son petit fils déjà bien grand et à l'image de son fils. Stanislas avait peur d'Atlas et surtout de la façon dont son fils pouvait réagir en sa présence ou dans un excès de rage.

Nohan sortie sa lourde épée qui vibra dans sa main, se couvrant d'une lueur sombre jusqu'à la pointe de cette dernière, son regard acide se posa sur la première qui tremblait, prête à prendre les jambes à son cou pour fuir cette salle et ce prince qui la terrifiait autant qu'il la faisait se pâmer.

- Le Roi exige, répéta alors la voix profonde et vibrante des deux êtres dans le corps de Nohan.

- Le Roi veut savoir, répondit son fils dont la voix vibrait d'un ton plus grave que sa petite voix d'enfant.

- AOU ! crièrent les Ravageurs, effrayant tous le monde dans la salle.

Mais alors que la confrontation avec les partisans qui s'étaient regroupés pour tenter de parler au nom du peuple, les insultes plurent sur la jeune femme dont le nom fut tant et tant trainé qu'un premier corps tomba sur le sol gelé, la tête roulant jusqu'à la porte et faisant face aux pauvres servantes qui poussèrent des cris horrifiées.

Alertés par les cris, Kaerthage se précipita avec sa suite, dans la grande salle pour en découvrir la macabre ambiance ainsi qu'une victime décapitée dont le regard était braqué sur elle.

- Là ! La voilà la sorcière Solarienne ! cria quelqu'un alors qu'elle se présentait en robe de chambre, les cheveux lâchés sur ses épaules et dans son dos en un rideau soyeux.

Son regard se chargea de colère et d'incompréhension.

- Reculez ! grondèrent d'autres gens à la table qui se regroupaient pour être le plus loin possible du père et du fils.

- Assez ! s'exclama alors la femme qui venait d'entrer avec précipitation dans la grande salle en tenue de nuit.

- Maîtresse !

- Suffit j'ai dit !

- Kaerthage, l'implora la Reine en panique, ne sachant quoi faire pour empêcher ce massacre.

- Restez à l'écart, dit-elle simplement sans lui adresser le moindre regard.

La Reine comprit que la guerrière était de nouveau présente, comme cette fois-là, dans la salle cachée alors que certaines dames tentaient de la tuer ou qu'elle combattait cette créature féroce.

Mais ce qu'elle allait affronter n'avait rien avoir avec ce tigre du soleil ni les dames de la Reine, c'était son mari et son fils qu'elle allait affronter, pour la paix du château.

***

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