Chapitre 32 : Krigus

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Sheireen se replaça approximativement où elle avait arrêté le temps. Orestt avait déjà disparut entre les arbres.

Elle joignit ses mains, ferma les yeux et respira profondément plusieurs fois. Elle sentit alors le pouvoir ressurgir dans ses veines tandis que le monde reprenait ses droits. Les feuilles se remirent à bouger dans le vent, ses compagnons se remirent à respirer, à bouger. Son aura réapparue enfin, l’auréolant de noir.

— C’est bon ? Tu as fini ? Ca ne fonctionne pas, disait son frère.

Sheireen sourit, elle avait réussie.

— Pourquoi tu souris ? demanda Oma en fronçant les sourcils.

— Seth à tort, affirma-t-elle en sortant les fleurs de son sac.

— Mais...comment ? bafouilla Seth.

— On en parla après.

“Sévrar, j’ai les fleurs. Que dois-je faire maintenant ?”

“Wow, déjà ? Incroyable.”

“Alors ?”

“Hm, oui, excuse moi. Alors il faut que tu les écrases et que tu les fassse infuser. Une fois qu’elle aura avalé la mixture, tu devras dire une formule.”

“Je t’écoute.”

Il énonça une suite de mot inconnus que Sheireen répéta difficilement. Sévrar le lui fit dire plusieurs fois et lui souhaita bonne chance.

— Léarco, écrase quelques fleurs. Oma, fait bouillir de l’eau.

Ils obéirent et, rapidement, la potion fut prête. Sheireen la fit boire à Eglantine et posa ensuite ses mains sur la blessure noire. Elle prononça alors les mots et une lumière dorée sortit de ses paumes. Une fleur fleurit sur la plaie, recouvrant de ses pétales la peau purulente.

Sous les yeux médusés des apprentis, la plante aspira tout le poison du corps de la jeune fille. Puis elle fana et disparut.

§

Sheireen avait dormi longtemps, arrêter le temps l’avait épuisé. Lorsqu’elle se réveilla enfin, Eglantine allait bien mieux.

Ce fut alors le temps des questions. La jeune femme expliqua rapidement comment elle avait arrêter le temps, son voyage et où elle avait trouvé les fleurs. Inconsciemment, elle ne mentionna aucune fois Orestt.

Elle fut coupée par la voix de Kryss dans son esprit :

« Sheireen ! Noah nous a trahi. Maïwen est morte. Nous avons été capturé. Ils nous amènent à An Wesiri… »

La communication fut coupée brusquement et Sheireen s’empressa de répondre :

« Bien reçu, courage. Nous viendrons vous aider aussi vite que possible. »

Elle annonça ensuite la nouvelle à ses compagnons.

— Quoi ?! Mais c’est impossible ! s’exclama Seth en se redressant.

— Ceci explique l’embuscade qui a failli emporter Eglantine, fit remarquer Léarco calmement.

Les autres acquiescèrent en silence. Ils avaient conscience que si Noah avait sut leur itinéraire, ils auraient aussi été capturé, voir tué.

— Il faut que l’on se dépêche.

— Nous reprenons la route demain, ordonna Sheireen en se mettant automatiquement dans le rôle de chef.

§

Après la discussion avec les autres, Sheireen avait rejoint Orestt pour l’éveiller.

— Tu es prêt ? demanda-t-elle simplement.

Il hocha la tête, attendant les ordres. Elle sortit le petit livre et, pour la énième fois, relisit le chapitre où Onxy éveillait son âme-soeur. Il n’y avait pas grand chose à faire, contrairement à l’éveil qu’avait subit Sheireen, il n’y avait aucune formule à prononcer.

Sheireen fit s’allonger le jeune homme dans l’herbe et, debout près de ses pieds, elle tendit les mains en fermant les yeux. Etait-elle assez expérimenté pour faire ça ? Et si elle le blessait, voir pire, le tuait ? Ce ne serait pas comme lors d’un combat. Elle s’en voudrait sûrement très longtemps, après tout, c’était son âme-soeur.

Elle respira un grand coup, chassant ses doutes avec détermination. Si il y avait bien une chose que ses derniers mois lui avaient appris, c’est que rien n’était impossible avec la magie. Lors de ses entraînements avec Rowenn, il n’avait cessé de dire que le doute était une barrière au pouvoir. Elle pouvait le faire.

Se concentrant sur la tâche à effectuer, elle dirigea son énergie vers ses mains, visualisant Orestt dans son esprit. Ses yeux aussi noir que ses cheveux - et que son aura. Son regard fatigué, ses gestes fluides.

Elle relâcha l’énergie qui s’envola vers le jeune homme au sol.

Celui-ci sentit alors comme quelque chose qui se débloquait en lui, quelque chose qui lui avait toujours manqué sans qu’il ne le sache. Tous les poils de son corps se hérissèrent. Il ne sentait plus le sol sous lui, s’était-il envolé ? Malgré la curiosité, il garda les yeux fermés.

Sheireen vacillait, comment un éveil pouvait coûter plus d’énergie que d’arrêter le temps ? Elle tenait bon tandis que Orestt s’élevait au dessus du sol. C’était presque fini.

Le garçon redescendit sur terre et ouvrit les yeux. Il semblait aller bien.

§

Ils avaient repris leur route. Eglantine était faible mais, grâce à ses coéquipiers, elle tenait le coup. Elle se remettait jour après jour et, lorsqu’il arrivèrent devant le fleuve Say, elle pouvait marcher seule.

— Comment allons-nous traverser ? demanda Oma. Eglantine ne peut pas nager.

— On pourrait fabriquer un radeau, proposa Seth.

— Tu as vu le courant ? Nous dériverons trop.

— J’ai peut-être une idée. Attrapez mes mains.

Ils s'exécutèrent et Sheireen, se remémorant son entraînement, les fit disparaître pour les faire réapparaître sur l’autre rive.

§

— J’ai vu comment vous avez passé le Say. C’était incroyable. Je ne pensais pas qu’on pouvait se téléporter avec d’autres personnes, disait Orestt en marchant aux côtés de Sheireen.

Elle sourit et avoua :

— Je ne pensais pas y arriver a vrai dire.

Ils se retrouvaient ainsi tous les soirs depuis que Orestt avait été éveillé. La jeune elfe entraînait l’humain avec dureté mais il ne lui en voulait pas. Ils avaient peu de temps. L’équipe de Sheireen se rapprochait de la grande chaîne de montagne et, bientôt, Orestt ne pourrait plus les suivre.

— Que faisons-nous ce soir ?

— Je crois que tu es prêt à te téléporter. Tu as réussi tous les exercices de concentration que je t’ai demandé et tu arrives maintenant parfaitement à téléporter des objets jusqu’à toi.

Il acquiesça tandis qu’elle continuait :

— Je vais donc te demander de visualiser l’autre côté de cette clairière. Ensuite, tu vas te visualiser là bas. Si tu es suffisamment concentré, tu disparaitras, traverseras un royaume des ombres et réapparaîtras au bon endroit.

Il acquiesça de nouveau et respira doucement, son énergie irradia dans tous ses membres, il devint flou puis disparut. Il réaparut à l’endroit prévu, en hurlant.

— Orestt ! Est-ce que ça va ?! s’écria Sheireen en accourant vers lui.

— Mon bras ! Mon bras !

Arrivé à ses côtés, Sheireen remarqua qu’un lambeau de chair avait été arraché du bras du garçon, révélant les muscles et l’os. Le sang coulait à flot et Orestt serrait maintenant les dents pour ne pas crier. L’elfe se tourna instinctivement vers l’endroit d’où avait disparu le brun et vit la peau qui manquait reposer sur l’herbe.

— Tu n’étais pas assez concentré, fit Sheireen en allongeant le brun pour le soigner.

— Désolé, répondit-il entre ses dents serrées.

— Ça arrive, ne t’inquiète pas. Je vais arranger ça.

Elle appliqua ses paumes sur la blessure et lança un sort de guérison. En quelques minutes très silencieuses, la chair fut reconstruite.

— Reprenons.

§

Vint le jour où l’équipe arriva au pied des montagnes.

— Sheireen, tu ne pourrais pas encore nous téléporter ? demanda Seth le cou tordu pour regarder les pics vertigineux.

— Je ne vois pas comment. Pour me téléporter, il faut soit que je vois la destination, soit que j’y sois déjà allé.

— Je vois, les dragons auraient vraiment été utile, mais nous allons devoir le faire à l’ancienne, déclara Léarco.

— Exact. Nous commencerons l'ascension demain, annonça Sheireen en posant son sac.

Ils dressèrent le camp puis, prétextant partir à la chasse, Sheireen s’enfonça dans la forêt. Elle y retrouva Orestt.

— Tu devras partir cette nuit, annonça-t-elle. Je ne pourrais plus t’entrainer à partir de maintenant.

— Je sais.

— D’ailleurs, je ne sais pas trop quoi t’apprendre pour ce dernier cours. Une idée ?

— Pas vraiment. Je sais me téléporter, téléporter des choses jusqu’à moi. Je connais quelques sorts de guérison. Je suis prêt.

— Prêt pour quoi ?

— Je vais aller en Wesiria. Je vais m’infilter chez les Sharaka et préparer le terrain pour votre arrivée.

— Tu ne peux pas faire ça. Tu ne peux te téléporter qu’aux endroits…

— Où je suis déjà allé. Je sais. Je suis déjà allé chez les Wesi. Je peux me fondre dans la masse, je leur ressemble. Peut-être même en suis-je un… Je t’ai promis de ne pas utiliser mes pouvoirs pour voler ou assassiner, je vais donc les utiliser pour la bonne cause.

— Très bien, répondit simplement la jeune elfe. Je ne t’en empêcherais pas. Mais avant, je dois t’apprendre à communiquer à distance. Ainsi, tu pourras me faire part de tes actions.

Utilisant la même technique que Rowenn, Sheireen apprit donc la télépathie à Orestt. A la fin du cours, ils se dirent au revoir et Orestt disparut - sans laisser de lambeau de chair derrière lui cette fois.

§

Ce fut une ascension pénible, plus que la traversé du mont Cetus. Ils mirent presque une semaine avant de se retrouver de l’autre côté de la chaîne de montagne où ils découvrirent une immense forêt tropicale.

— Vous êtes sûr que nous sommes en Wesiria ? demanda doucement Eglantine.

— Je n’en ai pas l’impression. Avons-nous dévié de notre route ?

— À moins que Wesiria se trouve de l’autre côté…

Ils décidèrent d’avancer, lorsqu’ils passèrent sous les premiers arbres, ils eurent l’impression d’entrer dans un sanctuaire. Même Sheireen - qui avait l’habitude de l’ambiance étrange de Maranwê - se sentait mal à l’aise. Tout était très silencieux, ils avaient l’impression d’être constamment observé par des centaines d’oeil.

Ils finirent par s’arrêter pour dormir, Seth était chargé du premier tour de garde.

Or, lorsqu’il se leva et s’étira pour aller réveiller Léarco qui devait prendre sa place, quelque chose se planta dans son cou. Il fit quelques pas incertains puis s’éffondra, endormi.

§

Sheireen ouvrit difficilement les yeux, pourquoi était-ce si difficile ? Pourquoi personne ne l’avait réveillé pour son tour de garde. Elle tenta de bouger, en vain. Ses pieds et ses mains étaient lié par de solides cordes tressés. Elle regarda autour d’elle et découvrit qu’elle était en cage. Le Wesi les avaient-ils capturé pendant leur sommeil ? Elle n’en avait aucun souvenir.

Ses yeux avaient du mal à faire le point mais elle distinguait des formes humanoïdes autour de sa prison.

— Où suis-je ? grogna une voix à ses côtés.

— Seth ! Nous avons été capturé.

— Ils ne ressemble pas à des Wesi, faisait remarquer Léarco dans son dos.

Sa vision s’éclaircit et Sheireen put voir les hommes et les femmes curieux qui les observaient. Ils avaient la peau bronzé et étaient vêtus d’habits en peau.

— Qui êtes-vous ? Et que faites-vous sur le territoire des Krigus ? demanda une grande femme au yeux aussi noir que ceux de Orestt.

Avec des gestes agiles, elle ouvrit la porte de la cage, faisant cliqueter les nombreux bijoux en or qu’elle portait. Sa voix à l’accent exotique résonna de nouveau :

— Répondez.

— Nous ne vous voulons aucun mal, commença Léarco, nous venons de Zalia et cherchons Wesiria.

— D’ailleurs nous ne savons pas qui sont les Krigus, fit remarquer Oma.

La femme fit une moue songeuse et, sans rien dire, sortit de la cage et chuchota quelque chose à un soldat. Il s’en alla en courant puis revint avec une vieille dame. Elle était petite et très fripé, pourtant tous la regardaient avec respect, même la grande dame s’inclina à son passage.

Elle entra dans la cage et ordonna à deux soldats de mettre les prisonniers en cercle. Elle se plaça au centre et, après avoir touché chacune des têtes, elle se mit à marmonner. Ses yeux se révulsèrent et elle énonça :

— Ils seront six. Humains, elfes et demi-dieux. Des auras précieuse, d'Obsidienne, d'Or, d'Argent, de Diamant, de Rubis et d'Émeraude, à détenir le pouvoir des dieux fondateurs. Ensemble, ils deviendront sauveurs ou destructeurs.

Ses yeux reprirent leur couleur bleu et, avant de s’effondrer, elle dit :

— Amenez les à Soliss.

Tous s’éloignèrent de la cage et, alors que la femme s’éloignait, Sheireen s’exclama :

— Attendez ! Qui êtes vous ? Où sommes nous ?

— Je suis Etoile Noire, chef de la tribu du village des Kazi. Vous êtes sur le territoire des Krigus qui se situ au sud de la grande chaîne de montagne.

§

Le lendemain, ils furent réveillé à l’aube par plusieurs soldats.

On leur délia les pieds et les poussèrent en avant. Ils traversèrent difficilement la forêt pendant trois jours. Ils finirent par arriver dans une grande clairière occupé par un immense temple. C’était une sorte de pyramide à degrés, au sommet trônait un grand symbole inconnu des apprentis dragoniers.

— Voici le temple de Soliss, notre déesse, leur expliqua Etoile Noire. Elle seule décidera de ce qu’il adviendra de vous.

Ils leur firent monter les marches, les soldats restèrent en bas tandis que la chef fermait la marche.

Arrivé en haut, Etoile Noire les dépassa et se positionna sous le symbole qui de près ressemblait à une patte de félin. Elle inspira puis se transforma en un chat noir.

Les apprentis eurent des hoquets de stupeur tandis que le symbole s'illuminait, comme si la transformation l’avait activé. Ils furent obligé de détourner le regard tandis que le symbole brillait de plus en plus fort.

Lorsqu’ils rouvrirent les yeux, se tenait devant eux une femme blonde aux yeux aussi violets que Sheireen. Elle les reagarda avec bienveillance puis se tourna vers Etoile Noir qui avait repris sa forme humaine. Cette dernière s’inclina vivement et dit aux apprentis :

— Inclinez-vous devant Soliss, la déesse féline.

Ils s'exécutèrent et la déesse leur fit signe de se relever puis demanda :

— Que me vaut le plaisir de ta visite Etoile Noire ?

— Nous avons trouvé ces étrangers près de la frontière. Goutte de Pluie, notre guérisseuse, a essayé de voir leur passé mais est tombé inconsciente après avoir énoncé une sorte de prophétie, expliqua la femme.

— Quelle prophétie ?

Etoile Noire répéta mots pour mots ceux de la vieille dame et attendit la réaction de la déesse.

— Je connais cette prophétie. Elle a été énoncé pour la première fois il y a très longtemps par mes parents, les dieux fondateurs. Je ne peux rien révéler mais il se pourrait que ces jeunes gens soient impliqué dans quelque chose qui les dépasse, répondait-elle en s’avançant pour détacher les prisonniers.

— Merci, s’inclina de nouveau Léarco. Nous sommes en mission. Nous venons de Zalia, sa Majesté nous envoie délivrer sa fille. Nous devons nous rendre en Wesiria.

— Pourriez-vous nous indiquer la direction à prendre ? demanda Sheireen.

— Pourrais-tu les accompagner jusqu'à la frontière ? fit Soliss à Etoile Noire.

— Evidemment.

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