Win for life

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Il était une fois, il n'y a pas si longtemps que cela, dans un royaume déclinant, une famille plus que richissime : l’une des quatre-vingt qui se partageait alors la moitié du capital mondial. Sa fortune était telle que le pays dans lequel elle était implantée ne pouvait se passer d'elle. Elle finançait les activités et les services de l'État. Ajouté à cela, elle possédait une part considérable des terres du royaume et dans ses innombrables propriétés étaient logés d’indénombrables citoyens –  pour un loyer somme toute modique. Cette prospérité clanique n'était pas si ancienne, elle remontait à peine à l'aïeul, Stive Jaubs. Un entrepreneur de génie qui avait parié au bon moment sur l'informatique et avait bâti la firme à la poire. Il avait ensuite diversifié ses activités entre avions et musique sous le label Vierges In. A ses quarante-cinq ans, il délégua la partie Vierges In  à son plus jeune fils, Charles – le véritable héro de ce récit -, afin que celui-ci puisse vivre ses premiers émois dans le monde des affaires. Être déniaisé  en quelque sorte. L'expérience fut désastreuse et papa dut reprendre les rênes. Charles devint alors rentier - occupation tout-à-fait en accord avec ses capacités. Cependant l'incident le frustra et il en conçut une grande haine envers son père. Celle-ci fut telle qu’il changea de nom de famille. Se débarrassant du nomine pater, il embrassa celui de sa mère, Brunson.

Pour expliquer cet acte plutôt extrême, il est nécessaire  de savoir que l'ombre du grand homme fit beaucoup de tort à Charles. Et que les figures fraternelles, le richissime politicien conservateur – et un tantinet agressif - Donald Tromp et Henri Rothshield, le directeur exécutif d'une grande compagnie énergétique, ne l’aidèrent pas non plus. Tous ces modèles qui avaient mené de brillantes carrières pleines de succès jetaient Charles dans les abîmes de l’ego médiocre. Le vilain petit canard familial se sentait, à leur aulne, comme un parasite, un imbécile, un incapable. Ce complexe fut le moteur d'une obsession : celle d’accomplir quelque chose, de s’inscrire parmi les élites, de marquer son temps, d'apporter une pierre à l’édifice familial. Oui, mais comment ? Il pensa d'abord à inventer. Mais que pouvait-il imaginer qui n'avait déjà été créé ? Le bâton à selfie ? Déjà fait. La planche motorisée pour se déplacer sans fatigue ? Aussi... ils ont appelé cela Segway… La table de ping-pong flottante ? Trop tard, encore une fois il avait été devancé. Face à tant de déconvenues Charles se raisonna : si tout avait déjà été réalisé  et si le monde entier s'ingéniait à ne pas lui donner sa chance, il devait alors se diriger vers un autre domaine. Mais lequel ? Après quelques semaines d’introspection, il eut une illumination : il songea à son frère Donald qui, dans l’exercice de sa fonction politique, menait des recherches très poussées sur ses adversaires. C’est-à-dire qu’il décortiquait leurs actes, leurs entreprises, leurs discours, leur passé – bref tout ce qui touchait à ces individus – de manière à débusquer un mensonge, une fraude ou un scandale. Et c’était avéré : il y avait toujours une vérité déplaisante. Alors quand celle-ci était exhumée le rival était déstabilisé, décrédibilisé aux yeux de l’opinion publique. Et, bénéfice plus que mérité,  Donald était alors auréolé de probité, de vertu ; il était, à ces moments-là, l’intransigeant défenseur de la justice, le révélateur des maux et des menteurs. C’est dans l’exemple de son frère que Charles trouva sa grande idée.


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