9

5 minutes de lecture

Ses changements furent remarqués par ses camarades les plus proches, souvent avec des félicitations. Plusieurs touchèrent son pin's, avec un petit sourire. La scène finale de l’année passée devait encore vivre dans leurs mémoires. Patrice fut surpris, car un seul, Laborde, lui fit la gueule. Il n’empêche ! Malgré la joie de ses retrouvailles, il lui manquait l’essentiel. Un ou deux petits messages durant l’été, puis l’absence de réponse avaient obligé Patrice à accepter cette rupture.

Leur petit monde reprit, chacun reprenant ou retrouvant sa place, malgré les changements de classe. Ainsi, lui passa en première B, pour des raisons mystérieuses. Hormis deux ou trois nouveaux, il les connaissait tous, mais moins bien que ses camarades de la seconde A. Quand il arriva, seules quelques places restaient libres et il suivit l’invitation de Germain à s’asseoir à son côté. Jérémy Germain ! Ils étaient restés lointains, mais immédiatement, Patrice se souvint de la liste de Jacques. Se pouvait-il que…

Patrice s’efforça de faire connaissance avec ses nouveaux camarades, tout en restant proche de son ancienne bande. Il sentit d’emblée tout un groupe lui être hostile, ne se privant pas d’en murmurer la cause : son exhibition avec Jacques et son badge, avec le sous-entendu clairement exprimé : pas de pédé parmi nous. Cette répulsion lui apparut plus forte que celles vécues l’année précédente. Ils n’avaient pas tort ! Ils s’étaient un peu oubliés avec Jacques et que certains en restent choqués se comprenait. Il fut étonné d’être défendu par Germain et, surtout, par deux filles, Moulier et Augeron. L’ambiance s’améliora avec le temps, mais Germain resta très proche de Patrice. Son corps fin aurait pu lui plaire, mais il manquait de grâce, de cette attitude qui aurait pu le rendre attrayant. Ses traits étaient banals, et son sourire peu attirant. Apparemment, il recherchait une camaraderie avec Patrice, et ce dernier se laissa conquérir, pour le remercier de sa défense.

Ce n’est qu’après quelque temps que Germain dévoila son intérêt :

— Je peux te poser une question… indiscrète ?

— Pose ! On verra !

— Qu’est-ce qu’il y avait, entre toi et Jacques ?

— Pourquoi ?

— J’ai admiré votre courage de vous embrasser en public ! De montrer que vous étiez très attaché l’un à l’autre…

— Nous ne voulions rien afficher ! Une profonde amitié nous liait et nous nous disions simplement au revoir…

— En vous embrassant comme deux amoureux !

— Amitié, amour… où passe la frontière ?

— D’autant que tu as repris son petit badge, qui fait très gay !

— Non ! ce n’est pas pour dire qu’il était ou que je suis gay ! C’est pour soutenir les combats contre l’intolérance, en le portant, c’est dire qu’on accepte les différences !

— Et toi, tu es … différent ?

— Jacques m’avait dit que tu lui avais posé la même question, osa-t-il tenter. Cette question t’intéresse… personnellement ?

— Euh… oui et non ! Qui ne se pose pas de questions sur ce qu’il ressent et ses attirances ?

— Et toi, quelles sont les tiennes ?

— Je ne sais pas ! Je trouve des filles très belles et des garçons très beaux !

— Au point de les embrasser ?

— C’est ça que je ne sais pas !

— On peut en parler ! Plus tard ! On rejoint les autres ?

Ce fut la première approche. Très vite, Germain proposa qu’ils s‘appellent par leur prénom.

— Ça va dénoter ! Les autres cons vont encore nous assommer de leurs blagues et nous taxer de pédés ! Mais c’est comme tu veux, Jérémy !

— Toi, ils t’ont classé depuis longtemps. Moi, je suis d’accord avec tes idées de tolérance, donc, tant pis pour ma réputation !

Patrice était un peu gêné, car la gentillesse de Jérémy devenait trop collante à son gout ; parmi les nouveaux, malheureusement dans l’autre classe, il y avait Julien ! Il paraissait avoir quatorze ans, un sourire faisant fondre, des cheveux bouclés et un corps à rêver, selon la perception de Patrice qui avait projeté sur cet éphèbe tous ses désirs insatisfaits depuis des mois. Malheureusement, il n’était pas le seul à partager cette attirance et son rapprochement avec Elodie ravagea le cœur du soupirant. Jérémy, très protecteur, sentit le chagrin de son camarade, en en sachant la cause, puisque Patrice avait eu du mal à dissimuler ses avances, repoussées sans tact par le petit angelot.

— Je ne veux pas être indiscret…

— Mais tu adores l’être ! Vas-y !

— Tu es déçu pour Julien…

— Pas du tout ! Il est mignon, c’est vrai, mais jamais je…

— Moi aussi, je le trouve mignon ! Il fait partie de ces garçons que j’embrasserais bien…

— Moi aussi !

Cette phrase valait-elle aveu ? Patrice ne la compléta pas.

Jérémy prenait le moindre prétexte pour venir dans sa chambre, se tenir près de lui, un peu trop, le frôler. Patrice n'éprouvait rien, mais ne se sentait pas de le rabrouer. Pas plus quand le tentateur posa une main sur son bras, sous un prétexte fallacieux. Ils travaillaient ensemble dans sa chambre. Patrice voyait et sentait le désir de son camarade, incapable de répondre. Il ne retira pas son bras, ne fit pas de commentaire. Peut-être le moment était-il venu ? Ou peut-être voulait-il ressentir à nouveau ces emportements…

Il se laissa faire, puisque la main devint plus caresseuse, avant de descendre sur son entrejambe, déclenchant une érection. Oui, il avait envie de tenir un sexe dur dans sa main, dans sa bouche, de le travailler pour le raidir encore plus, jusqu’à l’éclatement qui le gaverait de nectar. Il ferma les yeux, se laissa déshabiller. Jérémy était d’une maladresse énorme, celle du néophyte dépassé par ses pulsions. Patrice se laissa emporter, tentant de prendre du plaisir. Ce fut lamentable. Où était le précieux partage, l'odeur généreuse, la peau douce de son ancien amant ? Il avait joui ; cela n’était pas arrivé depuis si longtemps ! Ses masturbations lui apportaient un plaisir tellement bref ! D’autant que, pour les renforcer, il repensait à l’agression de Tibourg, cette fois unique où il s’était senti pleinement lui-même.

Avec Jérémy, ils n’en étaient pas là ! Après la décharge, se voir tous les deux dans cet état pitoyable les affola. Patrice connaissait cet abattement. Par gentillesse, et devant le désarroi de son camarade qui venait de vivre sa première expérience, il le rassura, comme Jacques avait pris soin de lui.

— C’était bien ! Ce n’est rien, ça ne change rien. J’ai aimé, Jérémy.

L’emploi de son prénom parvint à arracher un petit sourire à l’intéressé.

— Je ne voulais pas…

— Tout va bien ! Prends le temps de te rhabiller, il n’y a aucun danger !

Jérémy s’enfuit, paraissant honteux de leur acte. Patrice s’allongea sur son lit, la bouche encore pleine de cette saveur particulière. Jérémy ne le tentait pas, mais il avait aimé. Il avait besoin d’un corps d’homme pour son plaisir. Il ne prit pas de décision, mais sa main travaillait son sexe retendu, sachant qu’ils allaient recommencer bientôt.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire gai motus ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0