Keur à prendre
Par la porte entrouverte, elle m’apparaît toute en longueur aussi maigre qu'est dur le bois d'ébène. Les angles vifs de son visage taillé à la machette coupent court à chaque envie de rapprochement qu'il soit amical ou maternel. Ce sont des éclairs qui foudroient les inconscients qu'elle fixe avec des prunelles aussi puissantes qu'une décharge électrique.
Un soufflet de forge dilate ses narines. Juste au-dessous, de l'ivoire dentelle son sourire large, disproportionné, encadré par de belles lèvres. Je les qualifierais de charnues, car l'humain pulpe en elle, l'humain tremble en moi.
Marie-Victoire affirme une partie de sa féminité dans l'élaboration structurée de sa chevelure. De fines stries tressées au ras de la peau sont dessinées à partir du front, bien dégagé jusqu'à la base arrière de son crâne. L'ensemble des cheveux s'agglutine en un petit chignon collé contre la nuque à l'aide de minuscules pinces quasi invisibles.
Féminin son bras, de l'épaule jusqu'à la croche de sa main. Féminine sa jambe, de l'orteil jusqu'en haut de la cuisse.
Son pyjama de coton imprimé épouse le peu de muscles recouvrant ses jambes. Si longues est déjà un qualificatif élégant, il reste disproportionné lorsqu'elle se penche devant moi pour saisir une pièce de monnaie tombée à terre. La transparence du tissu accentue la seule rondeur existante en ce lieu : ses fesses. Elles paraissent menues, fermes et menues. Menues pour mes mains, c'est suffisant, non ? Demi-sphères concaves au regard, qu'on vexe au toucher.
Après tout, les désirs qu'on vise distordent la réalité.
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