1.
Dans nos vies suractives, dans le flux permanent d’informations et de sollicitations qui rythment ce que nous appelons désormais nos vies, personne ne prend jamais le temps de s’arrêter. Parfois il le faut. Parfois se présente une invitation qu’on ne peut manquer.
C’est le voyage qu’on ne fait qu’une fois.
C’est la vanité du touriste moderne, qui a besoin comme de conquêtes, d’espaces encore inphotographiés, et ne veut découvrir que des lieux encore méconnus qu’il appelle « authentiques », comme autrefois on partait à la recherche des derniers espaces blancs sur les cartes. Voilà donc que j’ai eu l’opportunité de visiter un fleuve que je ne nommerai pas, dans un pays dont vous ne saurez pas le nom. Ne me demandez pas comment j’ai obtenu mon passage, je ne vous le dirai pas. Je ne veux pas que vous me suiviez tout de suite. Vous aurez bien le temps plus tard.
J’ai pris des carnets et un appareil photo. J’ai pris une tente, un sac et du matériel de camping. J’ai pris tout ce que je pouvais emporter, et me voilà, moderne explorateur, prêt à enregistrer sur ma carte mémoire des souvenirs sans nombre. Que je ne regarderai pas, ou peut-être une fois.
Je suis sur le chemin de sable qui longe la rive du grand fleuve qui coule à mes côtés, éclairé par le soleil de cette fin d’après-midi. Sous mes pieds, le sable est tassé par le passage de voyageurs invisibles. Impossible de savoir s’il s’agit d’une route de prestige destiné à la noblesse, ou d’un chemin de halage pour les pieds nus des peons. Sans doute les deux. C’est le seul passage qui serpente entre les canyons. Il n’y a pas d’autre chemin.
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