Le 27 janvier 2022 dans la nuit, à l'hôtel de Stuttgart.

Nous discutons avec Tom de ce qu’implique le maintien de la programmation de la conférence de Céline. À minima personne n’est au courant de sa disparation, ou peut-être que, comme l’a dit Tom, quelqu’un s’est fait passer pour elle.
— Euh, t’es sûr que je suis obligé de boire ce truc ? dis-je en montrant ma tasse à Tom.
— Evidemment ! Ce thé est délicieux et il nous aidera à bien récupérer du stress de ces derniers jours.
J’hésite encore quelques secondes. Je trempe d’abord mes lèvres dans le breuvage, avant de boire une bonne moitié de mon mug. Ce n’est pas mauvais son machin, et puis ça réchauffe.
— J’espère juste que je ne l’ai pas laissé infuser trop longtemps !
— Comment ça ?
— Disons que… surtout que…enfin ça pourrait avoir…puis sur toi, je pense que tu n’as vraiment pas besoin de ça !
— Arrête de tourner autour du pot ! Je peux savoir quel serait le problème ?
— OK, tu connais le viagra ?
— Forcément, mais je peux te garantir que je n’ai pas besoin de ces petites pilules, moi c’est dur comme…
— Ça, je m’en doute ! Et c’est bien ça le problème. Il est possible que tu aies un peu de mal à trouver le sommeil.
— Putain ! T’es un vrai pervers ! Je savais bien que je te faisais envie, mais t’aurais pu me demander avant de chercher à me droguer !

*

Plus de trois heures que je suis couché et impossible de trouver le sommeil. Pourtant, j’avais profité de mon passage sous la douche pour essayer de faire baisser la pression, mais je n’avais même pas fini de me sécher que mon bel engin était à nouveau au meilleur de sa forme. J’avais grogné après Tom en sortant de la salle de bain :
— Et tu peux m’expliquer pourquoi tout à l’air normal chez toi ?
— Tout est dans la maitrise de soi, petit scarabée.
— Ouais, ben attendant moi je vais dormir dans le canapé !
Je décide de me lever et d’aller explorer l’étage. De toute façon il est déjà sept heures quarante et puis j’entends les femmes de services dans les couloirs : peut-être que j’obtiendrai quelques informations utiles. D'après Lian, Céline a réservé la chambre 308, au même niveau que la nôtre, une petite fouille des lieux pourra peut-être aussi nous aider dans nos recherches.
Avant toute de chose, il faut quand-même que je m’habille de façon à ne pas trop me faire remarquer. Je fouille dans les affaires de Tom, qui lui dort toujours aussi profondément. Par contre, le drap léger qui le recouvre, me laisse voir qu’il se contrôle beaucoup moins pendant son sommeil. Bordel de merde, il est presque aussi bien équipé que moi !
Je finis par trouver une tunique qui doit être une sorte de Kimono. Je vais avoir l’air ridicule dans ce truc rouge et blanc avec des dragons dessinés dessus, mais à défaut d’être discret, au moins le vêtement est suffisamment ample pour que je ne fasse peur à personne en sortant de la chambre.
Une certaine agitation règne dans les allées de l’étage, un bataillon de femme de ménage armées jusqu’au dent d’ustensiles divers et variés, a envahi les lieux. Visiblement, de nombreuses chambres doivent être nettoyées avant l’arrivée de nouveaux clients. Un brouhaha, mélange d’anglais, d’arabe et d’espagnol, emplit l’espace. Et de temps en temps, un ordre crié en allemand oblige les troupes à accélérer le rythme.
Je m’éloigne jusqu’au bout du couloir, où un tournant isole un peu les dernières chambres du reste de l’étage, et je tombe sur un des soldats affectés au nettoyage des moquettes qui couvre le sol.
— Bonjour ! Hello ! Hola ! Dites donc quelle agitation ici, moi qui espérais un séjour calme et reposant.
La femme qui passe l’aspirateur me fait un vague signe de la tête, sans lever les yeux, concentrée sur sa tâche. Je parle un peu plus fort pour essayer de me faire entendre.
— There is… noise a lot. What is happen ?
Alors là, arrive le truc qui, bien que son produisant presque systématiquement, rend toujours mes potes jaloux : mon charme agit ! La dame me sourit et me répond dans un anglais bien meilleur que le mien.
— Sorry about that. But, today is Reunited Nations assembly. It's SO busy !
— My girlfriend, room…three, zero, height. Make her surprise. Possible to enter.
— No, sorry. It’s impossible.
Je lui fais mon plus beau sourire.
— OK, just five minutes.
Elle arrête son aspirateur et me conduit un peu plus loin. Après avoir frappé à une porte, elle ouvre celle-ci et me précède à l’intérieur.

*

Après m’être changé, je décide de réveiller Tom :
— Allez, grosse faignasse ! Il est temps de se lever.
Je le secoue énergiquement et celui-ci ouvre enfin les yeux.
— Comment va mon cher Mike ? Un peu plus détendu qu’hier, ajoute-il avec un clin d’œil.
— Oui, tout va bien pour moi ce matin. Toi par contre… Enfin remonte un peu le drap où va t’habiller ! T’étais obligé de dormir tout nu ?
Il se lève, m’offrant une vue directe sur ses fesses et s’habille dos à moi. Je le laisse terminer, avant de lui expliquer ma découverte :
— Bon, pendant que Monsieur ronflait, moi je me suis rendu utile et j’ai pu accéder à la chambre de Céline. Evidemment, elle n’était pas là. Par contre, je pense que nos amis en noir doivent la squatter et au cas où on en douterait, c’est pas des rigolos. En fouillant un peu, je suis tombé sur un véritable arsenal, et j’ai dû user de mes charmes, pour convaincre la dame de service qui m’avait permis d’entrer, de ne pas appeler la polizei, inutile qu’ils sachent qu’on les a repérés.
— Bravo Mike ! Au moins, on sait où sont nos ennemis. À nous d’être prudent ! Un peu de thé ? Promis, cette fois je ferais attention au temps d’infusion, dit-il en attrapant la bouilloire.
Une enveloppe est accrochée à cette dernière.
— Ce truc n’était pas là hier. Et je ne crois pas l’avoir vu non plus en me levant tout à l’heure. Quelqu’un est venu dans la chambre pendant que j’enquêtais et que toi tu ronflais comme un cochon. Cet hôtel est une vraie passoire ! Vas-y, ouvre-là !
Il s’exécute et en sort une carte de visite qu’il lit à voix haute :
— Une Attrape Rêve sourit au tigre-dragon, sous le grand saule. Un haïku… de la poésie !
— Et ça va ! Je sais ce que c’est. Céline adorait… adore en faire.
Après un court moment de silence, Tom reprend :
— Désolé. Il y a un nom et une adresse au dos : Tai Chi Schule Stuttgart, Tai Chi Chuan, Chi Kung, Idogo. Böheimstraße 47/1 - 70199 Stuttgart.
— C’est quoi ce truc ?
— Je ne sais pas, mais la seule façon de le savoir, c’est d’y aller.