Juste quelques gouttes
Une semaine, sept jours.
Je marche toute seule dans la nuit, en pensant à la semaine passée. Il fait frais et mon corps commence à frissonner. Je lève les yeux vers le ciel noir. J’ai cette étrange sensation, vous savez, celle qui vous fait vous sentir nostalgique, triste et heureuse à la fois. Marcher dans la nuit pour m’éclairer, c’est presque devenu une habitude ces derniers temps.
22h00
Je continue tout droit, la tête dans les nuages, puis tourne à droite au bout de la rue. Il était temps que j’arrive avant de finir congelée. Je compose le code d’entrée de l’immeuble que Yasin m’a envoyé par message, et m’introduis dans le bâtiment.
Fatalité.
Pas d’ascenseur.
Après avoir monté deux étages, je m’assois sur les marches, exténuée, en me rendant compte qu’il en manque encore trois… Je patiente quelques minutes pour reprendre mon souffle. Enfin, c’est qu’une excuse. La vérité, c’est que j’y vais à reculons. Quand Yanis m’a invité à cette petite fête, j’ai dit oui sans réfléchir. Seulement après coup, je me suis remémorée qu’il habite avec Amor et Samy. Pour tout vous dire, j’ai pas envie de croiser encore « monsieur je pète plus haut que mon cul parce que j'ai prit du muscle ». Depuis « l’incident » du café, maudite soit Carla, je ne l’ai pas revu. Je n’ai reçu aucun message de sa part. Silence radio. Et je ne m’en porte pas plus mal.
Bon allez Angela, relève toi, et rends toi à cette putain de soirée. T’es pathétique là, tu te caches à cause d’un vieux gars. Rappelle toi les mots de Carla: « Les femmes sont nées sans testicules, car Dieu savait que toute leur vie elles auraient des couilles ».
Sur ces quelques pensées sages, je décide de prendre mon courage à deux mains et de gravir les trois derniers étages me séparant de la débauche. Je frappe à la porte mais personne ne répond. J’entends d’ici le rap qui résonne à fond dans l’appartement, et la voix portante de tous les garçons. Après avoir insisté deux minutes en vain, j’appelle Yasin qui m’envoie Abdel sur le champs pour m’ouvrir.
Abdel: « Wesh ma reuss, ça va ou quoi? », me dit-il en se poussant pour me laisser rentrer.
Angela: « Maintenant que je me gèle plus les fesses, super », dis-je très sérieuse, alors que lui pouff de rire.
Abdel: « Vas-s’y pose tes affaire et fais comme chez toi ».
Je dépose mon manteau et mon sac à l’entrée, puis je le suis jusque dans le salon, où une bande inombrable de mec est éparpillée un peu partout. Des verres ainsi que des paquets de chips et autres trucs à manger trainaient aux quatre coins de la pièce. J’aperçois quelques filles que je ne connais pas. Puis en balayant la pièce du regard, je vois « musclor le pédant » assis sur le canapé avec une brune. Une autre brune* devrais-je dire, puisqu’il ne s’agit pas de la jolie fille du café. Nos regards se croisent, mais lui, toujours impassible retourne à sa discussion.
J’ai besoin de boire un coup.
Je vois Amor et en profite pour lui sauter dessus.
Angela: « Hey, dis-moi, tu sais pas ou je peux me servir à boire? ».
Amor: « Salut cousine, viens, avant je vais te présenter », me dit-il en me tirant par le bras.
Angela: « Nan mais tu sais, je suis timide moi, je préférais all…. », je n’ai pas le temps de finir ma phrase qu’il m’entraîne vers un groupe avec des têtes que je n’ai encore jamais vu.
Amor: « Les gars vous présente Angela, c’est sa première soirée à l’appart mettez la bien ».
Je n’ai même pas le temps d’ouvrir la bouche que tout le monde se rue sur moi pour me saluer. Les garçons me check et les filles me font la bise. Ils ont l’air plutôt sympa!! Surtout Melvin, un petit renoi trop rigolo, ça fait un quart d’heure que je parle avec lui et Sacha, une des deux filles. Je mise tout sur lui pour me trouver de quoi me bourrer la gueule pour oublier l’autre pauvre tâche.
Melvin: « Un flash? ».
Angela: « Hein? ».
Ça veut dire quoi ça?
Sacha: « En gros est-ce que tu veux boire? », me dit-elle amusée de mon incompréhension.
Je fais signe que oui avec ma tête, et Melvin m’amène avec lui dans la cuisine. Ça se voit clairement sur mon visage que je suis pas habituée à ce genre de soirée. Mais bon, je suis heureuse de ne pas avoir eu à demander une énième fois pour avoir un verre, ça commençait à faire alcolo.
Melvin: « Vodka? », me demande-t-il en me montrant la bouteille d’Absolut.
Angela: « Yes », lui répondis-je dans un sourire.
Il commence par verser l’alcool.
ET BEN DIS DONC IL Y VA PAS DE MAIN MORTE CE MELVIN!
Il remplie la moitié du verre, puis rajoute du redbul.
Ok.
Je suis cuite, c’est sûr. Je sens que ça va se passer comme dans very bad trip. Moi qui boit un peu c’est déjà drôle, mais au vu de la dose qu’il vient de me servir, je pense qu’ils ne s’attendent pas à ce qu’ils vont voir….
Melvin: « Et voila pour toi », me dit-il en me tendant le verre plein à ras bord.
Angela: « Merci! Dis moi, tu n’aurais pas vu Ayoub et Carla? ».
Depuis que je suis arrivée je ne les ai pas vu tous les deux. Ça risque d’être un peu gênant sans elle.
Melvin: « Carla c’est la petite brune, toujours surexcitée? ».
J’avale ma gorgée de travers et m’étouffe tant je ris.
Je sens une main taper si fort dans mon dos que ma respiration se coupe encore plus.
Carla: « C’est comme ça qu’on parle de moi quand j’ai le dos tourné? Zouaves que vous êtes! On peut faire confiance à personne ici », dit-elle à demi-sérieuse.
Oulala, ça sent pas bon. Cette fille je la connais par coeur, et là, c’est certain qu’elle a pas digéré un truc.
Angela: « Melvin, ça te dérange de nous laisser un peu toutes les deux? ».
Sans parler, il lève ses deux mains comme pour dire qu’il n’y a pas de soucis, puis nous laisse seules dans la cuisine.
Angela: « Qu’est ce qu’il se passe? ».
Carla: « Rien », me dit-elle sèchement, le visage fermé.
Angela: « Écoute Carla, je te connais. Et je sais que là ça ne va pas. Alors dis-moi tout ».
Carla: « C’est Ayoub… ».
Angela: « Qu’est ce qu’il a fait? Tu veux que j’aille lui péter la gueule? », lui dis-je en mimant des biceps pourtant totalement inexistants.
Carla: « T’es bête », me dit elle en rigolant. « Depuis qu’on est arrivés, il n’arrête pas de parler avec Amina. Tu sais que je suis trop jalouse….», souffle-t-elle exaspérée.
Angela: « C’est qui Amina? Celle qui est debout devant lui là? » lui demandais-je en regardant discrètement depuis notre place.
Elle me fait oui de la tête.
Angela: « Mais alors toi dans le genre têtue/jalouse t’es pas mal hein », dis-je en riant à gorge déployée.
Carla: « Et ben bravo l’amitié, je te raconte mes problèmes et toi tu te moque de moi!!!!!!! ».
Angela: « Mais … Carla… C’est sa cousine… », essayais-je de dire en plein fou rire. « Amor me l’a présenté tout à l’heure ».
Elle reste plantée là, les yeux et la bouche grand ouverts.
Angela: « Ferme ta bouche, tu vas gober une mouche », l’imitais-je.
Carla: « Merde, merde, merde!! J’ai déconné. Tu crois qu’il faut que je m’excuse d’être parti énervée pour rien?? ».
Pour seule réponse je la regarde blasée, en penchant la tête sur le côté. Elle a tout de suite compris, et se dirige vers Ayoub qu’elle prend à part.
Je me retrouve avec moi-même. Je prends mon verre avec moi et décide d’aller faire un tour sur le petit balcon. Un garçon s’y trouve déjà, dans un nuage de fumée. Rien de légal.
Angela: « Salut », lui dis-je en m’accoudant à la rambarde à côté de lui.
Lui: « Salut ».
Il me regarde de la tête aux pieds, avec un air assez malicieux. Ok, il a déjà réussi à me mettre mal à l’aise. C’est une routine?
Angela: « Je m’appelle Angela et toi? », tentais-je de briser la glace.
Lui: « Kamil » , me répond-t-il en me tendant son joint, « on fait 22? ».
Angela: « Non merci, ça ira », lui dis-je en lui montrant un paquet de cigarette que je sors de ma poche.
Je sais que c’est pas bien, mais que voulez-vous? Mes poumons ont besoin de cette merde.
Je me retourne de sorte à ce que mon dos se repose sur la rambarde. J’observe à travers la baie vitrée ce qu’il se passe à l’intérieur. Carla et Ayoub semblent s’être réconciliés, puisqu’ils parlent tous les trois avec Amina. Je les vois rire, et je suis soulagée que la situation se soit arrangée.
Je m’en suis empêché jusqu’à maintenant, mais je n’y arrive plus, mon regard se pose sur Samy. Il est toujours plongé dans sa conversation avec l’autre. Je ne sais même pas comment elle s’appelle.
Pauvre fille, si tu savais ce qui t’attends avec lui.
Son visage se rapproche de plus en plus du sien je comprends pas? Il est en train de faire quoi là? Il continue d’avancer son visage jusqu’à ce que leurs bouches ne fassent plus qu’une, et qu’il lui roule une pelle de l’autre monde.
MDR.
Mon coeur se brise en mille morceaux. Je pensais pas que c’était encore possible.
Je bois cul sec le reste de mon verre, ZIG ZOUG.
Je me retourne d’un coup, je suis côte à côte avec Kamil.
Angela: « J’ai changé d’avis », lui dis-je en arrachant le pilon qu’il a dans la bouche.
Je tire une taff dessus et tousse comme une vache. L’autre con est plié en deux de rire.
Angela: « Ça t… fait rire? », dis-je presque énervée en m’étouffant à moitié.
Kamil: « La vérité? Oui! », dit-il mort de rire.
Je le regarde droit dans les yeux, et me mets à rire avec lui. Wow ça monte à la tête ce truc!!
23h50
Et les amis, c’est trop drôle ce qu’il se passe. J’entends la musique de plus en plus fort et je danse avec les filles au milieu du salon. La pièce elle tourne, waaaaaaaah. J’aperçois Yanis qui s’assoit dans le canapé.
Angela: « Et copain, viens là copain », lui criais-je en me jetant sur lui.
Carla s’approche de moi et s’agenouille. Elle enlève les cheveux de mon visage.
Carla: « T’es bourrée Angela ».
Angela: « Rien qu’un peu », di-je en mimant de mes doigts, je louche en les regardant de trop près.
Yanis: « Bah alors, fais un bisou à ton copain Angela, c’est le moment », dit-il en faisant la moue.
J’entends à moitié ce qu’il dit, mes oreilles bourdonnes.
Carla: « Laisse ma copine tranquille toi, espèce de zozo déganté ».
Yanis: « Tu va faire quoi même? Ça te regarde pas, c’est entre ma chérie et moi », dit-il en la narguant.
Carla: « Ferme la avant que je t’enferme dans la cave avec les rats, trépané du cerveau ».
Ayoub: « J’en peux plus de vos salades», hurle-t-il.
Pendant que tous les trois se disputent, je glisse de sur Yanis, et me retrouve par terre.
Samy: « Mais vos gueules putain! », dit-il en captant l’attention de tout le monde, « vous voyez pas qu’elle est pas bien ».
Il se tourne vers Carla.
Samy: « Emmène la aux toilettes, et passe lui de l’eau sur le visage avant qu’elle fasse un bad ».
Elle acquiesce, me soulève en mettant mon bras autour de son coup et en me tenant par la taille.
Angela: « T’es belle ma Carla, t’es trop belle », lui dis-je en touchant son visage avec mon index.
Elle pousse la porte de la salle de bain, et elle n’a même pas le temps de la refermer que je tombe à genoux, et ouvre la cuvette des toilettes pour y vomir. Elle s’avance vers moi et me tiens les cheveux en arrière, encore propres par miracle.
Après avoir bien vomis, la classe, je me lève et elle mouille mon visage au lavabo. Je rince ma bouche.
Carla: « J’ai pas bu ce soir, je vais te ramener chez toi poulette ».
Angela: « Nan je veux encore rester, on s’amuse trop bien ici! », dis-je euphorique avant d’avoir une énième remontée.
Carla: « Regarde! T’es à deux doigts de vomir encore! On rentre un point c’est tout », me lance-t-elle en sortant des toilettes.
Et là, l’horreur. Je tombe nez à nez avec Samy, qui vient vérifier si je ne suis pas morte, noyée dans l’eau des chiottes.
Samy: « Alors vomito, on a prit une grosse cuite? », me dit-il amusé.
Il adore se moquer de moi ce sagouin. Je vais le remettre à sa place pour une fois! Je pense que Carla le sens venir puisqu’elle me tire vers elle pour me sortir de cette embuscade. Mais je ne bouge pas.
Angela: « Écoute moi bien Samuel… ».
Samy: « Moi c’est Samy », pouffe-t-il.
Angela: « Écoute moi bien Samy, j’en ai marre de ton attitude de bouffon égocentrique. Et j’en ai plein de bol qu… » dis-je avant d’être encore coupée.
Samy: « On dit ras le bol ».
Angela: « Ta gueule. J’en ai plein le bol que tu me prenne pour de la merde, comme si j’avais jamais existé et comme si tout ce qu’on a vécu ensemble était pâti en nuage, ou en fumée? Je sais plus, bref. J’ai toujours été là pour toi et tu m’as lâché comme une pauvre crotte. Un jour t’es doux, un jour tu me parles, et le lendemain tu fais comme si on se connaissait pas. Fais un ch….. », dis-je en tombant par terre.
Carla et Samy me relèvent. Lui, est toujours mort de rire, ce qui a le don de me foutre les nerfs! Carla, elle, semble inquiète. Elle ne sait plus quoi faire.
Samy: « T'inquiète pas pour elle, je vous laisse ma chambre. On va la coucher maintenant, et demain matin vous partirez quand ça ira mieux! », lance-t-il à Carla pour la rassurer.
Carla: « Merci tu gère ».
Sur ces dernières paroles à peine audibles, je sens mon corps atterrir sur un matelas moelleux, doux, confortable et….. Je m’endors.
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