Chapitre 13

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Si mon corps avait été fait de cristal, il aurait explosé d’un seul coup, en des milliers de fragments retentissants.

Ce vacarme imaginaire résonnait à l’intérieur de moi pourtant, je ne cillais pas. Mon esprit s’envola, trop choqué pour rester là où il était. Il regardait mon double corporel, énervé de ne pas le voir bouger alors que tout s’évanouissait en lui.

En réalité, mes yeux continuaient de s’accrocher aux lignes froissées avec l’espoir vain de découvrir une toute autre vérité. Mais les mots, tranchants, perforaient ma peau et s’insinuaient dans mes veines pour regagner mon coeur et déchiqueter ce qu’il me restait d’espoir.

Je n’avais jamais rien fait pour l’étouffer. Malgré mes beaux discours sur le détachement, malgré mes tentatives pour ne rien plus ressentir, il était resté présent, tapi au fin fond de moi dans l’attente de voir débouler dans ma vie, une autre personne à aimer.

Sous le choc des révélations de Rave, je tentai de me figurer la souffrance qu'elle avait endurée durant toutes ces années.

Le drame qu’elle avait vécu était atroce, je comprenais à présent sa fuite. Pourtant, égoïstement c’est pour moi que j’avais le plus mal.

J’étais devenu père du jour au lendemain, sans avoir jamais émis le souhait de l’être un jour. J’avais accepté de tenir ce rôle, tête baissée, sans un regret. Découvrir aujourd’hui que je m’étais fourvoyé me faisait l’effet d’une grande claque qu’on reçoit en pleine gueule. J’étais complètement sonné ! Sans vraiment comprendre le pourquoi des sentiments qui se bousculaient en moi, je me rendais compte que cette annonce me tuait encore plus que la propre mort de Rave.

Comme un automate, je quittai la maison avec pour seule envie de noyer ma peine dans l’infini.

Ma mère me retrouva, quelques minutes plus tard, assis au bord du ruisseau. Elle posa sa main sur mon épaule et s’assit près de moi.

— Je suis terriblement désolée…

Elle avait sans doute lu les feuilles que j’avais laissées au creux du canapé.

— Je t’aime Hector !

Les sourcils froncés, je me tournai vers elle.

— Je t’aime pour tous ces regards en coin que tu me lances, pour la tendresse de ton silence et la sensibilité que je devine sous tes mâchoires serrées. J’aime ta présence bienveillante cachée sous des semblants d’indifférence. J’aime l’enfant que je vois encore derrière le voile sombre de tes yeux et l’homme fort que tu t’obstines à vouloir façonner.

Pourquoi me disait-elle tout ça ?

— Je n’aurais jamais rêvé meilleur fils.

Ma tête tournait.

— Olympe a besoin de toutes ces choses qui font de toi ce que tu es. Peu importe que tu ne sois pas son véritable père. L’amour est plus important que le sang.

Chiale pas, putain !

— Tiens, me dit-elle.

Je regardai sans comprendre le papier qu’elle me tendait.

— C’est en lisant la lettre de Rave que j’ai eu un flash. Je me suis rappelé de cette affiche de film avec ce corbeau que ton père avait punaisée dans un coin de notre garde-robe. Sans jamais en comprendre la raison... Il avait parfois de drôles d'idées ! Regarde.

Elle tourna le poster au dos duquel se trouvait une adresse.

— Va Hector ! Va la chercher !


**

Je garai la bagnole de ma mère un peu avant l’adresse que m’indiqua le GPS. Je repérai ma Golf trois maisons plus loin. Le coeur battant, je fouillai la boite à gants. Je ne savais pas qui j’allais trouver face à moi mais mon instinct de survie prit le dessus et me souffla de chercher l’objet qui pourrait me servir d’arme si ce dingue venait à s’en prendre à moi ou pire s’il s’en prenait à Oly. J’enfouis dans ma manche le seul truc que je trouvai plus ou moins adapté : une aiguille à tricoter.

J’avançais vers la porte d’entrée en priant pour qu’Olympe ne soit pas à la merci de ce malade.

C’est elle qui m’ouvrit lorsque je sonnai. Je ne sais pas ce qui m’effraya le plus à cet instant précis : l’odeur d’essence qui se répandait à l’intérieur de la maison ou le sourire dément d’Oly.

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