4.After Show
Note de Vocabulaire :
Crise de tétanie ou d'angoisse / attaque de panique ou Spasmophilie :
C'est un syndrome (regroupement de plusieurs symptômes) qui se traduit en deux temps : l'hyperventilation (respiration qui s'accélère, brisant l'équilibre O2 / CO2 dans le sang) ce qui provoque la crise , l'hyperactivité neuromusculaire ou crispation musculaire involontaire impossible à détendre sur l'instant, commençant généralement par les mains qui se contractent (communément appelé "mains d'accoucheurs"), pieds et même parfois le visage. Peut durer une trentaine de secondes à 1 heure !
Merci de votre patience et bonne lecture !
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Élie
Tout s'était passé comme prévu. Une danse érotique sans faux pas qui nous avait valu, aux filles et moi, des acclamations. Une partenaire de show adorablement sympa qui avait pu me déposer à une rue du lycée. Mon frère qui venait de m'envoyer un message pour me signaler qu'il était avec Tim.
Pourquoi ça ne peut pas être un sans-faute sur toute la ligne ?! Parce qu'à l'heure actuelle, j'étais en train de jouer à cache-cache avec le surveillant de nuit et le concierge de mon étage. Perchée sur de fichues cuissardes à talons que je regrettais de ne pas avoir ôtées.
J'avais surpris un autre élève vêtu du blouson de l'équipe de football du bahut en train de regagner le dortoir des garçons, apparemment bien éméché. La fête a dû être mémorable ! Et mon problème, c'était que l'aile des dortoirs était tout particulièrement surveillée depuis. Des pas se firent entendre dans l'obscurité et je fis machine arrière. Ce n'est pas le moment de me faire chopper à rôder en pleine nuit.
J'avançai rapidement dans le couloir sombre le plus silencieusement possible avant de m'immobiliser et reculer de quelques pas devant une porte entrebâillée.
Le placard à balais. Ça fera l'affaire.
Je l’ouvris puis la refermai avec délicatesse avant de patienter, le souffle court. Mais au lieu de m'adosser contre le fond du placard comme je m'y attendais, je hoquetai en sentant mon dos heurter un torse solide. Un bras musclé s'enroula autour de ma taille et je me raidis. L'adrénaline qui envahissait mon corps était à son paroxysme et j'ouvris la bouche avant de la refermer.
Vous avez tous déjà fulminé à l'encontre de l'héroïne stupide d'une histoire ou d'un film qui, témoin d'un homicide, se mettait à brailler à tout va ou reculait et renversait un objet dans la panique, révélant ainsi sa position. Instinct de survie : inexistant. Eh bien, là, je pouvais totalement comprendre ce mauvais réflexe merdique et contraire à la logique.
Un doigt se posa sur ma bouche en signe de silence et un souffle chaud et mentholé caressa mon cuir chevelu tandis que des lèvres chatouillèrent le creux de mon oreille.
— Si tu te fais remarquer, nous sommes tous les deux bons pour l'exclusion, murmura une voix grave. Rends-nous service et tais-toi.
OK, on va éviter de hurler, du coup.
Je tournai lentement la tête dans sa direction, mais l'imperméabilité sans faille de l'obscurité du lieu ne me permettait pas de distinguer ses traits.
— C'est... je suis avec qui au juste ? demandai-je sur le même ton faible.
Après un rire presque imperceptible, le bras qui étreignait ma taille se desserra.
— Est-ce vraiment important ? Tu ne causes de tort à personne si je ne m'abuse.
Ses paroles bassement chuchotées m'empêchaient de reconnaître le timbre de sa voix. Mes jambes s'ankylosaient, et je bougeai légèrement, me sentant de plus en plus entravée. On est trop à l'étroit là-dedans !
Acculée dans cet espace clos et privé de lumière, je commençai à étouffer. Des mains s'arrimèrent fermement à mes hanches pour m'empêcher de remuer.
— Arrête de gigoter comme ça, ma belle, tu ne me rends pas la situation facile, là.
Son intonation était devenue plus rauque et je compris soudainement pourquoi. À la sensation de son érection contre le sommet de mes fesses, je ne pus retenir un halètement. Ma respiration s'intensifia avant de se saccader violemment et mes mains se mirent à trembler malgré moi.
« Cesse la lutte, ma belle, tu ne peux pas trouver d'échappatoire ce soir. »
Non, non, pas maintenant !
Un flot de souvenirs refit surface, souvenirs que je m'astreignis tant bien que mal à repousser. Respire, putain...
« L'usage du silence se veut tout aussi primordial que le verbe, Trésor. C'est l'objet de notre leçon du jour... »
Mon corps entier se crispa contre ma volonté tandis que mes ongles s'enfonçaient dans mes paumes, sans que je n'éprouvasse quoi que ce fut.
Faut que je sorte de là... faut que je quitte ce putain de placard !
Je me sentais oppressée. Mon cœur se serrait, se comprimait furieusement dans ma poitrine. Une douleur sourde déchirait mon estomac et enflammait mes poumons, qui me donnaient l'impression de refuser de faire leur travail. J'ai besoin d'air... L'oxygène se raréfiait, j'allais... Tu vas pas crever, tu vas pas crever... respire, bats-toi ! TU VAS PAS CREVER !
Un nouveau relent du passé me retourna les tripes tandis qu'un bourdonnement envahissait mes tympans.
« Tu es vive d'esprit, n'est-ce pas, Élizabeth ? Ne m'incite pas à clarifier les choses... »
Non ! Lutte, Élie ! Fais un effort ! Concentre-toi sur ici et maintenant !
J'agrippai désespérément le haut de mes cuisses et laissai mes doigts les martyriser à volonté, mais je ne ressentis aucune douleur. En dépit du vertige qui me prenait, une sensation de chaleur m'envahit sans que je ne parvienne à la définir. Je me focalisai sur mes mains. Mes muscles douloureusement contractés. Sur le goût métallique dans ma bouche, m'indiquant que je m'étais entaillée la lèvre inférieure à force de la mordre.
C'est ça, du réel, ne pense qu'au présent. Tu es dans un putain de placard, loin de lui.
La chaleur. Elle était réelle, palpable. Un contact. La pression autour de ma taille s'accentua, me faisant pivoter, et un murmure plus prononcé me ramena au présent. L'inconnu. Il m'appelait par mon prénom, d'une voix basse et grave. Je sentis plus clairement ses mains me frictionner les épaules.
— ... je sais que tu m'entends, Élizabeth. Tu vas calquer ta respiration sur la mienne, m'ordonna-t-il avec calme. Compris ?
Ses doigts glissèrent sur mon avant-bras pour saisir mon poignet, qu'il posa contre son torse. Ma paume se soulevait au rythme de ses inspirs et, progressivement, mon souffle finit par retrouver une certaine régularité. Le sifflement à mes oreilles s'estompait déjà et la souffrance de mes muscles sous tension s'atténuait avec lenteur. Je pris conscience des larmes qui striaient mon visage alors qu'il essuyait ma joue. Je m'autoflagellai en pensée d'avoir aussi facilement cédé à la panique. Je venais de faire une crise* dans un placard à balais devant je ne savais qui. Bravo, Élie, championne !
Une voix résonna dans les couloirs, me crispant de nouveau, et je tressaillis.
— Qui est là ?
Mes doigts se resserrèrent autour du tee-shirt de l'inconnu qui, en réaction, m'attira contre lui et pressa ses lèvres contre mon oreille.
— On se détend, ma jolie, le concierge ne voit pas à travers les murs.
Peut-être, mais ce vendu n'aurait aucun état d'âme à nous balancer.
Sa main s'enroula fermement autour de ma nuque, estompant peu à peu mes tremblements. Son contact... il me calmait. Quelqu'un, dont je ne voyais pas le visage, parvenait à m'apaiser par ses mains.
Le bruit de pas dans le couloir diminua jusqu'à disparaître. Dans mon accès de faiblesse musculaire, je me laissai aller contre son corps, notant au passage à quel point il était bien bâti. J'inspirai profondément les effluves de son parfum tandis que ses doigts effectuèrent des petits mouvements circulaires sur ma hanche et ma nuque. Il avait contribué à ma crise d'angoisse, certes... mais il m'en avait sortie par son toucher. Aucun sentiment de terreur, aucune révulsion. Un contact qu'en plus de supporter... je parviens à apprécier. Lentement, je relevai la tête vers l'endroit où se situait approximativement son regard.
— Je... je suis désolée.
Son souffle balaya mon visage.
— D'avoir froissé mes fringues ? J'en ai d'autres. Tu te sens mieux ?
Je hochai le menton avant qu'il ne s'en saisisse de deux doigts, le relevant vers le haut.
— Tu n'es pas muette, ma jolie, alors parle-moi.
— Je vais bien, fis-je en repoussant sa main avant de croiser les bras.
— Les crises d'angoisse... ça t'arrive souvent ?
Si ça m'arrivait souvent ? Plus depuis longtemps, non. La première depuis près d'un an. Declan m'avait chopée une fois en pleine crise, une fois et une seule. Juste après une séance punching-ball avec Warren, donc ça avait glissé. J'avais toujours pu cacher mes rechutes en première année, non sans l'aide de ma meilleure amie. Un miracle. Seule Ava était au courant... Mais je ne pouvais plus le dire.
— J'aimerais que... ce qui s'est passé dans ce placard reste dans ce placard, chuchotai-je.
Un faible rire me parvint en réponse. Et ce rire, j'en suis persuadée, je l'ai déjà entendu.
— C'est certainement le contexte le plus innocent dans lequel j'entends cette phrase.
Je rejoignis son accès d'hilarité, ravie que le rougissement de mes joues soit rendu invisible. Après un instant où seuls nos souffles s'avéraient être audibles, je repris, plus sérieuse.
— Merci... de m'avoir aidée. Et soutenue jusqu'à ce que ça passe.
Il se figea, comme s'il ne s'attendait pas à mes remerciements, avant de rompre le contact. Le parfum qu’il portait, aux notes de fond musquées et envoûtantes, persistait dans l’air. Un courant électrique parcourut mon corps en réponse.
— Ça va faire un moment qu'on est là... et je ne sais toujours pas à qui je parle.
Son ricanement se fit entendre et nos souffles se mêlèrent, me confirmant qu'il s'était penché, alignant son visage face au mien.
— À toi de le deviner.
Mon rythme cardiaque varia brutalement, mais c'était loin d'être déplaisant. Il m'avait tenue dans ses bras, j'en avais éprouvé du bien-être... Je me demande si...
Sans prendre le temps de peser le pour ou le contre, j'esquissai un mouvement vers l'avant. Une étincelle de plaisir se répandit dans tout mon corps à l'instant où je frôlai sa bouche. Putain...
Un faible grognement me parvint et ses paumes encadrèrent à nouveau ma taille avant qu'il ne m'attire à lui. Ses lèvres sont si douces...
J'avais déjà été embrassée avant, mais il n'y avait aucune comparaison possible. Sa langue effleura mes commissures avec lenteur, allant de l’une à l'autre et, sans y réfléchir, je les entrouvris. Je l'entendis soupirer d'aise, tandis qu'il m'enlaçait encore plus ardemment contre lui, accolant sa bouche contre la mienne avec une chaleur et une douceur qui me firent libérer une faible complainte. Il empoigna ma nuque pour approfondir le baiser dont il avait pris le contrôle total et je me laissai entièrement envahir par le bien-être qu'il me procurait.
Ce que je voudrais voir ses yeux maintenant !
Ce type me faisait éprouver tellement de sensations. J'avais perdu tous mes repères, la seule chose qui me permettait de m'accrocher encore un peu à la réalité, c'était le toucher brûlant des mains de cet inconnu sur ma peau. Il échangea nos places, m'épinglant au mur qui faisait face à la porte avant que je ne sente son nez frôler le mien. Sa main s'enroula autour de ma gorge, l'autre enserrant ma hanche. Il effleura doucement mes lèvres et murmura contre mes inspirs saccadés.
— Bordel, t'es surprenante !
— Qui es-tu ? soufflai-je, fébrile.
— Quelqu'un que tu connais, jolie fille...
Sa voix rauque était tombée d'une octave plus bas, témoignant de son envie d'accoupler une nouvelle fois nos bouches. Ce fut ce qu'il fit sur ses derniers mots, son souffle ne faisant qu'un avec le mien et un gémissement m'échappa. C'est si enivrant !
Je le sentis sourire contre ma bouche qu’il libéra ensuite, me laissant pantelante tandis qu'il s'engouffrait tranquillement derrière la porte de sortie. La faible lueur révéla sa silhouette, mais il faisait trop sombre pour que je remarque le moindre signe distinctif avant qu'il ne disparaisse. Il était grand.
Bravo, Sherlock, tu parles d'un indice !
Je me laissai lentement glisser au sol, le cœur battant, et repliai mes genoux contre ma poitrine. Je m'étais retrouvée pressée contre un mec... Et après son baiser, pour la première fois... j'avais aimé ça...
Et aucune putain d'idée de qui il s'agissait !
Au bout d'un temps infini, accompagnée par le silence dorénavant total et paisible de la nuit, je me relevai pour regagner le dortoir, encore frémissante.
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Bonjour à tous !!!
Suite à un déclencheur traumatique, Élie fait une crise, mais contre toute attente, c'est un inconnu qui y met fin et la rassure.
Le prochain chapitre sera narré du POV d'Ava qui, de son côté, prend des cours supplémentaires...à bientôt !
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