Chapitre 45 – Interlude – Je veux qu’on arrête
Le ciel, envahi par des vagues de feu chatoyantes, inondait de lumière le monde mournien. La lumière atteignit un visage, qui, sous le spectacle pyrotechnique, éblouit ses yeux couleur chocolat. Quand ils furent habitués à la combustion fantasmagorique, ils s'ouvrirent : on aurait dit que, derrière la couleur sobre de la noisette timide, un vert de jeune feuille de printemps éclairait quelques lignes ocres et azur, sur un lait de nuages. Les yeux pétillaient bien sous ce festival des étoiles, enluminés par le plaisir de voir, simplement, les couleurs libres de ce monde.
Yannis, le sourire au lèvres, gravit la butte qui surplombait les stands installés pour le dernier jour du Festival du Grand Serpent. Il s'arrêta quelques instants pour contempler la voûte céleste, qu'on voyait très clairement malgré les feux d'artifice. Il compta quatorze mille neuf cent quatre-vingt sept étoiles dans son champ de vision, et sûrement d'autres objets pouvaient être vus avec un peu de concentration. Il soupira de bonheur, heureux de sentir complet, adulte, et finit par atteindre le sommet.
Là l'attendait Kara, assit sur une natte. Elle avait troqué sa coiffure lisse pour un chignon qui découvrait son splendide visage. Yannis ne comprenait pas pourquoi il parlait d'elle par « elle ». Peut-être était-ce plus simple comme ça.
Il s'assit à côté d'elle, elle sourit, et il déposa un baiser sur sa bouche.
— Pour quoi était-ce ? Demanda-t-elle, sans pour autant montrer un signe de refus.
— Célébrer ta beauté, ton existence qui illumine mon monde comme ces feux illuminent le leur, répondit Yannis en présentant les feux d'artifice.
— Tu te prends pour un poète ? Kara sourit.
— J'imagine… Chez moi sur ma… Sur Terre… Il y a un homme qui porte le même prénom que moi, et c'est un poète de renom.
— Vraiment ? J'aime bien la poésie, en fait.
— Ah oui ?
— Oui, grand nigaud ! Kara resta silencieuse quelques instants, contemplant non pas les feux d'artifices, mais les gens qui les admirait. Mais elle sembla remarquer que Yannis était pendu à ses lèvres en attendant une explication, ce qui lui fit répondre :
— J'ai toujours apprécié la poésie, non pas pour sa beauté ou son intelligence, mais par les émotions qu'elle prodigue sans contact physique ou psychique… Ce qui, chez moi, n'est pas très facile à appréhender… Ni à… Accepter.
— Ils n'aiment pas la poésie, par chez toi ?
— « Par chez moi »… Humpf… Tu parles comme si c'était un pays de
barbares arriérés…
— Je… Quoi ? Non ! Je… Je ne voulais pas te…
— Vexer ? Ne t'inquiète pas pour ça, je n'en ai plus rien à faire. Ma famille n'a pas vraiment ce qu'on appelle l'« esprit ouvert ».
— Je suis vraiment désolé pour toi et ta famille. Sincèrement.
— Non ! Ne te mets pas un poids inutile sur le cœur. Garde de la force pour des choses plus importantes que cela…
— Comme quoi ? Yannis se rapprocha d'elle, passa son bras droit autour de son épaule, et pris de sa main gauche la main droite de son âme sœur. Il plongea son regard dans le sien, mais, au lieu d'y lire de l'amour et de la joie, il y lu de la souffrance et du regret.
Et elle le repoussa. Doucement, certes, mais même la douceur ne put taire la vague de rejet qui noya son cœur. Elle avait le visage fermé, mais ses lèvres pincées indiquaient bien qu'elle n'était pas d'accord avec quelque chose.
— C'est de ma faute, n'est-ce pas ? Yannis baissa sa tête, ramena ses genoux vers lui pour les enfermer avec ses bras. Je ne suis pas assez bon pour toi ? Je suis trop impatient, pas assez respectueux ? Trop nul au l…
— NON !!! Tais-toi ! Arrête ce numéro de martyre que tu apprécies tant ! Ne rends pas les choses plus difficiles parce que tu penses que tu n'en vaux pas la peine ! Non seulement, cria Kara devant un Yannis médusé par cette violente réaction, alors que tu es quelqu'un de formidable, tu te complais dans l'auto-flagellation, mais en plus tu me fais culpabiliser ?! Je ne veux pas que tu te dises que c'est de ta faute ! Ce serait plutôt de ma faute !
— Mais… Mais pourquoi ce serait de ta faute ?
— Parce que mes parents refusent que je reste avec toi !!!
Yannis se pétrifia sur place ; il n'avait pas imaginé que les mariages arrangés étaient aussi une tradition autant mournienne que terrestre. Pourtant, il était convaincu que cette civilisation était plus avancée que cela… Mais, de toute évidence, tout le monde n'avait pas sur Mourn un tel engouement pour la liberté. Cependant, ça n'était point la colère qui était de train de le brûler ; Non, c'était plutôt une sensation de vide qui l'emplissait peu à peu.
— Comment va-t-on faire, dans ce cas ?
— On ne va rien faire du tout, Yannis…
— Quoi ?! Mais nous… Tu… Ne puis-je pas demander à rencontrer tes parents pour en discuter ?
— Yannis, ils ont été catégoriques : je cesse ces histoires de jeune mourmone, et je deviens une mournienne en me mariant à une autre famille puissante. C'est simple à comprendre, pourtant !
Mais elle semblait terrifiée, n'osant même pas regarder en face son petit ami.
— C'est tout sauf simple, même toi tu n'es pas d'accord avec ça ! Et ne me contredis pas, je te comprends mieux que quiconque sur cette planète !
— Alors dans ce cas, tu dois comprendre la suite des événements…
— Non…
— Je suis vraiment désolé, Yannis, mais on doit le faire…
— S'il te plaît, Kara… Insulte-moi, frappe-moi… Tue moi si tu veux, mais ne me dis pas ça…
— Tu sais bien que je serais incapable de te faire le moindre mal…
— Ce que tu t'apprêtes à faire est bien pire que ça ! Ne t'avise pas de…
— D’ACCORD !
Elle avait hurlé. De toute sa haute stature, elle avait lancé un cri de stentor qui avait résonné jusqu’au bout du Festival.
— D’accord, Yannis. Je ne voulais pas qu’on en arrive là, mais d’accord. Je souhaitais juste te donner un mensonge potable, pour que tu puisses le boire sans t’empoisonner. Mais d’accord, je vais te la dire, la vérité empoisonnée : je veux qu'on arrête.
* * *
Edward était installé à un stand de barbe-à-serpent, délicieuse friandise faite à base d'extrait de mouche Moaï et bien sûr de… Serfili. Le goût acidulé et légèrement sucré sur les bords étaient un plaisir pour les papilles, mais ne pouvait pas égaler le sang humain, le seul qu'il ait jamais vraiment apprécié. Malgré tout, les friandises étaient toujours aussi succulentes ici, et il ne s'en lassait pas, puisque chaque nourriture qu'il ingérait était convertie en rayonnement froid.
— Ça te dérange si je me joins à toi ?
Edward se tourna vers la source du bruit. Archibald Parmini s'installa sur le tabouret à côté du sien, et commanda un plat de Gjrn'e't Patù. Tandis que le cuisinier s'affairait à la tâche, Edward se renfrogna ; il n'aimait pas trop la compagnie des mages, et surtout celle d'Archibald. L'équipe Red-Sight avait été dissoute après la tragédie d'Heinrich et la disparition de Synnaï, et cela avait mis Edward hors de lui. Auparavant, au sein de l'équipe de l'équipe Red-Sight, il adorait la senteur du danger, les rush d'adrénaline qui parcouraient ses veines tandis que lui et ses amis allaient au devant des missions de l'Académie. Edward s'y sentait à sa place. Mais, désormais, le monde avait rebattu les cartes et il s'était retrouvé avec un jeu pourri.
Archibald était sans aucun doute un constant rappel de cette erreur.
Mais, désormais, Edward n'aspirait qu'à la paix et à l'accomplissement de sa vie personnelle terrienne. Le monde mournien pouvait bien être réduit en cendres, il serait toujours aussi passif. Seulement, voilà : la roue du destin entraîne tout sur son passage, quelques soient nos attaches. Aujourd'hui, il avait choisi de placer Archibald à côté de lui, Et bien, se dit-il, Grand bien lui
fasse ! Après que le plat de son ancien ami fut servi, Edward se tourna vers lui et parla d'un ton dur :
— Alors, que me veux-tu ?
— Holà ! Archibald prit un air gêné. Tu es toujours le même, n'est-ce pas ? Oui… Toujours ce Kor'Al'Tain prompt à la violence…
À l'entente de son nom de skaldnjol, Edward feula ; il détestait qu'on l'appelle comme ça, désormais. Trop de souvenirs.
— Pas de familiarités, mage, ou je t'arrache les dents.
— Hmpf ! Autrefois je n'aurais même pas osé ! Maintenant, les choses ont changé.
— Qu'est ce que tu cherches à insinuer ?
— Tu t'es ramolli, et… Oh non, ne me regarde pas avec cet air meurtrier, ça ne prend plus avec moi. Ton petit numéro de domination s'est fané depuis ces derniers cinquante ans, j'en ai bien peur.
— Alors il ne te reste plus qu'à me dire ce que tu me veux, si tu ne veux pas que je mettes à exécution toutes les menaces qui bouillonnent dans ma tête…
Archibald haussa les épaules, et entama son souper. Edward savait que c'était pour le faire enrager, mais il avait appris à se contrôler, depuis le temps. Il parvint à contenir sa rage, faisant taire le tremblement de ses mains. Cela faisait si longtemps, pourtant…
— J'ai besoin que tu participes à plein temps au Tournoi des Rois Mages.
Edward s'étrangla dans sa barbe-à-serpent.
— Tu as bien entendu, continua le mage. Je sais que Jinn est un excellent stratège, Yannis le bélier, et Kara, Solis et Pythie sont respectivement la charpente, le ciment et la toiture de ce groupe. Je veux que tu en deviennes les fenêtres.
— Si tu cherches quelqu'un de transparent pour boucher les trous, prends Hadrian. Il remplit ce rôle bien mieux que moi.
— Poilant. Mais je veux que tu sois celui qui apporte la lumière sur ce groupe.
— Ah ah ! Edward lâcha un sourire sarcastique. Tu cherches la lumière et tu ramènes une créature des ténèbres. T'es une nouvelle sorte de daltonien ?
— Non. Je suis plus un grand sage qui offre mes conseils à qui veut m'entendre ! Edward lui lança un regard éloquent. Hmpf ! Pour la partie sage, j'imagine que tu as des doutes. Mais passons ! Si tu acceptes, je te donnerais une cape de protection contre les soleils, tu sais, celles qu'on fabrique dans les déserts de Kadash ! Si tu veux, je peux te prendre rendezvous chez le tailleur pour...
Edward sirota son jus de fruits rouges tout en écoutant Archibald, et ressentit un pincement au cœur avant de dire :
— Je n'en n'aurais pas besoin.
— Et on pourra même mettre les motifs de… De… Quoi ?
— Tu as a bien entendu, ironisa Edward, en reprenant sur le même ton les mots du mage.
— Mais… Tu es au courant que la lumière jaune d'un soleil te…
— Plus maintenant.
— … Depuis combien de temps ?
— Laisse-moi calculer… Ah oui ! Cinquante ans, exactement.
Il crut un instant qu'Archibald allait lui en demander la raison, mais il n'en fit rien, curieusement. Il se contenta de fixer son assiette d'un air fermé.
— Donc tu acceptes ?
— Oui, mais sois sûr d'une chose : je n'utiliserais pas mes capacités de skaldnjol en compétition. Je ne ferais l'usage que de mon expérience et de mon intelligence pour être cette fameuse « fenêtre » dont tu as besoin.
— Tu me le jures ?
— J'en fais le serment sur le nom des Al'Tain.
Et ils se contentèrent de fixer les flammes du ciel.
* * *
Yannis regardait les feux d'artifices depuis déjà plusieurs minutes, mais il avait l'impression que cela faisait des heures qu'il le faisait. Les couleurs avaient noirci, pâli, étaient plus grises. Sa vue se brouilla ; il tenta de chasser les larmes qui naissaient dans ses yeux en serrant la main de Kara. Il ne prit qu'une poignée de vide. Ce même vide qui enflait déjà en son cœur. Il serra son poing et frappa le sol, de rage...
Le monde ne prête pas attention aux malheurs des hommes, et reste silencieux...
Yannis baissa la tête : il avait tant donné, tant à offrir encore. Pourtant, le destin s'acharnait encore sur lui. Pourquoi je dois toujours subir la douleur au pire moment ? Ses jointures blanchirent, et il frappa plus fort le sol. Il semit à genoux, face contre-terre, et martela.
— Pourquoi…
La colère qu'il ressentait se transforma en rage. Frapper lui faisait un bien fou. Il éclata de rire et commença à creuser violemment, espérant former un trou assez grand pour s'enterrer. Comment avait-il pu être aussi bête ? Comment n'avait-il pas pu prévoir que Kara allait le quitter ? Juste après que leurs corps, leurs âmes comme dans toutes les belles histoires, s’étaient unies ? Il n'avait pas… il n'était pas assez fort pour cela, pas encore. Les blessures du cœur faisaient beaucoup plus de mal que celles du corps. Une griffe ardente lui déchirait l'intérieur, le rongeait si brutalement qu'il vomit.
— Pourquoi… Pourquoi…
La rage devint souffrance. Il frappait encore. Il se mit à saigner.
— Pourquoi, pourquoi, pourquoi…
Il n'y avait pas de réponse. Il n'y avait pas d'excuse ou d'explications. Il n'y avait même pas de solution, parce qu'à la base, il n'y avait pas eu de question. La cruauté de cette situation lui arracha un torrent de larmes et de morve. Il était brisé et pathétique, nu de toute force, de tout courage. Il s'était pourtant bien dit que la chute serait aussi lourde que son ressenti était fort. Malheureusement, la vitesse de montée avait difformé son champ de vision. À quoi ça servait de devenir un adulte ? Il n'avait vu que le ciel, et oublié la terre.
— … pourquoi… POURQUOI !!?
Pourquoi, oui ? Pourquoi d’un coup d’un seul, comme ça, sans prévenir ? Sans aucune explication ?
Il donna un coup si fort qu'il eut l'impression d'entendre le cri de la terre.
Mais c'était juste le son de ses phalanges qui s'étaient broyées sous le choc. Avec sa main en piteuse état, il eu le réflexe d'activer le Déphasage. Il tendit son esprit vers la magie, et… rien. Il n'arrivait plus à faire de la magie.
Il renifla, s'essuya le nez avec sa manche et regarda les passants s'amuser : des pères avec leurs filles, des mères avec leurs fils, des couples en tout genre, des amis réunis, des familles unies… Chacun d'entre eux lui assénait un coup de poignard de plus. Il s'apprêtait à partir d'ici quand il entendit une voix parler :
— Vous allez bien ?
Yannis tourna la tête, et vit une jeune fille en robe de mage ; une étudiante, peut-être ? Elle devait avoir son âge (terrien) environ. Ses cheveux étaient argentés, chose étonnante, vu qu'elle était plutôt jeune. Vu sa peau d'albâtre, il s'attendait donc à une forme mournienne d'albinisme, mais dès qu'il croisa son regard, il tomba sur deux gemmes d'améthyste pur, un regard au parfum de violette. Les yeux de la jeune fille brillaient d'une lueur surnaturelle, à moins que ce ne soit juste le reflet des feux d'artifices dans ses yeux. Cette personne lui semblait familière… Yannis se ressaisit, et dit d'une voix qu'il voulu ferme :
— Oui, merci, ne vous inquiétez pas pour moi…
Mais sa voix avait déraillé à la fin, et il sentit une larme dévaler sur sa joue. Il tourna son visage pour la cacher à la vue de la jeune fille, qui allait sûrement s'en aller pour ne pas être embêtée par lui, mais, à la place, elle s'assit à ses côtés. Cela le surprit, il sursauta. Il la vit lâcher un sourire triste, mais elle ne le regardait pas. À la place, elle observait d'un œil attentif un jeune couple qui s'embrassait.
— Hmm…On croirait qu'ils pourraient s'aimer jusqu'à la fin des temps… Elle lâcha un soupir d'envie, et se tourna vers Yannis : Vous aussi, vous êtes amoureux ?
— Oui, répondit-il douloureusement. L'amour fou. Les câlins, les rendezvous… La totale, vous voyez…
— Hmm… Vous semblez être très sûr de vous. Pensez vous que cela va durer ?
Yannis se tourna une nouvelle fois vers la fille, étonné par cette question.
Mais elle regardait toujours les couples défilants.
— Heu… Oui, sans aucun doute !
— Hmm… Y croire, c'est déjà ça… Mais faire les efforts pour y arriver, c'est une toute autre histoire.
Yannis sentit son cœur se serrer. Ce que disait l'inconnue coïncidait avec sa situation : s'il avait été plus attentif, plus prévenant, il aurait peut être eu une chance de tout éviter, de régler le problème. Mais c'était tout lui, après tout : il savait que le problème était là, il savait quand il allait lui faire mal, il savait comment le régler, mais il l'ignorait toujours, faisant comme si de rien n'était.
— Vous pensez, heu… Comment vous appelez vous, au fait ?
— Laura. Enchantée. Et vous ?
— Yannis. Vous portez un joli nom.
— Merci. Et votre question ?
— Ah oui ! Heu… Pensez-vous que… heu… Que les choses sont plus faciles à vivre si on les laisse tomber plus tôt ?
— Vous voulez dire : Est-ce que on souffre moins si on laisse tomber les gens plus tôt ?
— Ah heu… Vous avez compris le fond de ma pensée…
Laura ferma les yeux, semblant réfléchir quelques instants. Puis elle répondit :
— Je ne pense pas que le douleur vienne de la perte en soi, mais plutôt du fait de s'y accrocher.
— Comment ça ?
— Eh bien, c'est comme une flèche : une fois plantée, ça fait mal, et quand on la retire, ça fait mal. Entre ces deux moments, vous vous sentez quand même mieux parce que vous vous êtes habitué à la douleur.
— Et donc ? Répliqua sèchement Yannis. Où est-ce que vous voulez en venir avec cette douleur d'accrochage ?
— J'y viens ; une fois que vous avez retiré la flèche, que se passe-t-il à votre avis ?
— La plaie… cicatrise ?
— Hmm… Oui, elle peut… Mais ça dépend de votre état d'esprit, de votre détermination. Et même après qu'elle soit guérie, elle peut encore vous faire du mal, parce que vous n'avez toujours pas accepté le fait que c'est terminé : la blessure est toujours là, mais plus physiquement.
— Je… vois.
— Et c'est bien plus dur quand on reçoit une blessure sentimentale.
Yannis serra ses poings ; il avait déjà compris, mais il demanda :
— En quoi ?
— Celles-ci ne guérissent jamais, répondit avec sagesse Laura en agitant son doigt, comme si elle donnait un cours. Elles restent et purulent si on les laisse s'emparer de nous. Elles ne peuvent pas nous empêcher d'aller de l'avant, sauf si nous les laissons faire.
— Et qu'est-ce que vous me conseillez de faire, dans ce cas ?
— Prenez un instant pour regarder le ciel, respirez un bon coup et écoutez les battements de votre cœur.
Il suivit ses conseils. Il leva les yeux vers les étoiles, désormais découvertes après le feu d'artifice. Il respira un bon coup, et sentit le poids sur ses épaules comme dans son coeur s'enlever, un peu. Il sourit faiblement, et se tourna vers Laura pour la remercier, mais elle n'était plus là.
Il était seul, mais sa solitude était plus supportable.
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