Chapitre 46 – Lui et sa putain de magie

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Univers 7655, Objet de Hoag, Système SN45-41, Mourn, La Capitale de l'Empire, L'Académie…

C'était une belle journée… d'été ? Ugo ne s'en rendait plus compte depuis qu'il avait quitté l'orbite terrestre. Les deux soleils orbitant autour d'un même barycentre, les saisons devaient être différentes sur Mourn ; Ugo avait beau être là depuis deux mois, il ne se sentait pas à l'aise avec la météo. Et un de ses potes avait le visage aussi sérieux qu'un avant-goût d'orage.

Yannis se tenait la tête entre les mains, plongé dans un livre en mournien, avec une sphère traductrice flottant à deux centimètres de son oreille. La sphère transcrivait ce qu'il lisait alors qu'il se concentrait sur un croquis ou un schéma. Théorie des vecteurs simples puissances de Wallitz ou Essais sur la matrice séquentielle de Baumkuchen. Que des livres de magie sur les sorts rapides, peu coûteux et ingénieux si on sait s'en servir. Yannis aspirait les informations comme un siphon de lavabo, tellement absorbé dans son travail qu'il ne remarquait même pas son plus formidable ami s'ennuyer. Quel désastre !

Depuis le feu d'artifice d'ouverture du festival, Yannis semblait être devenu quelqu'un d'autre : il ne buvait plus de coups avec Ugo et les autres, ne jouaient plus aux cartes avec eux, ne blaguait plus. Le fait qu'il ne souriait même pas aux jeux de mots pourris était un délit grave à la Constitution des Droits de l'Humour (si celle-ci existait !), et il ne parlait pas ; d'ordinaire, Yannis parlait tout le temps de lui, de sa journée, de son week-end. Mais s'il a mystérieusement décidé de fermer son clapet, pensa Ugo, c'est pas plus mal… Malgré tout, ce dernier s'ennuyait de pied ferme. Il décida de quitter la bibliothèque, la passivité de Yannis lui donnait une bonne raison de le faire.

Dans les couloirs de l'Académie, tout le monde était en pleine effervescence ; le Festival était toujours en cours, et des artistes couraient les rues comme des mulots dans les champs de Provence. Mais là n'était pas l'origine de cet engouement : Le Tournoi des Magnus se déroulait demain, et la première épreuve était totalement inconnue de tous, ce qui excitait grandement la populace.

Ugo n'eut aucun frisson d'appréhension. Après tout, il savait comment se déroulait le Tournoi grâce au livre que lui et ses potes avaient trouvé dans la bibliothèque secrète, il y a un mois. Le Tournoi en lui-même était assez « récent », puisqu'il datait de la première excursion des mages sur Terre par sept explorateurs de génie : Aruwm, Chesed, Reuwth, Epheuretes, Yakol, Emuwnah et Maskyith ; chacun d'eux représentant une valeur clé dans l'enseignement magique (respectivement la prudence, la compassion, la volonté, l'ingéniosité, le devoir, la ferveur et enfin l'imagination). Il y avait donc logiquement sept épreuves basées sur celles-ci, dans un ordre défini par un nombre irrationnel. Facile à calculer, Ugo avait réussi, grâce à ce nombre, à prédire quel serait l'ordre des épreuves.

La première épreuve à passer serait celle de la prudence. Ugo avait déjà formé dans sa tête un plan pour chaque membre de la Ferroul Squad : Edward était le plus qualifié pour cette tâche. Il ne faisait jamais rien sans se préparer au préalable. Pour lui, c'était plus une question de vie ou de mort.

Le plus dur serait le combat, qui suivait inévitablement chaque épreuve, et seul l'équipe magique de la F.S était autorisée à y participer : Jhin, Solis, Pythie et Kara avaient sûrement les tripes pour se battre, mais Yannis n'avait pas l'âge avancé d'un mage ou l'entraînement d'un soldat ; son seul vrai combat avait été contre le Kaarnag, et il s'était fait rétamer, pas de quoi s'enthousiasmer. Il était même sûr qu'Hadrian ou Ludwig pourraient surpasser Yannis ; en terme d'ingéniosité, l'espèce humaine a toujours eu de brillantes idées pour vaincre plus fort que soit.

Allons bon, pensa Ugo. Voilà que je me mets encore à expulser Yannis de l'espèce humaine. Mais est-ce vraiment si débile que ça en a l’air?

Ugo retrouva le même jardin que la dernière fois, ou alors les mages l'avait seulement reproduit sur tous les jardins intra-muros de l'Académie. Cette fois, un détail différait ; une personne était assise sur le banc, devant la fontaine. Bartavius… Voyant que ce dernier ne l'avait pas encore remarqué, Ugo s'approcha du directeur, notant que celui-ci ne portait pas sa canne. À la place, il tenait un téléphone dans sa main, et semblait parler avec quelqu'un en haut-parleur, dont la voix était comme brouillée. Tout ce qu'il entendit fut :

— … Et nous sommes bien d'accord sur le fait que personne ici ne doit connaître son existence ? Il serait regrettable que… Et cela entraînerait des… Enfin, vous comprenez ?

— Bien entendu, monsieur. C'est donc un homme, et assurément un Terrien, s'il utilise un téléphone et non la magie pour communiquer. Seulement, qui ? Mais avant que nous terminions cet appel, j'ai une question à vous poser. Permettez ?

— Faites donc, mais vite. Je suis pressé !

— Mille mercis. C'est à propos du garçon : il est arrivé ici il y a peu, et le sortilège n'a toujours pas terminé son chemin, et sa présence risque de compromettre vos plans.

— Il n'est plus une menace… Je me suis personnellement occupé de lui.

— Merveilleux. Je vous contacte donc dès que le plan a fonctionné, alors ?

— C'est tout à fait naturel… Au revoir, Bartavius.

— Au revoir, monsieur, répondit ce dernier avant de raccrocher.

Bartavius soupira et se frotta les tempes. Il avait visiblement l'air très embêté, mais Ugo décida de ne pas débarquer dans le jardin tranquillement ; il devait faire croire qu'il venait juste de passer en hâte, sans entendre la conversation. Silencieusement, il recula de quelques pas, avant d'accélérer, en faisant bien attention à ce que Bartavius le remarque. Son stratagème eut l'effet escompté :

— Ugo ! Vous tombez bien, je voulais vous parler !

Ugo s'approcha avec une fausse mine interrogative ; si Bartavius devinait qu'il avait espionné sa conversation avec le mystérieux terrien, il savait très bien ce que ce mage lui ferait…

Il ne s'assit pas sur le même banc, mais sur celui d'en-face.

— De quoi vouliez-vous me parler, M. le directeur ?

— De votre avenir, bien entendu !

Bartavius sourit à pleines dents. Ça, ça n'annonce rien de bon, pensa Ugo

— Ah ! Mais je ne suis qu'un humain… Je ne vois pas pourquoi mon avenir serait aussi important qu'un de vos élèves mages.

— Mais il l'est tout autant ! Voire plus…

— Je pense me répéter, mais je ne suis pas plus intelligent, ni plus talentueux que vos élèves.

— Ce ne sont pas toujours les talents personnels qui sont importants…

— Que voulez-vous dire ?

— Je pense que, certaines personnes, comme vous, ont… Disons… Des aides

« extérieures ».

Ugo se figea. Il était évident que Bartavius ne parlait pas de sa division secrète sur Terre, car il ne pouvait les joindre depuis Mourn. Il ne parlait pas non plus de ses amis de la Ferroul Squad, et encore moins du reste de la TSB.

Il parlait forcément de la gourde.

Ugo décida de jouer la carte de « la vérité qui cache la vérité » :

— Décidément, M. le directeur, vous m'épatez ! Vous arrivez à voir des choses bien cachées ! Et moi qui croyait que j'arriverais à vous le dissimuler… Ah… Je me sens si bête ! Comment avez-vous fait pour découvrir que j'avais créé un cube supra-thermique à base du Kaarnag que nous avions eu, dans le volcan de Barakav !

Pendant quelques secondes, le regard de Bartavius se fit perçant, son visage aussi dur que l'acier. Mais Ugo savait résister à ce genre de pression (il avait connu pire). Enfin, le directeur de l'Académie reprit son sourire envoûtant, et rit.

— C'est vous qui m'impressionnez, jeune homme ! Utiliser des morceaux de Kaarnag dans un dispositif non magique, et quand même en retenir des effets ! Quelle partie avez-vous utilisé ?

— La glande qui se trouvait à la base de son crâne. Elle luisait doucement, et elle produit toujours de l'énergie malgré la mort de son hôte.

— Brillant ! Si tous mes étudiants étaient comme vous, on avancerait dix, non, cent fois plus vite ! Parfois, vous me faites penser à un de mes anciens élèves…

— Comment s'appelait-il ? répondit Ugo, désireux de détourner le sujet de la conversation. Si vous me le permettez, ajouta-il dans la hâte.

— Il s'appelait Laurent Hencherick… Brillant, plein d'amis… Mais il semblait toujours si loin des autres…

Ugo acquiesça, heureux que sa ruse ait fonctionné. Enfin, se dit-il, peut-être se doute-il qu'il y a toujours anguille sous roche, mais le rocher est maintenant trop gros pour qu'il le soulève. Il décida qu'il était temps de partir, parce qu'il n'avait vraiment rien à faire ici. Il remercia Bartavius, qui ne l'écoutait même plus, trop plongé dans les pensées de son passé.

Quand Ugo fut assez loin, il s'appuya contre le mur quelques instants pour calmer sa respiration et les battements de son cœur. Il avait eu raison de ne pas s'attarder aux côtés de ce monstre. Oui, se dit-il, c'est un putain de monstre, avec des dents baveuses, des yeux partout et un corps difforme, comme les monstres que j'avais combattu… Pour ce truc. Il regarda sa gourde.

Mais ce monstre là est différent : il est plus fort, plus retors… Et tout le monde lui fait confiance, parce qu'en apparence, il est comme nous.

Ugo respira à fond, et se fit une promesse à haute voix :

— Si je sais déjà potentiellement tout, grâce à tout ce qu'il y a dans cette flasque, j'y trouverais le moyen de les détruire, lui et sa magie de merde.

* * *

Yannis ne comprenait rien, mais rien du tout. Les livres, qu'il épluchait déjà depuis des heures, ne lui donnaient que du contenu lourd et insipide. Il savait très bien que ce n'était pas la barrière de la langue le problème ; parfois, il avait l'impression de comprendre des phrases entières instinctivement, sans l'aide du traducteur. Le problème venait de lui : il n'arrivait plus à se concentrer de manière efficace.

S'il ne retenait que les phrases et les formules par cœur, il ne saurait pas quand les utiliser, voire comment dans certains cas.

— Argh !

Yannis était tellement en colère qu'il avait lâché sans faire exprès un cri de rage. Il remarqua que tout le monde dans la bibliothèque le regardait. Il s'excusa en murmurant, alla rendre les livres au dépôt et partit en trombe.

Cette colère-là, c’était depuis qu’il avait eu sa première fois avec Kara, avant qu’elle ne rompe brutalement leur relation. Il avait tenté de lui reparler, mais elle l’évitait, et lui répondait de façon neutre quand la Ferroul Squad se réunissait en prévision du festival. Il avait pensé, non, espéré de cette relation, que ça le rendrait plus adulte et même plus mournien. Au final, il se sentait pire qu’avant, plus humain et moins magique. Comme si ça n’avait pas été rite de passage comme la Division, mais juste un accident, une circonstance. Un truc simple. Ça l’insupportait de ne pas se sentir important à travers ça. Et de surcroît, l’angoisse pré-coïtale était revenue au galop, comme s’il n’avait pas assez de choses à gérer.

Il sortit, dans le parc réservé aux étudiants, pour se changer les idées. Il marcha, marcha et remarcha dans un des nombreux luxuriants jardins du domaine. Il se détestait tellement, sensation ni corrosive, ni dévorante. Yannis n'arrivait pas à la décrire, mais elle lui donnait l'impression qu'il y avait un endroit de son corps qui le démangeait,sans savoir où. Excédé, il s'assit sur un banc, les yeux si noirs de colère que les étudiants qui passaient l'évitaient aussitôt.

Il gratta son visage, en essayant de penser à autre chose, mais une sensation vive, comme une brûlure de gel, lui fit pousser un petit de cri de douleur. La sensation ne s'arrêtant pas, il se leva et alla se regarder dans l'eau de la fontaine.

Malgré ses traits distordus par les ondes aquatiques, il vit clairement un tatouage rouge sombre sur la partie gauche de son visage, formes élégantes s'étendant du haut de son front jusqu'au bout de son menton, en entourant son œil comme un serpent affamé. Sans prévenir, le tatouage bougea, et Yannis ressentit une nouvelle fois la douleur.

Au lieu de la subir, il se calma pour tracer une formule sur sa face. La magie le chatouilla quand il inscrivit un charme de Mindoulehr sur la marque. La douleur s'effaça, tandis que la marque bougeait sous sa peau, comme une myriade de petites bulles vivantes.

Et si c'était le Kaarnag ? Il était différent de ses pairs par sa taille et ses pouvoirs, alors il m'a peut-être maudit pendant notre combat ? (Si on pouvait appeler ça un « combat »…). Mais il savait des livres que les Kaarnag, si formidables pouvaient-ils être, n'avait pas par nature une magie de malédiction, qui était plus réservée aux esprits, morts-vivants et autres créatures de ténèbres… Il dessina un cercle de formules sur l'eau, pour en annuler les perturbations et y augmenter la réflexion de la lumière. Une fois le sort en marche, il observa plus attentivement la marque.

Yannis se rendit compte que celle-ci n'était pas faite à partir de la magie sauvage : chaque ligne de tatouage n'était que l'accumulation de formules superposées les unes sur les autres, se mouvant, se modifiant au gré des lois obscures des mathémagies.

Pour faire un sort d'une telle complexité, il faudrait des millions d'années pour le lancer ! Même les mages, qui vivaient très longtemps, mettraient plusieurs de leurs générations sur le coup. Alors qui ? se demanda Yannis. Qui aurait eut le pouvoir de faire l'impossible, même en magie ?

L'hypothèse la plus plausible serait que quelqu'un ait utilisé sa Nature. Mais le problème est que la Nature d'un mage n'est que la partie sauvage de sa magie ; cette malédiction, dont les effets étaient encore inconnus de Yannis, n'avait rien de sauvage, mais étaient le fruit de l'artifice et du pragmatisme. L'hypothèse moins sûre serait qu'une centaine de mages auraient lancé à l'unisson des tas de sortilèges, provoquant le phénomène de « Résonance Adimensionnelle », où plusieurs formules, normalement incompatibles, devaient « résonner » sur un même gamme d'ondes magiques. Le phénomène en lui-même était cependant aussi crédible que l'existence des trous blancs, mais, en magie, il ne fallait laisser aucun détail vous échapper.

Y aurait-il un lien entre cette marque et ma magie ? Attends un peu… Et si c'était ça, ma « Porte ? ». J'en avais entendu parler pendant le cours du professeur Parmini : un organe situé au milieu de leur cerveau, qui synthétise l'énergie magique brute environnante en pouvoir magique. Peut-être… Peut-être que des mages, dans un accès de folie créatrice, ont eut l'idée de donner artificiellement cette capacité à un être non-magique ! Mais ça n'est pas un hasard… Il y a plein de races sur Mourn exemptées de la « Porte ». Pourquoi aller sur Terre pour choisir un cobaye ?

S'il y avait autant de pouvoir dans cette marque, il ne pourrait jamais la consommer entièrement. Une fois mort, que lui arriverait-il ? La marque n'exploserait-elle pas, sans ancre pour la maintenir ?

Tout à coup, une nouvelle vague de douleur l'atteint. Il poussa un cri de douleur. Cette fois, la souffrance n'était pas physique, mais psychique. Ne connaissant aucun sort pour l'arrêter, il hurla de plus belle, tomba sur le dos, ses yeux se fermèrent tandis que des étudiants accouraient pour se pencher vers lui. Il entendit des voix, mais elles semblaient venir du plus profond de lui-même.

Il sombra dans le néant.

* * *

*Synnaï Hencherick

La classe était terminée, et tout le monde partait déjà vers la cour de l'école où ils pourraient se prélasser et discuter sous le soleil. Tandis que les jeunes élèves et le professeur se précipitaient vers la sortie, un seul se démarquait par son audace naturelle : des cheveux roux en bataille, aucune tâche de rousseur, un visage fin, aux traits très discrets. Sa bouche était tordue dans une moue désapprobatrice, et, tandis que sa main gauche écrivait frénétiquement des calculs infinitésimaux, son autre main jouait avec ses cheveux qui refusaient de récidiver. Soudain, le jeune élève solitaire sembla agacé, ses yeux verts lançant un éclat désapprobateur. Il lâcha un « tss » avant de se remettre au travail, cette fois plus lentement.

Pendant qu'il relisait sa démonstration, quatre autres élèves rentrèrent dans la salle de classe ; Le premier avait la peau mate et les cheveux blonds, et le sourire caractéristique de celui qui a toujours mangé le clown. La deuxième était une de ces belles jeunes filles qui vous font tourner la tête dans la rue, contrairement à son amie qui aurait presque pu provoquer l'événement contraire. Le dernier de la bande avait des cheveux noirs de jais, et les yeux gris comme la pierre, sans qu'on puisse distinguer l'iris de la pupille. C'était le genre de bande qui aimait bien chercher les ennuis autour d'eux, et même les provoquer.

Le garçon à la peau mate, un certain Archibald Parmini, s'approcha du jeune roux et s'assit sur la table en face de lui, le dévisageant d'un air mauvais :

— Alors, le Sans-Nom, on a fini mon devoir sur la capacité calorifique du quartz sur un diagramme à treize branches ?

Le jeune élève roux resta silencieux, puis se pencha sur son sac. Il prit le devoir à l'intérieur et le tendit à Archibald sans le regarder dans les yeux.

Avec un sourire satisfait, il le prit délicatement et le lut attentivement.

— T'as rien oublié, c'est parfait… Tu as même reproduit mon propre style syntaxique et d'écriture. Chapeau ! Avec un peu de chance, dit-il avec un sourire, Tu vas finir par te faire passer pour moi ! Mais tout le monde sait que la copie n'égale jamais l'original, finit-il tandis que ses amis rirent de bon cœur.

— …

— Quoi ? demanda soudainement Archibald en lorgnant sa victime, la menace couvant dans sa voix. Qu'est ce que tu as dis ? Je n'ai pas bien entendu...

Les autres se figèrent, sentant le dérapage. Mais quand le garçon roux parla, ce fut d'une voix égale et sans peur, sans aucune agressivité apparente.

— Je me disais juste que c'était dommage que tu sois aussi feignant alors que tu sais tant de choses ; je trouve que c'est un réel gâchis, parce que si tu te mettais à véritablement travailler, tu serais le meilleur partout…

— Meilleur que toi, le bouseux ?

Archibald avait le regard amusé, mais déjà il caressait ses poings distraitement.

— Cela reste à voir, répondit simplement Synnaï. Je pense que tu serais le meilleur dans ta catégorie, mais c'est tout…

— Ah oui ? Et dans quelle catégorie serais-je le meilleur, si je ne m'abuse ?

— Eh bien, je pense que tu serais le meilleur extorqueur du monde, si tu y mettais un peu du t…

Le jeune homme n'eut pas le temps de finir sa phrase : son corps se souleva dans les airs et il fut plaqué dos au mur, comme une étoile de mer indisposée. Archibald regardait Synnaï avec un air furieux mais savourait son sentiment de puissance. Il tira ses manches : des diagrammes étaient tatoués sur ses bras nus, luisant d'un violet pourpre. Synnaï ricana en lâchant :

— Des cercles ultra-vectoriels… On dirait que tes parents ont peur pour leur petit chéri-d'amour…

— Ferme-la, et Archibald resserra sa prise sur le corps de l'ensorcelé et le fit presque hurler de douleur. C'est moi qui ai décidé de les inscrire…

— C'est vrai ? Synnaï suffoquait, mais continua sa fanfaronnade : Moi qui croyait que ce genre de pratiques étaient interdites aux étudiants toujours en cycle… Ce serait dommage si tu te faisais prendre…

— Ce serait dommage que tu meures maintenant, rétorqua Archibald sur un faux ton badin.

— C'est un bon argument… Synnaï fit une grimace de douleur. Yshvra !

Le jeune magicien retomba sur le sol, tandis que les "amis" d'Archibald semblaient aussi choqués que leur chef. Celui-ci semblait si estomaqué que Synnaï eut le temps de se relever et de s'approcher au niveau de son bourreau. Il se tendit, droit comme un i, et déclara d'une voix forte :

— Je demande un duel dans la tradition de Tyrminie, ce soir, au Rocher du Couchant. Choisis les règles.

— Je serais la Magie des Mots, répondit Archibald sans ciller. Et…

— Et…

— Tu seras l'Aspect ! conclut-il en jubilant

Si vous aviez pu vous glisser dans cette salle de classe, ce moment-là, vous auriez vu trois jeunes gens tendus comme des cordes d'arcs, et deux adversaires alourdissant de tout leur poids l'air de la salle. Mais si leurs auras semblaient se refléter, leurs visages étaient antagonistes : l'un semblait tomber des nues, et l'autre aux enfers.

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