27 Novembre 2017 – 14h01
Bureau de Alexandre Seguin – Hôpital Sainte-Croix
J’avais revu Gabriel la veille, au même endroit que la dernière fois. Nous avions parlé de tout et de rien en mangeant un repas simple. Je retrouvais mon meilleur ami et la relation que nous avions eu autrefois. J’étais plus proche de Gabriel que je ne l’avais jamais été d’un autre être humain, sauf peut être Zoé, et encore. Le fait que notre amitié remonte à plus de 32 ans changeait beaucoup de chose. Peut être que c’est parce que nous avions vécues nos années formatrices ensemble, inséparables. Ou peut être que c’est parce que j’avais été amoureux de Gabriel. Que j’étais entrain de retomber amoureux de Gabriel. Ou peut être qu’une partie de moi n’avait jamais cessé d’aimer Gabriel. Les sentiments naissants que j’avais pour l’homme Gabriel étaient pourtant très différents de ceux que j’avais éprouvé pour l’adolescent Gabriel. Bien que chacun de ses sentiments soient de l’amour, ils s’exprimaient de façon très différente. Lorsque j’étais adolescent, mon amour pour Gabriel avait été fulgurant et douloureux, me laissant avec des désirs qui faisait de moi un être à part et que je détestais. J’avais fait de mon mieux pour aimer les filles durant cette période, terrifié à l’idée que quelqu’un découvre mon secret. Mon amour pour Gabriel avait été porté par les hormones faisant rage dans mon corps et par ce feu propre à l’adolescence. Il me fallait Gabriel maintenant et totalement, la jalousie que j’éprouvais pour quoiqu’onques osait toucher Gabriel mettant mon self-control à rude épreuve. L’amour que j’éprouvais actuellement étais plus doux, plus tranquille. Plus profond d’une certaine manière. Mais toujours aussi sans espoir qu’auparavant. Alors que cette pensée avait été du sel dans mes blessures lorsque j’avais été plus jeune, elle n’était aujourd’hui qu’une minuscule pointe de douleur au fond de mon cœur. Avoir Gabriel en tant qu’amis était mieux que ne pas avoir Gabriel du tout. De cela, j’étais sur et certain et j’avais les vingt dernières années pour le prouver.
Un léger coup à ma porte me coupa dans mes pensées. Zoé passa la tête dans l’entrebâillement en me demandant si j’avais le temps pour une petite conversation. Lui faisant signe d’entrer, je me levais pour mettre la cafetière en route.
_ Tu avais l’air un peu triste ce matin en arrivant, alors je voulais être sur que tout allait bien ? me demanda Zoé, une fois que nous fumes installés, deux tasses fumantes posées devant nous.
_ Je suis amoureux de Gabriel.
J’annonçais la conclusion de mes réflexions tout haut. Après tout, c’était la vérité, et ce n’étais pas comme si j’étais capable de cacher le moindre secret à ma meilleure amie.
_ J’avais peur que ce soit quelque chose comme ça.
Zoé soupira en me regardant.
_ Tu n’as pas l’air trop mal, c’est déjà ça.
_ Je vais bien. Je sais que mes sentiments pour lui ne me mèneront à rien, et être son ami me suffit largement.
Je fit une pause, prenant une gorgée de café avant de poursuivre :
_ J’avais juste besoin d’accepter ce fait, et de le dire à voix haute. Je suis amoureux de Gabriel.
Je souris un peu tristement. Les mots sonnaient bien dans ma bouche. Zoé et moi finîmes notre café en silence, chacun perdu dans ses pensées. Avant de partir ; ma meilleure amie se tourna vers moi et me dit :
_ Tu devrais recommencer à sortir Alex, ça te ferait du bien je pense.
Zoé avait probablement raison. Rencontrer des hommes m’aiderait aussi à garder un certain équilibre dans ma relation avec Gabriel. Et puis j’étais un homme un pleine possession de ses moyens, j’avais des besoins.
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