Derrière la pluie typographique qui tombait bruyamment sous ses doigts, sa compagne de cabine avait achevé la lecture du «Traité de Grammaire et Conjugaison», qui était un livre pourvu d'une logique extrêmement simple.

Elle le reposa dans la petite bibliothèque, avant de s'attaquer à un autre grand classique: «L'Homme, le pourquoi du comment – traduction officiellement approuvée». Ce livre avait pour prétention de résumer l'Histoire de l'Humanité jusqu'à aujourd'hui. Beaucoup de mythes et de légendes s'y entrelaçaient, comblés d'annotations en tous genres sur la fiabilité de la traduction ; ses différentes variantes, et les faits historiques étayant certains passages.

Elle se plongea dedans, en mettant à l'épreuve ses connaissances linguistiques fraîchement apprises, et au besoin, interrompant la pluie, pour demander conseil.

Voilà ce qu'elle défricha à grand peine de la première page:

Au commencement, il n'y avait que des rochers glacials dans un monde qui ne connaissait que le gris. Dans un monde sans vie. Dans un monde sans temps.

De cet environnement bien trop terne naquit la vie : sous la forme primitive d'une petite graine plantée entre deux rocs, entourée d'un souffle bienveillant.

La petite graine germa, et il en sortit une petite herbe noire et frêle.

Les millénaires se multiplièrent, les générations passèrent et au fil de la lame du temps l'herbe verdit.

Puis certains de ses descendants choisirent de devenir des fleurs ou des arbres aux mille couleurs.

Mais les plantes s'ennuyaient, aussi créèrent-elles des animaux pour les divertir et veiller sur elles.

Parmi ces animaux, il y en avait un qui se démarquait par son apparence chétive.

Son seul exploit fut de se tenir sur ses deux pattes pour s'enfuir plus vite que les autres.