L'après-midi sonnait à peine, qu'un élégant et élancé gentleman sortit d'un Vertikal, suivit de près par une ombre. De sa cape, de son haut-de-forme noir et de son monocle, il dégageait une envergure de vautour. Ses petits yeux charognes semblaient toujours aux aguets d'une bonne affaire — ce n'était pas un hasard s'il trônait là-haut, au-dessus des nuages, au sommet de la chaîne alimentaire.

Marchant d'un pas rapide et sûr, il fondit directement vers sa cible : la maison d'Arsène — derrière, son jeune acolyte peinait à suivre. Il frappa d'un coup sec et précis à la porte. Cette dernière, de mauvaise facture, céda nette. Arsène en sursauta, et se précipita pour accueillir ces deux éminents visiteurs. Il avait revêtu son beau complet violet, et de son chapeau il les salua bien bas.

– Enchanté de faire votre connaissance, monsieur du Rapace.

Son interlocuteur resta de marbre. Ne se désespérant pas, Arsène se tourna vers la personne restant dans l'ombre de la grande carrure sombre, et en fit de même:

– Mademoiselle du Rapace..., tira-t-il son chapeau par galanterie.

Malheureusement, il n'eut pas autant de chance que la première fois — un événement inattendu se produisit.

« Ploc !»

Chapeau bas, sa plume tomba, créant une flaque d'encre au sol...

La demoiselle —qui ne semblait pas encore avoir perdue son humanité— fut surprise que quelqu'un prenne la peine de la saluer, elle qui était la lus part du temps ignorée. Elle ne put s'empêcher d'étouffer un petit rire en voyant cette étrange invention se retourner contre son créateur. Mais elle fut bien vite rappelée à la réalité :

— Monsieur Arsène, j'ose espérer que vous ne nous avez pas fait faire tout ce trajet juste pour nous montrer ce pitoyable spectacle, n'est-ce pas ? Déjà que descentre jusqu'ici me coûte, pensez-vous pouvoir supporter les conséquence de ma déception...... ?!

Arsène envoya prestement rouler du pied la plume, avant de balbutier, rouge de honte :

— Non,... Non. Bien sur que Non. Je vous en prie, suivez moi, l'invention dont je voulais vous parler est juste ici....

Ils arrivèrent alors, devant une énorme machinerie. À côté d'elle, sur un pupitre, reposait un paquet de dessins techniques qui semblaient en être les plans.

Arsène changea alors de visage: de la honte, il passa au sérieux, non sans dissimuler une petite fierté devant ce qu'il considérait être SA révolution:

— Mademoiselle, monsieur, je vous présente le Logikeur. Pour vous montrer l'étendue de ses capacités, et toutes les potentielles applications, je vous le présenterai ici sous une forme ludique. Et je...

— Trêve de bavardage, je vous laisse 2 minutes, pas plus, pour me dire exactement de quoi il en retourne !, incisa le charognard.

— Oui,... Il s'agit d'une machine dotée d'une forme d'intelligence. Pour vous en convaincre, la version juste devant vos yeux peut jouer d'elle-même au jeu des 3 pions. Je vous en prie, si vous voulez bien essayer, mademoiselle ?, demanda-t-il, lui tirant gentiment une chaise, pour l'inviter à s'asseoir en face du plateau de jeu.

Un coup d'œil à son père lui donna la permission. Elle s'assit sans plus de manière tandis que derrière elle, Arsène détailla:

— Vous devez sans doute savoir comment jouer ? Chacun à son tour pose un pion, et c'est celui qui aligne 3 pions, en ligne, colonne, ou diagonale, qui gagne. Pour indiquer où vous voulez jouer, appuyez juste sur la bonne case, et elle devrait changer de couleur. Le Logikeur, fera alors à son tour changer de couleur une case...

Ce jeu était des plus communs, la demoiselle n'eut aucun mal à jouer. La première partie s'acheva par sa défaite. Arsène poussa alors sur un grand levier, et toutes les cases reprirent leurs états initiales.

— Voulez-vous réessayer ?, demanda-t-il., les yeux charmeurs

— Ah, euh, oui, je...

— Tu voudrais bien savoir comment cela fonction, plutôt, non ?! Veuillez lui expliquer le fonctionnement, et pendant ce temps, j'aimerais moi aussi mettre à l'épreuve votre invention.

— Certainement monsieur. Par ici mademoiselle....

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Pendant ce temps, même si Sereine n'était nulle part en vue, elle entendait tout – même si pour autant, elle n'en comprenait que des fragments. Ainsi, de ce qu'elle compris, la machine d'Arsène utilisait une magie étrange appelait mathématique duale.

Apparemment, il avait conçut la machine avec seulement 4 blocs élémentaires, qu'il avait appelés: 'et', 'ou', 'non', et le dernier: 'mémoire'.

C'est en connectant des centaines de ces blocs les uns aux autres selon un schéma bien précis, qu'il avait réussi à créer cette fabuleuse intelligence. De plus, son invention pouvait avoir des applications bien plus pratiques. Il soutenait qu'elle pourrait être installée aussi bien dans les Vertikal, que dans les Horizonal, pour permettre de choisir précisément où descendre, plutôt que de s'arrêter à tous...

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— C'est bon, ils sont partis ! Bien joué Sereine, grâce à toi, on bien assez d'argent pour partir.

— Dépêche-toi de me faire sortir de là, j'y étouffe et c'est beaucoup trop étroit pour ma personne !

— Peut-être est-ce plutôt ta personne qui est trop... J'arrive tout de suite !

Arsène s'approcha de sa belle machine, son ex-propriété dont il venait de vendre les plans qui allaient être transporter chez monsieur du Rapace, dans quelques heures.

Il se pencha sur les mécanismes, fit tourner un engrenage de 3/4 de tours, un autre de 1/3 et un dernier 1/4 dans l'autre sens. Alors qu'il achevait à peine son geste, une petite porte s'ouvrit à l'intérieur même de la machinerie, et Sereine en sortie, l'air énervée.

— M'obliger à rester enfermée si longtemps dans cet horrible espace, tu n'as pas de cœur ! Surtout jouer contre cette horripilent monsieur. Il a presque tout essayé, et j'ai même cru à bien des instants qu'il avait flairé la duperie...

— En tout cas bravo, tu t'y est très bien prise. Ce n'est pas n'importe qui, qui a déjà eu le privilège de le berner. Donc grâce à toi, tu m'as remboursé l'argent perdue à cause de toi, conclut-il de son plus beau sourire.

Maintenant, il va falloir courir, et vite. Il n'est pas du genre à se laisser tromper sans réagir.