Chapitre 6 : Des alliances et des lames
La porte s’ouvrit sur une pièce particulièrement sombre. Sans lâcher la poignée, elle fit un pas en avant. Dans le fond, elle devinait une table, non, plutôt un bureau, derrière, l’obscurité. Entre elle et le bureau, le sol était couvert d’une moquette rouge foncée, sur laquelle, là où semblait se trouver le milieu de la pièce, un tapis noir était étendu. Un spot éclairait depuis le plafond ce point précis, quasiment sans diffusion de lumière périphérique. Ce faisceau lumineux perturbait sa vision au point qu’elle n’avait pas distingué l’homme assis au bureau.
— Tu sais pourquoi ton projet a échoué, n’est-ce pas ?
— Mon projet ?
— Bien sûr, ma chère. Ton projet. Car tu le mûrissais depuis longtemps, évidemment.
— Non, ça c’est vous. C’est vous qui êtes assez tordu pour ça.
Avançant sous le spot, elle en vint presque à éblouir son interlocuteur quand la lumière se refléta sur ses cheveux blonds platine. Gardant la maîtrise de ses nerfs, Nathalie retourna son hypothèse vers l’homme assis.
— C’est vous qui m’avez proposé votre aide pour ça. C’était peut-être même bien votre projet, non ?
— Disons que ton projet a trouvé sa place, comme par enchantement, dans un plan de plus grande ampleur… Tu as assez bien servi mes intérêts, même si ton projet a échoué…
— Ne vous inquiétez pas pour moi. J’aurai ma revanche. Cette petite salope souffrira, et lui ne s’en remettra pas, je le jure.
— Je n’en doute pas, il s’est déjà mis à ta recherche. Tu sais que je peux organiser votre rencontre.
— Pour le moment, j’ai besoin de récupérer… Mais il ne perd rien pour attendre.
— En es-tu sûre ?
— Écoutez, à cause de votre tireur d’élite à la con, il y a eu trois morts inutiles. Alors votre petit coup de main, pour les opérations spéciales, je vais m’en passer.
— Là, je te trouve un peu dure avec lui. Il est quand même venu te chercher alors que tu étais au plus mal…
— Il n’avait pas à canarder la salle de contrôle. Cet abruti a confondu des antennes avec des canons.
— Ne l’accable pas, très chère. Demande-toi plutôt pourquoi ton projet a échoué…
— Je sais, je n’étais pas prête. Et lui l’était plus que ce que j’imaginais. Je n’aurais pas dû y aller tout de suite après vous avoir rencontré. Et puis, je dois améliorer mon armure…
— Non, ton armure est bonne, c’est toi, juste toi. Trop de colère, ç’a réduit tes capacités d’analyse, de réflexion, et, donc, d’action. Note que ça me va, à moi… ç’aurait été dommage que tu réussisses. J’ai encore tellement de petites ficelles à tirer…
— Et quelles ficelles ?
— Non, je ne vais pas gâcher la surprise. Souviens-toi juste qu’un plan de grande ampleur se met en place. Et tu auras apporté ta pierre à l’édifice. J’espère que tu en seras fière, au bout du compte.
— Bon, votre plan machiavélique, c’est votre truc, pas le mien. Tout ce qui m’intéresse, c’est l’aide logistique et matérielle que vous allez pouvoir m’apporter. Après tout, c’est vous qui êtes venu jusqu’à moi. Vous deviez bien vous douter que j’irais jusqu’au bout, et que ça mettrait votre plan en péril.
— À vrai dire, j’aurais été très surpris que tu réussisses. Je te connais, plus que tu ne crois.
— Comment ça ?
— Allons ! Tu ne crois tout de même pas qu’une personne avec de tels moyens s’engage à la légère avec des inconnus dont il ne connaît pas tous les vilains petits secrets… Si je t’ai proposé mon aide, c’est parce que ça me rendait service, mais c’est aussi parce que je savais ce dont tu étais capable… et incapable…
— Je n’arrive pas à décider si vous êtes un génie, un type super organisé avec des moyens illimités, ou un malade obsessionnel…
— Non, nous savons tous les deux qui est un malade obsessionnel, je crois. Tu as payé assez cher pour le savoir, non ? Et c’est justement ça qui te ronge… tu veux lui présenter ta note de frais… J’ai pas raison ?
— Cette obsession a failli me tuer, oui, j’en sais quelque chose.
— Te tuer, tu dis ?
— Je croyais que vous étiez bien renseigné… oui, les électrochocs, ce taré voulait forcément me tuer…
— Est-ce que c’est lui qui te l’a dit.
— Je croyais que vous connaissiez tous mes vilains petits secrets…
— Trop de colère en toi… tu risques d’échouer de nouveau. Je t’invite à rejoindre tes quartiers et à te reposer. Demain, il fera jour…
Nathalie, s’était laissée guider dans une chambre par Vanessa, une domestique de la propriété. Lasse, seule, elle s’endormit. Elle fit un rêve, souvenir du jour où tout avait changé. Elle était assise près de ce radiateur, par terre, et faisait face à ce soldat confortablement assis dans ce fauteuil Voltaire.
— Et vous voulez quoi, alors ? Vous allez me tuer ?
— Non ! Je ne vais pas te tuer. Je vais te faire mal… très, très, très mal. Et ça va lui faire mal… très, très, très mal. Parce qu’il t’aime bien, quand même. Il voulait te protéger en te laissant au centre. Mais on savait tous que tu ne l’écouterais pas. Florence, ta petite sœur… S’il a de la chance, il va sauver la belle, mais… non, en fait, il n’y arrivera pas… Ensuite, il te trouvera dans l’état où on va te laisser, et normalement, il devrait péter les plombs. Et quand il sera au trente-sixième dessous, on en fera des croquettes pour chien-chien.
Nathalie se réveilla en sursaut. Elle se rendit à la salle de gym du manoir, qu’elle avait vue à son arrivée, et roua de coups un sac de cuir suspendu.Dans son bureau sombre, l’homme tenait une conversation téléphonique.
— Bonsoir docteur, oui, tout va bien. Non, non, c’est autre chose. J’aurai quelqu’un à vous présenter, un de ces jours. Oui, Quelqu’un qui aura sûrement besoin de vos services prochainement. Oui, je n’y manquerai pas. Je vous tiens informé dans les jours à venir. Certainement. Bonsoir.
L’homme enfonça un bouton. Après quelques secondes, Vanessa entra dans le bureau.
— Monsieur ?
— Vanessa, veuillez me préparer le spa, mon petit, vous serez bien aimable. Ensuite vous pourrez disposer.
— Tout de suite, Monsieur. Merci Monsieur. Bonne soirée, Monsieur.
— Bonne soirée, mon petit.
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L’homme, dans son bain, aussi peu éclairé que pouvait l’être son bureau, fumait le cigare. Un verre plein était posé au bord du spa.
— Eh bien, mon ami, il semble que les choses se précisent. Tu crois sûrement avoir souffert, ces derniers temps… Mais avec tous tes jouets high-tech, tu ne t’es jamais réellement mis en danger, tu n’as rien vu… Tu vas enfin faire connaissance avec la vraie douleur, celle qui attaque les chairs. Non, on ne me fera pas croire que la douleur morale, la perte d’un être cher, ou de plusieurs, est plus insupportable qu’une multiplication de blessures physiques bien localisées, une souffrance qui s’éternise. Voilà ce que tu vas devoir endurer, après avoir pleuré tous ces êtres si fragiles d’avoir eu ton affection. Et quand tu ne le supporteras plus, quand tu seras à bout de forces, quand la douleur te fera perdre tes moyens, alors tu me demanderas d’achever tes souffrances. Et moi, je prendrai bien soin de ne pas t’exaucer. Alors, on pourra enfin relancer un cycle.
Le rire sinistre de l’homme résonna sur les murs carrelés du spa.
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Le lendemain matin, dans sa chambre, où Nathalie avait finalement réussi à s’endormir, un interphone la réveilla.
— Ma chère, j’ai des projets pour toi, pour les jours à venir. Et puis, j’ai réfléchi, on va améliorer ton armure, tu avais raison. J’ai déjà préparé les schémas, je suis prêt à les donner à mon atelier pour la mise en œuvre ; si tu veux d’autres mises à jour, je t’invite à me rejoindre dans mon bureau.
Nathalie se leva, enfila rapidement un survêtement et se rendit au bureau, où l’homme l’attendait devant un écran géant.
— Bonjour mon amie, j’espère que tu t’es bien reposée, nous avons des milliers de choses à voir ensemble ce matin. As-tu bu un café ? Non ?
Il enfonça le bouton.
— Vanessa, apportez-nous un plateau, je vous prie. Dans mon bureau, mon petit.
Puis il s’adressa de nouveau à Nathalie.
— Alors voilà, ton armure est trop lourde, ce qui nuit à ta rapidité, nous sommes d’accord ? Nouvel alliage, plus résistant, moins d’épaisseur, plus de mobilité.
— Bien. Mais encore ?
— Pour prendre l’avantage, tu dois commencer par rattraper ton retard. Il vole ? Tu voles aussi, mais plus vite. Il est invisible ?…
— Il ne l’est plus.
— Oui, bon, ben toi tu l’es, à présent ! Et même pour un scanner thermique…
— OK, c’est pas mal…
— Évidemment tu gardes tes griffes au bout des bras. Et puis tu en as aussi aux articulations, coudes, genoux, et sous les semelles.
— D’accord…
— Dis-moi, as-tu déjà piloté un avion de chasse ?
— Vous le savez déjà, non ?
— C’est vrai, tu n’as pas eu cette chance. Tu n’en auras plus besoin, tu seras équipée comme eux. Plus de projectiles balistiques, mais des micro-missiles à tête chercheuse, chargées selon le besoin, avec guidage sur marqueur à vidéo-programmation. Pilotage dans le casque via électrodes de neurotransmission.
— Les charges ?
— Toute une gamme, de la pointe de flèche à la charge explosive en passant par diverses petites choses rigolotes. Voilà, c’est cadeau ! Tu aurais voulu autre chose ?
— Vous avez allégé l’armure. Faudrait pas que tout ce bazar en annule le bénéfice…
— Rassure-toi, ton ancienne armure était un char d’assaut désarmé. Maintenant, c’est une carapace indestructible qui te sera comme une seconde peau. Tu l’essaieras dès qu’elle sera prête ! En attendant, tu peux continuer à parfaire ta condition mentale. Pour le physique, tu l’es déjà, parfaite.
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Un rayon de soleil traversait des persiennes mal fermées et emplissait de lumière le petit volume de ce bureau dans lequel le plus petit objet non fonctionnel n’aurait pas pu trouver sa place. Une table gris clair occupait pratiquement toute la largeur de la pièce. Trois écrans plats, un clavier noir, une souris, un numériseur, un téléphone, un pot à crayon, quelques feuilles de papier et une calculatrice semblaient tous avoir une place attitrée sur cette planche. Face à tout ce matériel, une chaise en cuir noir, sur un pied central d’où rayonnaient cinq extensions à roulette. Sur le mur, derrière la chaise, le plan de ce qui ressemblait à une sorte de buggy non carrossé était aimanté sur un rail métallique. En face, le mur était caché par une étagère en bois à plusieurs étages, qui faisait office de bibliothèque technique, et un tableau papier sur trépied. À droite, une porte au-dessus de laquelle une pendule, qui aurait pu avoir été prise dans une gare, rythmait de son tic-tac lancinant le clapotis des doigts sur le clavier.
L’homme, vêtu d’un jean et d’un maillot de corps noir ample, portait le cheveu court, désordonné, nettement blanchi sur les tempes, sur les joues une barbe poivre et sel s’achevant juste avant le menton, et avait condamné la moustache à ne plus se montrer. Il regardait sur l’écran central des lignes de code informatique s’allonger au fur et à mesure qu’il tapait sur le clavier. De temps à autres, l’écran de droite s’animait, partagé en quatre vues d’une voiture sans carrosserie subissant toutes sortes de cascades sous un déluge de chiffres que seul un initié eût pu déchiffrer. Soudain, sur l’écran de gauche, surgit un message, signé « Hector », que l’homme lut immédiatement.
— Fred, il faut que je te voie. Il s’est passé des choses, j’ai besoin de ton avis sur la situation.
Sans attendre, et sans interrompre la course de ses doigts sur les touches alphanumériques, Fred, bien que concentré sur l’étude de dynamique de son véhicule fantôme, répondit à l’e-mail d’Hector.
— Envoie-moi un mail, raconte toute l’histoire, en détail, rien que les faits, pas d’interprétation, pas d’opinion. Passe me voir à la salle après-demain vers 19h00.
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Chaque coup de poing, chaque coup de pied claquait, faisait trembler le sac suspendu à tel point que la chaîne qui le retenait au crochet du plafond chantait dans une sorte de son de maracas métalliques. Chaque coup de poing, chaque coup de pied était accompagné du souffle du boxeur, qui revenait en garde systématiquement, jambe gauche en avant, poing gauche légèrement avancé, proche du menton et du nez, en protection, le poing droit collé à l’angle du maxillaire, juste sous l’oreille, les coudes collés sous les côtes. Le sac pouvait toujours essayer de riposter, il semblait n’avoir aucune chance de toucher son adversaire du soir. La sueur dégoulinait le long de son visage, les petits ruissellements finissaient leur course, soit dans le maillot de corps déjà trempé, soit en goutte à goutte sur le sol. L’atmosphère était imprégnée de ces entraînements à la limite de la résistance des athlètes qui venaient régulièrement remplir cette salle, dans l’espoir d'alimenter plus tard des lignes de palmarès glorieux sur les rings du monde entier.
Mais ce soir, il s’entraînait seul dans ce gymnase qu’il avait ouvert de nombreuses années auparavant, lorsque deux jeunes gens, dont les âges, cumulés, n’atteignaient pas encore le sien franchirent le pas de la porte d’entrée. L’un des deux, qui avait ses habitudes, semblait guider son camarade entre les sacs, les bancs de musculation, et les punching-balls, jusqu’à celui qu’ils venaient solliciter.
— Salut coach ! Je peux te déranger une minute ?
Malgré son entrainement personnel, le coach trouvait toujours du temps pour ses élèves. Cette disponibilité devait être une source de motivation pour les futurs champions qui pouvaient lire sur les murs de la salle des coupures de journaux relantant les succès de leurs glorieux aînés.
— Alex, qu’est-ce qui t’amène ?
— C’est mon copain, Gaël, il voudrait prendre une licence au club…
— Bon… Voyons, quelles sont tes motivations ?
— J’veux apprendre à me battre, m’sieur.
— À te battre ? Pour quelles raisons ?
— Ben, pour plus être emmerdé.
— Qui est-ce qui t’emmerde ?
— Ben… des mecs, quoi…
— Des mecs en particulier ?
— Ben… ouais, des mecs qui font chier, quoi…
— Ah ! Oui, je vois, ce genre de mecs…
— Ouais, c’est chiant !
— OK, et… tu as essayé les cours de self défense ?
— Ouais, mais bon, c’est pas pour moi…
— Comment ça ?
— Ouais, ça bouge pas assez !…
— Pourtant c’est bien adapté, pour les gens qui veulent se défendre contre toutes sortes d’agression…
— Ouais, non, j’veux dire, on apprend pas les trucs comme ça, les coups de poings, tout ça…
— OK, je vois. Bon, écoute, de toutes façons, je ne reprends pas de nouvel élève avant septembre, après les vacances d’été. Réfléchis bien à tes motivations, et reviens me voir à ce moment-là, d’accord ?
— Ouais, OK, j’vais revenir…
— Merci coach, désolé pour le dérangement.
— Pas de problème, Alex. À demain.
Hector, le visage caché sous une capuche, avait assisté à la conversation. Il sortit de l’ombre et s’avança vers Fred dès que les jeunes gens eurent quitté la salle. Son ami n’avait pas changé d’apparence depuis le début des années 2000, et son style rappelait un personnage de fiction, canadien, mutant, au nom évoquant un animal sauvage local étrange.
— Toujours adepte du look glouton, je vois…
— J’ai une tendresse pour ce petit animal à la fois pataud et agressif, sa faculté de mettre en fuite les gros ours bruns… Et toi, toujours pas adopté la mode barbastelle ?
— J’y ai pensé, mais je me suis dit que ça manquerait un peu d’originalité…
— Bon, j’ai étudié ton problème. Tu es dans une merde noire, mon pote !
— C’est un avis d’expert ?
— A mon sens, tu as deux problèmes, qui ne sont pas nécessairement liés naturellement.
— OK, mais encore ?
— Commençons par le tueur fou. D’abord, je doute qu’il soit fou. Bon d’accord, il l’est sûrement un peu quand même, mais, c’est pas Ted Bundy, non plus. C’est un type qui t’en veut, pour une raison ou une autre. À ses yeux, tu es responsable d’un truc grave qui lui est arrivé, et il veut te le faire payer au centuple. Et, étant donné la complexité de ses plans, l’étendue de ses moyens…
— Ses moyens ?
— J’y reviendrai, mais déjà, quand tu vois le nombre de gars qu’il a enrôlés dans son plan machiavélique… J’imagine que ces types ne font pas du bénévolat… Bref, il doit mûrir une vengeance depuis plusieurs années. Mais ça, je pense que tu y as déjà réfléchi.
— Nous sommes arrivés à la même conclusion, la police, mon équipe, et moi. Mais…
— Mais personne ne met de visage en face de la case tueur, sinon, tu ne serais pas venu me voir. Donc, je vois maintenant deux possibilités. Premièrement, c’est le type auquel personne ne pense, pas de contact direct avec toi, il aurait fini par se trahir, avec le temps, pas de contact évident avec l’un ou l’autre de tes adversaires passés, sinon, vous auriez déjà fait les recoupements. Cependant, suffisamment proche de quelqu’un que tu as neutralisé pour t’en vouloir tellement, ou bien un de ses admirateurs secrets. Le premier de ces cas peut être éliminé si vous avez bien fouillé dans le passé de tes ennemis. Le second cas peut être envisagé s’il a repris un mode opératoire connu. Si c’était le cas, je l’aurais lu dans ton rapport.
— Exact, on est dans l’innovation sur toute la ligne.
— Reste donc la deuxième possibilité, le type auquel tout le monde pense, mais qui, pour une raison ou une autre, a été rayé de la liste des potentiels.
— C’est là qu’on butte. L’os est vraiment trop gros…
— Logiquement, quelle que soit la raison qui vous a poussé à l’éliminer, elle est caduque.
— C’est impossible… il est…
— Non, ne m’en dis pas plus, ça ne m’intéresse pas, et je ne veux surtout pas tremper davantage là-dedans.
— Alors ?
— Tout ce que tu as appris, le désapprendre tu dois…
— A part ça ?
— Ta copine ? Elle t’en veut à mort ; elle aussi.
— Sans blague ?…
— Sans blague ! Et elle mûrit ça depuis longtemps aussi. Moins que lui, mais quand même. Et je dirais qu’elle pourrait bien l’avoir rencontré.
— L’inconnu ?
— Ouais, le riche inconnu. Ils auraient forgé une alliance opportuniste, que je ne serais pas surpris. Enfin, opportuniste de sa part à elle…
— Comment ça ?
— Ben, si j’étais dans sa position à lui, envie de vengeance, moyens illimités, je mettrais tout en œuvre pour que tes amis se retournent contre toi… avoue que ça serait jouissif, avant de t’achever…
— Merci…
— De rien ; et je ne t’explique même pas jusqu’où ça peut remonter… en attendant, je m’arrangerais pour améliorer les capacités de ma nouvelle alliée, la rendre plus efficace pour t’affronter.
— Attends, tu ne crois pas que tu vas un peu loin, là ?
— Peut-être, mais, dans ce cas précis, un hélicoptère armé façon Rambo, ça doit coûter des ronds. Si jamais ça se loue… mais, quand on a ça sous la main et qu’en plus on a une bonne motivation, les raccourcis sont vite trouvés, non ?
— OK, tu marques un point. Continue.
— Donc, ta copine a une nouvelle armure, mais tu l’as tout de même repoussée. Elle doit donc faire mieux. Elle ne t’aura pas à la loyale à main nue, ça passe donc par une mise à niveau du système, d’accord ?
— OK…
— Des lames dans les manches ? Moi, j’en ajouterais à contre sens dans les coudes, aux genoux, aussi, et dans les semelles, vers l’avant et vers l’arrière.
— Ça se tient.
— Tu as paré ses coups en t’envolant ? Tu peux être sûr qu’elle volera aussi, dorénavant, et plus vite que toi… Et, histoire d’être sûre, elle aura un système de guidage de ses projectiles sur cible marquée, comme un avion de chasse. Et je parie qu’elle va te repiquer ton système de camouflage. Quitte à devenir un avion de chasse, autant qu’il soit furtif…
— Et ton esprit tordu verrait quoi, en face ?
— Ben, tout ça, même si, à la base, l’armure est allégée, ça va faire du poids en plus. À ta place, j’éviterais l’escalade. Débarrasse-toi de ce qui est lourd et qui n’est plus une surprise. Plus de combinaison volante, plus d’homme invisible. Simplement un truc confortable, qui te permette de bouger à ton aise, éventuellement capable d’arrêter quelques trucs, lames, balles de pistolet, pas plus. C’est ta mobilité qui te donnera l’avantage.
— Et on reste cloué au sol ?
— Je n’ai pas dit ça… Pour les petits déplacements, bobines de câbles, grappins et poulies. Pour les plus longs voyages, il te reste l’avion.
— L’avion ?
— Ouais, bon, pas forcément un gros truc, un petit monoplace, rapide, et c’est lui qui portera les armes dont tu auras besoin. Arrange-toi pour qu’il pratique le vol stationnaire et pour pouvoir le piloter comme un drone, à distance. Il viendra te chercher quand tu le siffleras… Au fait, lui, il doit être furtif, si tu veux avoir la paix.
— Intéressant…
— Je sais… Et, si tu veux rejouer l’invisibilité, il y a encore des solutions simples. Je t’ai préparé un petit dossier… tiens, amuse-toi bien.
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