47. Encore des mots, toujours des mots
Albane
Je pose mon téléphone sur ma table basse et me laisse tomber sur le canapé en soupirant. Cravate sursaute, assise de l’autre côté, et me toise comme si je venais de commettre le crime du siècle en osant la réveiller. Désolée ma belle, mais ce canapé est à moi. Je me love sous mon plaid et récupère mon chocolat chaud alors que ma boule de poils vient s’installer sur mon ventre. Profiteuse.
Je préfèrerais être au boulot. Oui, je sais, je suis bizarre. Mais j’aime les soirées au centre. J’adore passer un moment avec les mamans, discuter dans les couloirs, être réquisitionnée pour une histoire avant de dormir. J’aime voir Sophie et Gabin, sans compter leur Papa, évidemment. J’aime être occupée, débordée par le travail, ne plus savoir où donner de la tête et rentrer épuisée. Au moins, je me glisse sous la couette et m’endors rapidement. Aujourd’hui, en repos, j’ai tourné en rond, essayé de lire, en vain. Difficile de me concentrer. Je n’ai eu envie de rien.
Je sursaute et soupire quand mon téléphone sonne. Pas encore, pitié ! Je n’en peux plus… Bientôt quinze jours que Jonathan me harcèle et je reçois un nombre incalculable d’appels privés venant de lui. Je ne sais pas comment cet enfoiré a eu mon numéro, mais autant dire qu’à présent, l’angoisse qui dormait paisiblement au creux de mon estomac, ne fait plus de petits soubresauts de temps à autre. Elle est réveillée, bien présente. Et s’il me retrouvait ?
Prise d’une angoisse sourde, je décide de ne pas répondre, et pousse un nouveau soupir, de soulagement cette fois, lorsque la sonnerie s’arrête. Pourtant, quelques secondes plus tard, le son d’un message retentit. Je récupère mon mobile, curieuse. Jusqu’à présent, Jonathan n’a jamais laissé de message et ne m’en a pas envoyé. Merde, c’était finalement un appel de Julien. A cette heure ??
Julien :
Albane, tu dors ? J’ai besoin de toi. Réponds moi stp
Moi :
Je ne dors pas, mais Cravate oui… Qu’est-ce qui t’arrive ?
Julien :
J’ai comme une envie de prendre un jeu de cartes et d’aller voir Mohamed pour une partie. Je fais quoi pour résister ?
Merde… Si je suis soulagée qu’il ait été en capacité de m’appeler plutôt que de se précipiter chez Mohamed, je n’en reste pas moins incapable de vraiment l’aider. Je ne suis qu’éduc, pas psy ou addictologue...
Moi :
Qu’est-ce que ça t’apporterait ? Pourquoi est-ce que ce soir tu as envie de jouer ?
Julien :
L’adrénaline de la gagne… L’envie d’être le meilleur. Les émotions. Mais je résiste. Ça va juste m’entrainer à ma perte. Désolé de te déranger. Je vais te laisser dormir.
Moi :
Je ne comptais pas dormir tout de suite. Et je suis là. Je ne te lâche pas. Pense à Gabin et Sophie, qui ont besoin de leur Papa Ours / Super héros. Pense au chemin parcouru, est-ce que tu crois qu’une partie en vaut la peine ?
Julien :
Tu comptais faire quoi ? C’est dur de lutter contre le craving. La psy m’a dit d’en parler à quelqu’un quand j’ai envie… Et je n’ai que toi…
Moi :
M’abrutir devant un écran. C’est beaucoup mieux de discuter avec toi. Et je me doute que c’est dur, mais tu peux compter sur moi. Une équipe, tu te rappelles ? On y passe la nuit si besoin.
Julien :
La nuit ? C’est une promesse ? Une invitation ?
Moi :
Désolée, Victor est dans les parages, tu sais… La promesse de te soutenir, ça c’est clair.
Julien :
Victor ? Je suis vraiment nul alors si un objet t’intéresse plus que moi. J’aime ta promesse en tous cas. J’en ai besoin.
Moi :
Crois-moi, je pense à pas mal d’adjectifs qui sont bien loin de “nul” quand je pense à toi. Et la promesse est sincère, c’est celle d’Albane, pas de la flicaille en plus.
Julien :
Tu penses à quoi alors ? Je suis curieux.
Moi :
Monsieur veut se faire mousser ? Je te trouve passionné, tendre et protecteur, fort et caractériel. Pour le reste… Je crois que doué au lit et sur un plan de travail rentre aussi dans ton caractère… Doué de tes mains, et pas que pour la peinture, de ta bouche, et pas que pour m’en mettre plein la tête. Enfin bref, tu vois ce que je veux dire !
Julien :
Je commence à voir oui. Mais il faut encore que tu m’aides. Tu es dans ton lit ? Tu es habillée comment ?
Je ris en lisant son message et bouscule Cravate pour me caler plus confortablement dans le canapé. Il va réussir à m’exciter alors qu’il n’a strictement rien dit qui pourrait faire monter la température… Je dois être vraiment très en manque, pas possible autrement....
Moi :
Ben voyons ! Je suis dans mon canapé, enveloppée dans mon plaid, avec Cravate sur le ventre. En dessous du plaid… Une info pour une info, Monsieur Perret !
Julien :
Cravate a trop de chance ! Moi, je suis dans mon lit. Voila info donnée ! A ton tour !
Moi :
J’ai bien peur de te décevoir en te disant ce que je porte sous ce plaid, tu sais ?
Julien :
J’ai bien peur de te faire envie si je te dis ce que je porte…
Moi :
Tu as raison, j’ai envie… De savoir !
Julien :
Une info pour une info, il paraît ! Mais ma description ira vite. Très vite…
Moi :
Moi aussi… Une robe de chambre… Et un short de nuit…
Julien :
Je ne suis pas déçu. Et tu sais quoi ? T’imaginer m’a fait sortir les cartes de la tête.
Moi :
Une info pour une info, Perret ! J’attends…
Julien :
Moi, j’ai juste mon slip sexy avec un gros cœur rouge dessus. ahah !
Moi :
Ok, je vais finir ma nuit avec Victor, Petit Ours !
Julien :
Dommage que Victor occupe toutes tes pensées. Moi, c’est avec toi que j’aimerais finir la nuit, ma jolie référente :)
Moi :
Ah oui ? Et pour quoi faire, au juste ?
Julien :
M’occuper de toi beaucoup mieux que Victor. Il n’a pas une bouche comme la mienne, si ?
Moi :
Malheureusement non, et je ne suis qu’éduc, pas les moyens de m’offrir mieux qu’un Victor… Tu me manques… Et pas juste pour ta bouche entre mes cuisses, promis !
Julien :
Toi aussi tu me manques. Et pas que pour tes cuisses autour de ma taille et ton corps de rêve. J’ai trop envie d’un bisou…
Moi :
Sauf que là, t’es en train de m’exciter et que je ne pense pas qu’à un petit bisou. Je ne te félicite pas !
Julien :
Moi, depuis que tu m’as répondu, je suis excité. Egalité ! Si je pouvais, je viendrais te voir tout de suite et je te promets que ce ne serait pas qu’un petit bisou.
Moi :
C’est pas tenable. Il va falloir qu’on trouve un moyen de se voir plus souvent en dehors du centre… Tu ne peux pas m’allumer comme ça, c’est pas humain !
Julien :
Moi ? T’allumer ? Alors que tout ce que je veux, c’est que tu viennes me chevaucher en gémissant ? Ce n’est pas mon genre, tu vois…
Moi :
Julien !!!! Bon sang… T’es terrible ! Tu devrais avoir honte !
Julien :
J’ai honte. Il va falloir sévir, Madame l’éducatrice. Convoquez moi à un entretien de recadrage immédiatement et je saurai me faire pardonner. J’ai des arguments qui commencent à prendre de la place dans mon caleçon.
Moi :
Je vois que tu aimes être dominé… C’est intéressant ;)
Julien :
Albane, j’ai envie d’être avec toi. Tu me manques trop. Et tu verras quand je t’aurai menottée au lit si je n’aime qu’être dominé !
Suite à ce message, je reçois une nouvelle notification. Je me dépêche de l’ouvrir pour voir quelle autre poussée d’adrénaline il va provoquer chez moi avec ses petits messages coquins. Et là, c’est une photo de lui, tout sourire, torse nu. Je vois ses cheveux un peu ébouriffés, ses muscles qui apparaissent. Mes hormones sont en folie et je crève d’envie d’aller me lover dans ses bras et de sentir sa barbe me chatouiller le cou.
Julien :
Tu vois, je suis prêt à t’accueillir. Tu viens quand dans mes bras ?
Moi :
Crois-moi j’adorerais y être… C’est vraiment frustrant ! Encore plus vu comme tu t’amuses à jouer avec moi...
Julien :
Heureusement alors que je ne t’ai pas dit que j’étais désormais nu et que t’imaginer dans mes bras me met dans une belle forme. Ce ne serait pas sympa de t’avouer ça…
Moi :
C’est vrai, c’est comme si moi je te disais que je suis toute mouillée rien qu’à m’imaginer dans tes bras après tout, ça ne serait pas très cool !
Julien :
J’ai envie de venir vérifier et de plonger entre tes jambes pour goûter à ce nectar que tu m’as fait découvrir. Pourquoi tu m’excites comme ça ?
Moi :
Voilà une question que je me pose dans l’autre sens assez fréquemment ! J’ai envie de te chanter “encore des mots, toujours des mots rien que des mots” mais ça ne serait pas bien sympathique :p
Julien :
Si tu veux des actes, je suis prêt à sauter dans ma voiture et te rejoindre. Là. Tout de suite. Juste pour le plaisir de sentir ta peau sous mes doigts, de te caresser et jouer avec ton corps offert à mes baisers… Et te faire l’amour. Encore l’amour. Toujours l’amour. Rien que l’amour.
Moi :
Si seulement… En attendant je vais devoir me caresser toute seule, c’est triste.
J’avoue avoir très envie de jouer, là. J’hésite grandement à lui faire une photo… Pauvre Cravate, que je pousse pour être tranquille. Désolée ma belle, mais j’ai un homme à allumer ! Je descends le plaid sur mon ventre et desserre le nœud de mon peignoir pour laisser apparaître ma peau avant d’activer l’appareil photo. Je ne doute pas qu’il appréciera, grognera, bougonnera, mais sera excité par ce cliché. Oui, j’ai glissé la main dans mon short, oui, c’est osé et inhabituel de ma part. Et oui, ça m’excite beaucoup ! J’hésite une seconde mais finis par lui envoyer.
Julien :
Purée, Albane… Tu me fais bander. J’ai envie de venir me saisir de tes tétons et les embrasser et les lécher. Et je veux que ce soit ma main à la place de la tienne. Enlève donc ce short et caresse-toi pour moi, ma belle.
Moi :
J’ai pas envie de me caresser… Ce sont tes mains que je veux sentir sur mon corps, Papa Ours…
Julien :
Moi, c’est ma queue que j’ai envie de te faire sentir te pénétrer. Dommage que tu ne te caresses pas, je risque de jouir tout seul. Ce serait injuste, je trouve.
Moi :
Qui t’a dit que je ne me caressais pas ? Je préfèrerais largement te sentir t’enfoncer en moi, mais je me contente de mes doigts, pour ce soir…
Julien :
Je vois bien la scène… Tu me fais tellement bander. Imagine que je suis entre tes jambes. Imagine ma queue qui s’enfonce lentement entre tes lèvres trempées. Je rêve de venir prendre la place de tes doigts.
Moi :
Julien… Comment peut-on être excitée et frustrée en même temps ? J’ai tellement envie de te sentir contre moi, sur moi, en moi…
Julien :
Je veux être contre toi, sur toi, en toi. Maintenant. Et jouir au fond de toi. J’ai envie de toi Albane. Je veux jouir en même temps que toi. Mais je ne peux pas te dire que je suis en train d’accélérer mes caresses sur mon sexe tout dur et prêt à te satisfaire…
Je reçois à nouveau une photo. Je l’ouvre avec frénésie, continuant de l’autre main à insérer mes doigts dans mon intimité où la cyprine coule maintenant sans restriction. Je le vois couché sur le ventre. Il lève les yeux vers la caméra et son regard est la première chose qui m’attire. Quel désir je peux lire dans ses yeux ! Ils me rendent encore plus fou ! Et rapidement, je deviens encore plus folle de désir quand je vois qu’il est nu et que l’angle de la photo me laisse voir son dos musclé et ses fesses nues. Ce mec est trop beau. Je ne peux pas résister !
Et je ne veux pas résister. A cet instant, je veux plus que des messages, plus que des photos. Je veux entendre sa respiration rapide, sa voix rauque, ses grognements… Je veux sentir son excitation, l’entendre jouir, tout simplement. Et tant pis si demain je pique un fard en le croisant parce que je ne suis pas à l’aise avec ce qui s’est passé ce soir. Je ne peux m’empêcher de l’appeler, j’en ai trop envie.
Je crois d’abord qu’il ne répondra pas, car cela sonne plusieurs fois avant que je n’entende enfin sa voix, si longtemps que j’ai presque eu le temps de changer d’avis.
- Albane…
Sa voix est basse, pour ne pas réveiller les enfants, mais rauque et traînante. Bon sang, comment l’entendre simplement dire mon prénom peut-il me faire autant d’effet ?
- Julien…
Je me sens un peu con à présent, je ne sais pas trop quoi lui dire, quoi faire, alors que je ne peux m’empêcher de continuer à me caresser.
- J’ai envie de toi, Albane. J’ai envie de te sentir tout contre moi. Ton corps chaud sous mes mains. Caresse-toi pour moi. Je veux t’entendre jouir pour moi. Mmm...
Le petit gémissement qu’il pousse à la fin m’excite encore plus si c’est possible. Mes doigts reprennent leurs mouvements entre mes lèvres, je l’écoute me parler et lui obéis avec plaisir, me caressant au rythme de ses paroles.
- Entendre ton souffle comme ça au téléphone, cela m’excite, Albane. Je suis tout dur pour toi, j’ai envie de m’enfoncer en toi… Ne te caresse donc pas trop vite, je ne veux pas que tu jouisses avant moi…
- Ce que j’aimerais te sentir aller et venir en moi, soupiré-je. Je voudrais tellement gémir sous tes coups de reins, te sentir jouir…
- Mmm tu m’excites, Albane. Mets tes doigts au fond de toi et imagine que c’est moi qui suis en train de te pénétrer, de m’enfoncer. Écarte les jambes et laisse le plaisir prendre possession de toi.
J’écarte bien les jambes et je cale le téléphone entre mon épaule et mon oreille pour pouvoir me caresser de mes deux mains, avide de faire jouir mon corps qui ne demande que ça. J’empaume un sein et je pince mes tétons pendant que l’autre se glisse entre mes jambes. Mes doigts caressent mon clitoris et s’enfoncent dans mon vagin trempé. Mes gémissements se font plus forts et ma respiration plus haletante.
- Julien, murmuré-je dans un gémissement, dis-moi que tu vas jouir, je ne vais pas tenir longtemps… C’est tellement bon de t’imaginer en moi…
- oh oui ! Mmm !! Jouissons ensemble ! Je ne peux plus me retenir ! Tu me fais tellement bander ! C’est trop bon... Je veux jouir au fond de toi mmmm.
Lorsque je l’entends raler, lorsque j’imagine son sexe, que j’avais en moi il y a peu encore, exploser et le sperme jaillir, je sens tout mon corps se mettre à onduler, emporté par les vagues de plaisir qui se diffusent depuis mes seins et mon vagin jusqu’à toutes les extrémités de mon corps. Je ferme les yeux et me laisse emporter par le plaisir qui me terrasse comme il est en train de terrasser Julien dont j’entends le souffle rauque dans mes oreilles. C’est intense, divinement bon, même s’il est clair qu’un réel tête-à-tête l’aurait été davantage. Mais ça vaut mille fois un tête-à-tête avec Victor.
Je reprends doucement mon souffle alors que Julien reste silencieux au bout du fil, et je finis par m’inquiéter de ne pas l’entendre parler.
- Tout va bien ? demandé-je doucement, soudain intimidée.
- Oui, ma mignonne. C’était fort de t’entendre jouir. Je me suis retrouvé comme dans mon studio… Qu’est-ce que tu es sensuelle quand tu gémis… Tu me rends fou, tu le sais ça ? dit-il dans un sourire que je devine à son ton réjoui.
- C’est vrai que c’était pas mal…
- Pas mal ? C’est tout ce que tu trouves à dire ? s’insurge-t-il.
- Julien, il faut vraiment qu’on se voie seul à seule. Tu me manques trop et ce petit interlude n’a fait qu’intensifier mon besoin de me retrouver dans tes bras.
- On va réfléchir à quand on pourra se voir alors.
- C’est une promesse ?
- C’est une évidence, Albane. On va se montrer inventifs ! Moi aussi, j’ai besoin de te sentir contre moi.
- Merci, Papa Ours. Bonne nuit et fais de beaux rêves.
- Bonne nuit à toi. Que tes rêves soient doux et tendres.
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