49. Interruption des programmes
Albane
Après avoir enfin résolu le problème avec Clément, non sans difficultés, je vais m’enfermer dans les toilettes pour souffler un coup. Bon sang, s’il y a bien une chose que je déteste, c’est ce genre d’interactions avec les résidents. Outre mon instinct de survie qui a tendance à s’enclencher assez rapidement, et mes angoisses qui remontent, je déteste cette ambiance pesante et tendue qui se crée avec ces haussements de voix, ces insultes, ces provocations.
Clément est sorti boire sa bière au parc, et moi j’ai envie de finir ma journée dans cette petite pièce, propre, heureusement, qui m’assure que personne ne viendra me faire chier. Ou m’insulter. Ou me frapper. Pourtant, je sais qu’il faut que j’aille voir Julien. Déjà, pour lui expliquer mon comportement. Mais aussi, et surtout peut-être, pour l’engueuler. Ou pour me lover contre lui, à voir selon comment je suis accueillie et comment ma colère redescend. Parce que oui, je suis en colère contre lui aussi. C’est quoi ce comportement, sérieusement ? A quel moment s’est-il dit que menacer Clément allait l’aider à se calmer ? A quel moment s’est-il dit que j’avais l’air d’une demoiselle en détresse ? A quel moment a-t-il conclu que j’étais incapable de faire mon boulot ?
Je prends quelques minutes de plus pour me calmer un minimum, et suis interrompue dans mon introspection par deux coups frappés à la porte. J’ouvre en soupirant et constate que Mathieu n’a pas pu s’empêcher de venir s’enquérir de mon état. Ou m’emmerder, au choix. Je ne suis pas d’humeur, il a plutôt intérêt à faire attention à ce qu’il dit à cet instant.
- Qu’est-ce que tu veux, Mathieu ?
- Est-ce que tu vas bien ?
- Bien sûr que je vais bien, c’est le boulot.
- Oui, enfin… Pas la partie la plus fréquente, ça secoue ce genre de confrontations, j’imagine.
- Ça fait partie du boulot, je t’ai dit. Tu m’excuses, je vais aller voir Monsieur Perret.
- Je t’accompagne.
- Non, j’y vais seule.
- Tu plaisantes ? Il était aussi énervé que Clément !
- Et alors ? Je n’ai pas besoin d’un garde du corps, Julien ne serait jamais violent.
- T’en sais rien.
Bon dieu mais il ne veut pas me lâcher cinq minutes, lui ?! J’aurais mieux fait de rester couchée ce matin, tiens.
- Je le sais, c’est tout.
Je sors des toilettes sans lui accorder davantage d’attention et me dépêche de rejoindre le bâtiment des familles. Julien doit être furibond, mais je ne pouvais pas le laisser faire. Certes, j’ai été un peu sèche, mais je devais déjà gérer mes propres angoisses, sans avoir en plus à m’inquiéter de le voir se retrouver à se battre, risquer sa place et celle des enfants au passage.
Quand j’arrive devant sa porte, j’ai presque espoir qu’il ne soit pas là, qu’il soit sorti courir ou se défouler, pour que sa colère soit redescendue. Je ne sais pas si c’est une bonne idée de venir aussi rapidement, alors que je ne suis moi-même pas calmée, mais je commence à le connaître, j’imagine les rouages dans son esprit se mettre en branle et un millier de conneries s’inscrire dans sa tête, que je dois rayer de la liste au plus vite. Foutu Papa Ours, plus compliqué qu’un casse-tête chinois…
Je frappe doucement à la porte, priant presque pour que tout se passe bien. Julien ouvre rapidement la porte, le visage fermé. C’est parti...
- On peut discuter ? demandé-je doucement.
- Tu veux parler de quoi ? me répond-il presque en aboyant. Tu n’as pas besoin de moi, j’ai compris. Je ne suis pas un imbécile, non plus.
- Tu veux bien arrêter de me crier dessus pour qu’on puisse avoir un échange constructif ? murmuré-je en regardant derrière moi rapidement pour vérifier que nous ne sommes pas devant un public.
- Tu as raison. Entre donc. J’ai pas trop le temps par contre, j’ai promis à Gabin d’aller le chercher à l’école.
- Je n’en ai pas pour longtemps, soupiré-je en entrant. Je comprends que tu l’aies mal pris mais tu lui criais dessus, c’est pas la solution idéale pour calmer quelqu’un d’énervé.
- Il allait te frapper, Albane, si je n’intervenais pas ! Je ne pouvais pas le laisser faire ça quand même ! me répond-il en saisissant ma main dans la sienne.
- Je suis formée pour ce genre de choses, Julien, j’ai pas besoin qu’on vole à mon secours au moindre problème !
- C’est pas une raison pour m’envoyer balader comme un chien. Tu m’as fait mal avec tes mots…
- Je t’ai demandé gentiment de partir et tu ne l’as pas fait, tu voulais quoi, que je te baise les pieds en te suppliant d’avoir la grâce de sortir, peut-être ? bougonné-je en retirant ma main de la sienne, agacée.
- Tu voulais que je le laisse te faire du mal ? Je ne pouvais pas, Albane… Je ne pouvais pas....
- Non, je voulais que tu me laisses faire mon boulot, Julien. Je sais que t’aimes pas ça, mais les faits sont là : Je suis éduc et c’est mon boulot de faire ce genre de choses, aussi méprisants que tu puisses trouver les travailleurs sociaux.
- S’il t’arrivait quelque chose, je ne sais pas comment je réagirais… J’ai peut être merdé, mais j’avais juste envie de te prendre dans mes bras et te protéger…
- Ça ne serait pas la première fois que je me ferais cogner dessus, on s’en remet, soupiré-je.
Ok, Papa Ours sait comment calmer mes crises de colère en une phrase… A cet instant, l’envie est partagée, j’en conviens. Oui, j’ai envie d’être protégée, encore plus en ce moment. Mais je n’ai pas envie d’avoir l’image de la femme faible, je ne peux pas me livrer à ce point.
- Plus jamais on ne te cognera dessus, Albane. Je ne pourrais pas le supporter.
Il écarte alors les bras pour que je vienne m’y lover. J’hésite à céder mais je meurs d’envie de le toucher, le sentir à nouveau contre moi… Je finis par lâcher prise et franchis la distance qui nous sépare pour profiter de son étreinte. Ses bras se referment autour de moi alors que je niche mon nez dans son cou en soupirant de contentement.
- Tu ne seras pas toujours là pour l’éviter, Papa Ours, murmuré-je.
- Je sais, soupire-t-il… Mais ne m’en veux pas quand je m’énerve… Je tiens trop à toi pour te voir être blessée ou attaquée.
- Je ne pouvais pas te laisser prendre le dessus Julien, je suis au boulot, là, c’est… Compliqué.
- Compliqué ? Pourquoi ? Je sais ce qui est simple, moi.
Il pose alors ses lèvres sur les miennes et je sens une de ses mains prendre possession de mon sein. Il m’embrasse et je fonds littéralement dans ses bras. Je pose la main sur son torse et la glisse sous son tee-shirt pour profiter encore plus de sa chaleur réconfortante. La douceur de sa peau, combinée à la pression de ses lèvres contre ma bouche, à la danse de sa langue avec la mienne, réchauffe tout mon corps et termine d’apaiser ma colère.
Julien nous fait reculer jusqu’au lit et m’entraîne avec lui jusqu’à nous allonger l’un contre l’autre. Bon sang, que j’ai envie de partager à nouveau cette intimité avec lui, d’autant plus qu’il m’amène au-dessus de lui et glisse ses mains sous mon chemisier pour venir caresser mon dos, mes reins, sans cesser de m’embrasser. C’est tendre, passionné, sensuel, comme toujours avec cet homme capable de souffler le chaud comme le froid, de m’agacer comme de m’embraser.
A califourchon sur lui, je ne rêve que d’une chose à cet instant, et c’est tout sauf soft. Je veux sentir ses mains partout sur mon corps, son souffle chaud, sa bouche, sa langue, sur ma peau, son sexe, que je sens déjà dur sous moi, glisser contre mon intimité humide et s’y nicher… Il ne me faut, avec lui, que quelques secondes pour n’être plus que sensations.
Je me surprends à onduler contre lui quand un grognement lui échappe et qu’il empaume plus brusquement mes seins à travers le tissu de mon soutien-gorge. J’ai envie de lui. Bon sang, je crève d’envie de lui, et ce manque devient insupportable.
- Dans combien de temps tu dois aller chercher Gabin ? murmuré-je avant de mordiller le lobe de son oreille.
- Largement assez pour qu’on y trouve tous les deux notre compte, ma belle.
- J’ai envie de toi… Si tu savais comme j’en ai envie…
Je dépose des baisers dans son cou tout en déboutonnant son jean, impatiente et excitée, alors que sa respiration s’emballe. Que j’aime lui faire ce genre d’effets, le sentir réagir chaque fois que je le touche, voir son regard hanté par le désir. Et le grognement qu’il pousse lorsque je glisse ma main dans son boxer résonne dans tout mon corps pour venir se loger directement entre mes cuisses. J’empaume son sexe tendu, encore à l’étroit sous ses vêtements, alors que ses mains se crispent légèrement sur ma poitrine déjà sensible, me tirant un gémissement.
- C’est mieux en vrai que par téléphone, non ? me dit-il dans un sourire ravageur.
- Ça reste à prouver, j’attends la suite pour me décider, Monsieur Perret, osé-je, joueuse.
- La suite arrive, Madame l’éducatrice, me chuchote-t-il à l’oreille d’une voix suave avant de me couvrir le cou de bisous, provoquant des frissons à travers tout mon corps.
- J’adore ce genre de promesses, Monsieur Perret…
Ma main s’active lentement sous son boxer, caressant son membre autant qu’il est possible de le faire malgré le tissu. Si je m’écoutais, je me déshabillerais dans la seconde pour me laisser glisser sur sa hampe tendue. Je me contrôle pourtant, savourant cet instant sensuel et complice. Je finis par glisser le long de ses jambes et remonter son tee-shirt pour promener mes lèvres sur son torse, descendant lentement sur son ventre. Je fais le tour de son nombril tout en tirant sur son pantalon pour le descendre sur ses hanches et libérer cette érection qui me fait tant envie. Ma bouche parcourt son bas-ventre et je le vois retenir sa respiration lorsque mes lèvres viennent frôler son gland à plusieurs reprises. J’hésite à me lancer. Honnêtement, l’envie de lui faire ce plaisir me fait, à moi aussi, très envie, mais j’ai aussi l'irrépressible besoin de le sentir entre mes cuisses pour soulager cette tension qui a pris place.
Je finis par me lancer, faisant courir ma langue le long de sa hampe lentement alors qu’il inspire profondément et bruyamment. Je prends mon temps, jouant avec lui, à l'affût de ses réactions, promenant ma bouche, le goûtant, le titillant, sans jamais réellement le prendre entre mes lèvres. Quand, enfin, je le prends dans ma bouche, Julien jure dans sa barbe et je l’aperçois qui agrippe le drap dans ses poings. Il semblerait qu’il apprécie, ce qui me donne davantage confiance pour poursuivre. Il n’y a rien de mieux que de sentir qu’on est désirée, qu’on a, à cet instant, le pouvoir. Pour la première fois de ma vie, je ne vis pas une pipe comme une soumission, bien au contraire. Je pourrais le frustrer, en arrêtant mes mouvements comme à cet instant, où il grogne et me regarde en fronçant les sourcils, ou le surprendre, en accélérant brusquement la cadence, le faisant se crisper et gémir.
Je me soumets volontiers au moment où il m’interrompt.
- Albane stop, arrête, dit-il d’une voix rauque en se redressant, ce n’est pas dans cette jolie bouche que je veux jouir.
Julien m’attire contre lui et m’embrasse passionnément, tout en m’allongeant sur le lit, dans la même position que lui il y a quelques secondes. Il tire sur mon legging et me déshabille rapidement, ses gestes un peu hasardeux trahissant son désir, surtout lorsqu’il s’attelle aux boutons de mon chemisier. Je suis sûre qu’il crève d’envie de les arracher sans se soucier du fait que je puisse finir la journée à moitié nue, et j’avoue que j’aurais presque envie de vivre ce côté animal de l’instant. Il finit par sortir mes seins de leurs bonnets pour venir lécher chacun de mes tétons, les mordiller tout en s’installant entre mes cuisses.
Je ne peux retenir le gémissement qui s’échappe de mes lèvres lorsque sa main vient se poser sur mon intimité. Je suis au supplice, excitée comme jamais, avide de tout contact possible pour soulager la tension que j’ai moi-même fait naître dans mon corps, au contact du sien.
- Julien, s’il te plaît…
Les préliminaires ont assez duré, non ? Je suis plus que prête à l’accueillir, je n’attends que ça et ne veux plus attendre. Pourtant, Papa Ours prend le temps de glisser un doigt en moi, puis un second, et s’amuse à me titiller comme je l’ai fait quelques minutes plus tôt. J’ai moins de patience que lui et je finis par attraper son poignet et ronchonner.
- Bon sang, t’attends quoi ?
- Ben quoi ? me demande-t-il, un sourire goguenard sur le visage.
- Tu faisais moins le malin tout à l’heure, viens-en aux faits !
Il rit en s’allongeant sur moi et je sens son gland venir caresser ma fente trempée. Lorsqu’il se niche enfin en moi, nous poussons tous les deux un gémissement étouffé, rivant nos regards l’un à l’autre.
- Tu me rends fou, Albane…
Julien effectue quelques lents va et vient qui m’emportent déjà doucement sur la vague du plaisir. Il se fige pourtant brusquement, niché en moi.
- Quoi ? Un problème ?
- Ça a frappé, non ?
- Quoi ? Non, pitié dis-moi que non !
- Chuuut, dit-il en posant sa main sur ma bouche.
Merde, ça frappe bien à la porte. Je repousse Julien, prise de panique, et me lève pour me rhabiller en vitesse. Ok, si je pensais être frustrée et en manque, je crois qu’à cet instant, malgré la panique, je suis au summum de la frustration.
- Albane ? Albane, c’est Mathieu, t’es là ? entend-on derrière la porte.
- Habille-toi Julien, je t’en prie ! murmuré-je.
Julien bougonne et récupère ses affaires avec une lenteur étudiée. Il remet son pantalon et le laisse ouvert, une moue provocatrice sur le visage.
- Je suis là, Mathieu, crié-je, je finis avec Monsieur Perret, deux minutes !
- Tu es en retard pour ton rendez-vous.
- Merde, marmonné-je en me recoiffant comme je peux. Nom de dieu, Julien, fais un effort s’il te plaît, si Mathieu nous grille et en parle à Nicolas, c’en est fini du CHRS pour toi comme pour moi !
- Oui, oui, ça va Albane, détends-toi…
- Me dé… Bouge ton joli petit cul sinon je te jure que… Ah, tu m’énerves, sifflé-je entre mes dents.
- Viens-là…
Julien m’attrape par la taille et m’embrasse sauvagement tout en promenant ses mains sur mon fessier.
- Laisse-moi le temps de me calmer quand même, j’ai déjà envie de buter ton stagiaire, en plus de vouloir terminer ce qu’on a commencé.
- Laisse-le tranquille, et la prochaine fois, au lieu de t’amuser à me torturer, tu repenseras à ce moment et tu passeras à l’acte, et puis c’est tout !
- Dit-elle ! T’es pas mieux !
- Ok, je prends note, plus de pipe, dis-je en lui faisant un clin d'œil.
- La prochaine fois que nous sommes seuls, je te promets de te faire jouir avant même que tu n’aies le temps de me faire une pipe !
- J’ai vraiment hâte que tu tiennes cette promesse, Monsieur Perret. Je file, soupiré-je. Tu embrasseras Gabin et Sophie pour moi, je n’aurais pas le temps de repasser avant la fin de mon service. Et puis, il va me falloir une douche froide ou deux, là…
- Une douche froide, on la prend à deux ? me rétorque-t-il malicieusement.
- Ce serait à trois, y a un stagiaire derrière la porte. Pas dit que tu sois ok !
- Oui, va l’engueuler ton stagiaire. J’ai hâte de te revoir, Albane. Tu me manques déjà.
- Bientôt, j’espère…
Je l’embrasse rapidement et inspire profondément avant de sortir de la chambre, butant contre Mathieu. Jusqu’au bout, il m’aura collée aujourd’hui. Je le retiens, le Nicolas !
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