4 - Chuchotement
La fille chuchote dans le noir, comme tous les soirs depuis que nous avons emménagé dans cette maison. Mes parents ne l’entendent pas, pourtant ses chuchotis sont bien réels, je sens même son souffle froid dans mon oreille, chaque fois que j’essaie de dormir. La fille me rattrape pile quand les bras de Morphée me frôlent. Elle me veut pour elle toute seule, et chaque nuit je suis le témoin de ses confessions chuchotées.
Au matin, je suis épuisé et ça, mes parents le voient de plus en plus. Les journées de cours sont de plus en plus pénibles, et je doute pouvoir tenir le coup encore longtemps. La fille s’en moque bien, elle. Voilà longtemps qu’elle a oublié le concept de fatigue, qu’elle ne la ressent plus. Les morts ne savent pas se reposer. Alors, elle chuchote.
Pour sa défense, elle ne sait pas qu’elle est morte. Elle se doute encore moins qu’elle peut me tuer d’épuisement, la notion Temps lui a aussi échappé lorsqu’elle est passée de l’autre côté. Tout ce qu’elle sait, c’est qu’elle ne peut plus quitter la maison et qu’elle s’ennuie. Mon arrivée lui a donc fait très plaisir et elle a hâte que je revienne des cours. Elle aimerait que le jour ne se lève jamais, pour continuer à chuchoter à mon oreille.
Peut-être qu’au fond, elle se sait morte et qu’elle souhaite que je la rejoigne de l’autre côté. Ainsi, tous deux prisonniers de la maison et de la mort, nous n’aurions rien d’autre à faire que chuchoter dans le noir. Et je suis tellement à bout de forces que l’idée ne me paraît pas si affreuse…
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