12 - Marionnettes 

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De toutes ses créations, celles que le Sculpteur aimait le plus étaient ses marionnettes. Il en avait beaucoup. Trop, diraient ses proches et ceux qui lui rendaient visite dans la tour où il vivait et où, au sommet, se trouvait son atelier. Jamais assez, à ses yeux à lui. Elles étaient tout pour lui.

Il était seul, malgré son entourage. Personne pour le comprendre. Personne pour vraiment l’accepter. Il n’avait été qu’un outil pour eux, dès lors que ses pouvoirs magiques s’étaient éveillés. Il avait été envoyé parmi les mages, qui l’avaient formé à leur image et nié son mal-être en ces lieux, parmi ses petits camarades. Qu’importait qu’il ne se sentait pas à sa place parmi la communauté magique et qu’il peinait à assimiler les leçons. Ce n’était pas aux autres de s’adapter à lui et à sa sensibilité, mais à lui d’apprendre à la dure. Il n’avait pas eu le choix.

Sa seule source de joie en ces lieux fut sa rencontre avec Diala, une mage confirmée qui espérait pouvoir rejoindre le professorat malgré des méthodes plus douces qui ne semblaient pas plaire au corps enseignant beaucoup plus strict. Grâce à elle, le pauvre apprenti qui peinait à dompter sa magie tant il allait mal commença à se muer en Sculpteur, celui dont la magie ne lui résistait plus.

Il avait aimé Diala, qui l’avait aidé à trouver confiance en lui et à s’améliorer pendant ses études. Il était certain qu’une fois libéré de la communauté, Diala abandonnerait son rêve stupide de s’y installer en tant que professeure et qu’elle accepterait de vivre avec lui. La désillusion fut cruelle et suivit d’autres déceptions sentimentales. Voilà comment il en était venu à sculpter.

Toutes ses marionnettes comblaient le vide laissé par ceux qui avaient rejeté le Sculpteur, refusé de le suivre dans ses choix et de ne vouloir que lui dans leur vie. Toutes était à l’effigie d’un traître qui n’avait pas voulu de lui. Diala fut encore une fois la première : il avait serré son cou entre ses mains, et sa peau était devenue bois tandis que son corps s’était racorni jusqu’à prendre une taille de bambin.

Le Sculpteur n’avait pas vraiment souhaité cela, sa magie avait parlé pour lui, avait donné forme à un voeu qu’il ne s’était pas encore avoué. Il n’avait pas regretté pour autant. Il avait serré contre lui la marionnette et promis que plus jamais ils ne se quitteraient. Bien entendu, en tant que première poupée de bois, Diala n’était pas parfaite, il lui avait fallu plusieurs tentatives pour maîtriser ce sortilège.

Elle était donc encore capable de pleurer et il l’avait même surprise en train de bouger. Rien de bien dramatique : avec un peu de vernis pour protéger le bois des ravages lacrymaux et des ficelles pour la maintenir en place, Diala ne pouvait que se tenir tranquille.

Et que dire des autres ? Feria, Yarena, Tolino, Humia… Tant de noms, tant de personnes qui seraient toujours avec lui, à l’attendre sagement dans son atelier. Ils étaient parfaits et il les aimait. Comment pouvait-on donc lui reprocher d’avoir trop de compagnons de bois ? Le Sculpteur n’avait jamais assez d’amis.

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