23 - Sables du Temps
Si Damri devait désigner son bien le plus précieux, ce serait sans le moindre doute le minuscule sablier qu’il utilisait comme pendentif. Gamin, il l’avait trouvé parmi les innombrables babioles que son père avait obtenue grâce au troc, et l’avait subtilisé avec la spontanéité propre à son âge, sans penser à mal, seulement parce qu’il trouvait l’objet joli.
Il s’en était toujours félicité, quand bien même il était mal de voler, son propre père de surcroît. Il n’avait pas seulement jeté son dévolu sur un bijou. Empli de sable arraché à quelque Djinn imprudent, elle s’avérait une babiole magique bien pratique. On ne savait jamais quel pouvoir on pouvait tirer d’un Djinn, lorsqu’on survivait à une rencontre. Dans le cas de Damri, il s’agissait de Sables du Temps dont le pouvoir permettait de revenir en arrière.
Hélas, vu la quantité, il ne pouvait remonter bien loin et, au vu de la nature capricieuse de la créature dont le sable avait été tiré, la durée ne cessait de changer. Damri ne pouvait rien y faire : s’il pouvait user du sablier à foison, il n’avait aucun contrôle sur le Temps qui s’écoulait dans l’autre sens. Sa seule certitude était que cela n’excédait jamais une demie-journée.
C’était toutefois amplement suffisant pour ses maigres ambitions : effacer un litige, un flagrant délit et même des rencontres qu’il voulait éphémères. Il avait collectionné les conquêtes puis remonté le Temps, pour le seul plaisir d’avoir eu ce qu’il convoitait sans que la personne ne le sache car, pour elle, rien n’était arrivé. La satisfaction d’avoir un secret sulfureux plaisait beaucoup à Damri.
Jusqu’au jour où il fit la cour à une sublime femme qui s’avérait être le Djinn dont on avait volé le sable… et qui comptait bien récupérer ces fragments de magie qui lui appartenaient.
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