Chapitre 19
Gabriel et Elias avaient déjà franchi le cap des aveux. Les semaines précédentes avaient été marquées par des discussions sincères, des regards prolongés et des messages où les mots "je t’aime" flottaient doucement, comme une évidence. Malgré cela, chaque jour semblait leur apporter une nouvelle nuance à leur relation, une profondeur qu’ils n’avaient pas anticipée, une exploration constante de ce que cela signifiait d’être ensemble.
Gabriel, dans sa chambre, avait passé l’après-midi à dessiner. Son carnet était ouvert sur ses genoux, mais son esprit vagabondait ailleurs. Il fixait la ligne inachevée de son croquis quand son téléphone vibra doucement sur le bureau. Un message d’Elias.
Elias : Alors, qu’est-ce que tu fais ce soir ?
Gabriel : J’essaye de dessiner, mais je n’arrive à rien. Et toi ?
Elias : Pas grand-chose non plus. Peut-être que je pourrais venir t’inspirer ?
Gabriel esquissa un sourire, amusé mais conscient que chaque mot d’Elias portait une intention subtile.
Gabriel : Je doute que ta "présence inspirante" aide beaucoup.
Elias : Ça dépend. Tu veux essayer ?
La conversation continua sur ce ton léger jusqu’à ce qu’un nouveau message arrive, accompagné d’une photo. Gabriel cliqua dessus, et son souffle se coupa un instant. Elias, allongé sur son lit, souriait à la caméra, ses cheveux en bataille, son expression à la fois espiègle et naturelle.
Elias : Je parie que ça te fera sourire.
Et ça fonctionna. Gabriel sentit ses lèvres s’étirer malgré lui.
Gabriel : Ça marche à chaque fois. Insupportable.
Elias : Et toi, tu es beaucoup trop facile à séduire.
Gabriel, les joues légèrement rouges, posa son téléphone, pensant que la conversation s’arrêterait là. Mais quelques minutes plus tard, une autre notification le fit revenir à l’écran.
Cette fois, la photo était plus audacieuse : Elias se tenait dans le cadre de sa salle de bain, torse nu, ses cheveux encore humides. Une goutte d’eau perlait le long de son cou, descendant lentement sur son clavicule. Le jeu de lumière sur sa peau accentuait chaque détail, rendant l’image presque hypnotique.
Elias : Trop audacieux ? Ou juste ce qu’il faut ?
Gabriel sentit son cœur s’accélérer.
Gabriel : Elias… tu sais très bien ce que tu fais.
Elias répondit presque immédiatement.
Elias : Et toi, tu sais très bien ce que ça veut dire.
Gabriel posa son téléphone sur son lit, essayant de calmer son esprit. Mais les images d’Elias restaient gravées dans son esprit, et il ne pouvait ignorer l’effet qu’elles avaient sur lui. Il ferma les yeux, repassant chaque détail dans sa tête : le sourire confiant d’Elias, la courbe de ses muscles, la manière dont il semblait toujours savoir exactement quoi faire pour le troubler.
Il passa plusieurs minutes ainsi, perdu dans ses pensées, avant de se résoudre à répondre.
Gabriel : Tu vas me rendre fou.
Elias : Alors, mission accomplie. ;)
Gabriel se mordit la lèvre, mi-agacé, mi-amusé par la réponse. Elias avait un talent particulier pour tester ses limites, mais il ne pouvait pas nier qu’il aimait ça.
Le lendemain, alors que Gabriel tentait de se concentrer sur son travail, une nouvelle série de messages d’Elias arriva.
Elias : Alors, bien dormi ? Ou tu pensais encore à moi ?
Gabriel : Tu veux vraiment connaître la réponse ?
Elias : Seulement si elle est flatteuse.
Gabriel soupira, un sourire naissant sur ses lèvres.
Gabriel : T’étais dans ma tête, comme d’habitude. Content ?
Elias : Très.
Quelques minutes plus tard, un nouveau message arriva.
Elias : On devrait arrêter de parler par écran. Viens chez moi demain soir.
Gabriel : Pourquoi ?
Elias : Pour qu’on arrête de tourner autour du pot et qu’on passe du temps ensemble, pour de vrai.
Gabriel sentit une pointe de nervosité, mais aussi une excitation qu’il ne pouvait nier.
Gabriel : D’accord. Mais c’est toi qui fais à manger.
Elias : Avec plaisir. Et promis, je ne te distrairai pas… Enfin, j’essaierai.
Ce soir-là, Gabriel s’allongea sur son lit, repensant à leur conversation. Il savait que cette invitation marquait une nouvelle étape, un moment où ils pourraient se voir sous un jour encore plus intime, plus vulnérable.
Son téléphone vibra une dernière fois.
Elias : Tu me fais confiance, hein ?
Gabriel : Oui. Toujours.
Elias : Alors laisse-moi te montrer à quel point je tiens à toi.
Gabriel éteignit l’écran, un sourire flottant sur ses lèvres. Il savait qu’il n’était plus seul dans ce voyage, et cette certitude était tout ce dont il avait besoin pour avancer.
Le lendemain soir, Gabriel se tenait devant la porte d’Elias, le cœur un peu lourd sans savoir pourquoi. Les conversations récentes, les sous-entendus, les photos… Tout cela lui avait fait ressentir une proximité inédite avec Elias, mais il avait aussi l’impression qu’une ombre planait au-dessus d’eux.
Quand Elias ouvrit la porte, vêtu de son t-shirt noir habituel et d’un jean décontracté, son sourire éclatant sembla dissiper les doutes de Gabriel, au moins pour un instant.
— Hé, t’es pile à l’heure. J’aurais parié que tu serais en retard, plaisanta Elias.
— Pas aujourd’hui, répondit Gabriel avec un sourire timide en entrant.
Ils s’installèrent dans la cuisine, discutant autour d’un verre, comme si tout était parfaitement normal. Elias était de bonne humeur, racontant des anecdotes sur sa journée, et Gabriel se laissait porter par l’atmosphère légère.
Mais lorsqu’Elias se rapprocha, posant doucement une main sur son épaule, Gabriel remarqua une marque sombre sur le cou de son ami. Son cœur se serra instinctivement.
— C’est quoi, ça ? demanda-t-il, pointant du doigt l’endroit exact.
Elias recula légèrement, surpris par la question.
— Hein ? Quoi ?
Gabriel insista, mimant la zone sur son propre cou.
— Là. On dirait… un suçon.
Elias tenta un sourire, mais son expression se crispa légèrement.
— Oh… ça ? Ce n’est rien, répondit-il avec une nonchalance feinte.
Mais Gabriel, sentant l’embarras d’Elias, fronça les sourcils.
— Elias… c’est quoi ? Ou plutôt… c’est qui ? demanda-t-il, son ton devenant plus sérieux.
Elias soupira, visiblement mal à l’aise, avant de murmurer :
— Gaby… ce n’est pas ce que tu crois.
— Alors dis-moi ce que c’est, répliqua Gabriel, croisant les bras sur sa poitrine.
Elias hésita un instant avant de baisser les yeux.
— C’était Camille.
Le prénom sembla résonner dans l’air comme un coup de tonnerre. Gabriel sentit son cœur se serrer, et son souffle devint plus court.
— Camille ? répéta-t-il, incrédule. C’est Camille qui t’a fait ça ?
Elias acquiesça doucement, incapable de regarder Gabriel dans les yeux.
— Oui… mais ce n’est pas ce que tu crois. On était bourrés, tous les deux, et… elle s’est un peu approchée. Mais je l’ai repoussée, Gaby. Ça n’a pas été plus loin. Je te le jure.
Les mots d’Elias semblaient sincères, mais pour Gabriel, ils n’étaient pas suffisants.
— Tu l’as laissée te toucher, lâcha-t-il, la voix tremblante.
Elias se redressa, tentant de calmer la situation.
— Ce n’était rien, Gaby. Rien du tout. Je n’ai aucun sentiment pour elle, et je n’en ai jamais eu.
Mais Gabriel secoua la tête, son visage rouge de colère et de douleur.
— Et tu t’attendais à ce que je le découvre comme ça ? Que je sois juste… d’accord avec ça ?
— Je te le dis parce que je veux être honnête avec toi, répondit Elias. Ça n’a pas de sens de te cacher quoi que ce soit.
— Être honnête ? s’écria Gabriel, levant les mains. Tu crois que ça change quoi, Elias ? Ça ne devrait même pas être arrivé !
Elias voulut s’approcher, mais Gabriel recula instinctivement.
— Gaby, écoute-moi…
— Non, Elias. Pas ce soir, lâcha Gabriel, la voix brisée.
Sans un mot de plus, Gabriel se retourna et sortit en trombe de l’appartement, laissant Elias seul dans la cuisine. Une partie de lui voulait rester, entendre plus d’explications, mais une autre, plus forte, ne pouvait supporter l’idée de Camille.
Il marcha rapidement dans la rue, les mains tremblantes, les larmes brûlant ses yeux. Ses pensées tournaient en boucle : Pourquoi ? Pourquoi avait-il laissé ça arriver ?
Il savait qu’Elias tenait à lui, il le savait… Mais cette marque sur son cou représentait une trahison qu’il ne pouvait ignorer, même si elle n’était que partielle.
Quand il arriva chez lui, il monta directement dans sa chambre et s’assit sur son lit, le visage enfoui dans ses mains. Il n’était pas en colère seulement contre Elias, mais aussi contre lui-même, pour les attentes qu’il avait placées en lui, pour cette confiance fragile qu’il avait construite.
Cette nuit-là, Gabriel resta éveillé, partagé entre l’amour qu’il portait à Elias et la douleur de ce qu’il avait découvert.
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