Chapitre 28
Chapitre 33 : Une sortie sous tension
Le soleil éclatant baignait la plage d’une lumière dorée, et l’odeur salée de la mer emplissait l’air. Gabriel avait insisté pour qu’Elias vienne, malgré ses hésitations. Assis sous un parasol, il écoutait les vagues qui s’écrasaient doucement sur le rivage, un léger sourire sur le visage.
— Ça va ? demanda Gabriel en s’accroupissant près de lui, une serviette sur l’épaule.
— Oui, répondit Elias avec un sourire léger. C’est agréable d’entendre l’océan…
Le reste du groupe était déjà installé. Sofia et Léon discutaient près de l’eau, tandis qu’Amara et Camille déballaient les snacks sur une nappe colorée. L’ambiance semblait légère, mais une tension sous-jacente était palpable pour Elias, qui percevait les changements subtils dans les voix autour de lui.
Une fracture inattendue
La conversation vira rapidement vers des souvenirs communs. Léon, fidèle à lui-même, racontait une anecdote sur une escapade hilarante où ils avaient tenté de faire du paddle, déclenchant les rires du groupe.
— Tu te souviens, Gaby, comme Elias avait peur de tomber ? lança Léon en riant.
Gabriel, assis à côté d’Elias, sourit doucement.
— Oui, mais il avait fini par essayer et s’en était plutôt bien sorti, répondit-il.
— Je ne pense pas que ce soit encore son genre d’activité, maintenant, murmura Léon, pensant que personne ne l’entendrait.
Elias tourna la tête dans sa direction, son visage se fermant légèrement.
— Qu’est-ce que tu veux dire, Léon ? demanda-t-il, sa voix calme mais trahissant une pointe de tension.
Léon hésita, pris au dépourvu.
— Je veux dire… avec ta situation actuelle, ce serait compliqué, répondit-il maladroitement.
Le silence qui suivit fut pesant, brisé seulement par le bruit des vagues. Gabriel, sentant la colère monter chez Elias, intervint.
— Sa situation ne l’empêche pas de vivre, Léon. Tu devrais réfléchir avant de parler.
Amara, visiblement mal à l’aise, tenta de changer de sujet, mais Elias la coupa.
— Non, laissez-le finir, dit Elias, son ton plus dur qu’il ne l’avait prévu.
L’éclat de colère
Léon soupira, levant les mains en signe de reddition.
— D’accord, je vais être honnête. Je trouve que tout le monde ici fait comme si de rien n’était, mais ça change des choses, Elias. Et c’est normal. On ne peut pas faire semblant que tout est pareil, dit-il, sa voix se durcissant.
— Et alors ? Tu veux que je m’excuse d’être aveugle ? cracha Elias, se levant brusquement, aidé par Gabriel.
— Ce n’est pas ce que je veux dire, répondit Léon, visiblement agacé. Mais on ne peut pas prétendre que ce n’est pas compliqué pour tout le monde.
Gabriel, serrant les poings, s’interposa.
— Si c’est compliqué pour toi, alors tu peux partir, Léon. Parce qu’Elias n’a pas besoin de ça.
— Oh, et toi, tu es parfait dans ton rôle de héros ? Toujours à le protéger comme si c’était un enfant ? lança Léon, sa voix montant d’un cran.
Elias sentit son cœur s’alourdir, la colère et la douleur se mélangeant.
— C’est toi qui as un problème, Léon, murmura-t-il d’une voix brisée. Pas moi.
Une incompréhension générale
Le reste du groupe resta silencieux, visiblement gêné. Sofia, pourtant habituellement volubile, semblait chercher les mots justes pour intervenir, mais Camille fut la première à parler.
— Léon, tu vas trop loin, dit-elle fermement.
Amara, assise en retrait, regarda Elias avec une expression pleine de regret.
— Léon, arrête. Ce n’est pas juste ce que tu dis, murmura-t-elle.
Léon, conscient qu’il avait dépassé les bornes, se passa une main dans les cheveux, visiblement frustré.
— Je suis désolé, d’accord ? Je… je ne voulais pas que ça sorte comme ça, dit-il, mais son ton manquait de conviction.
Elias, les lèvres tremblantes, secoua doucement la tête.
— Tu crois que des excuses suffisent ? Tu ne comprends rien, Léon. Tu ne comprends pas ce que c’est de perdre quelque chose d’aussi fondamental, dit-il, sa voix pleine d’émotion.
Gabriel posa une main réconfortante sur son épaule, mais Elias recula légèrement, préférant garder sa distance.
Un départ précipité
La tension était devenue insoutenable. Elias, sentant qu’il ne pouvait plus rester, murmura à Gabriel :
— Je veux rentrer. Maintenant.
Gabriel hocha la tête, lançant un regard furieux à Léon avant de prendre le sac d’Elias et de le guider doucement vers le chemin du retour.
Sofia, visiblement bouleversée, se tourna vers Léon.
— Sérieusement, Léon ? Tu ne pouvais pas garder ça pour toi ?
Léon baissa la tête, mais ne répondit rien.
Amara, quant à elle, murmura un faible « désolé » en direction de Gabriel, qui ne prit même pas la peine de répondre.
De retour chez Gabriel, le silence était lourd. Elias s’assit sur le canapé, son visage fermé. Gabriel, après un instant d’hésitation, s’assit à côté de lui.
— Je suis désolé pour tout ça, Elias, murmura-t-il.
— Ce n’est pas ta faute, répondit Elias, mais sa voix semblait distante.
Gabriel prit doucement sa main, entrelaçant leurs doigts.
— Je suis là. Peu importe ce qu’ils disent ou pensent, je suis là, dit-il doucement.
Elias hocha la tête, mais une larme silencieuse glissa sur sa joue.
— Merci, Gaby, murmura-t-il.
Ce soir-là, bien que les blessures de la journée fussent encore fraîches, Gabriel fit tout pour rappeler à Elias qu’il n’était pas seul.
La nuit était tombé, plongeant l’appartement dans une douce obscurité, seulement brisée par la lumière tamisée d’une lampe de chevet. Elias, assis sur le canapé, les jambes repliées sous lui, jouait distraitement avec le coin d’un plaid. Depuis qu’il avait perdu la vue, les récits racontés par Gabriel étaient devenus un refuge, un moment de tranquillité où il pouvait s’évader sans effort.
— Gaby, murmura-t-il doucement, est-ce que tu peux me lire la suite ?
Gabriel, déjà installé dans le fauteuil à côté, hocha la tête avec un sourire. Il tendit la main pour attraper le livre posé sur la table basse. C’était un roman qu’ils avaient choisi ensemble il y a quelques jours, l’histoire captivante les transportant chaque soir dans un autre univers.
— Bien sûr. Où en étions-nous ? Ah, le début du chapitre cinq, répondit-il en feuilletant les pages avec précaution.
La voix de Gabriel, douce et posée, emplit la pièce alors qu’il commençait à lire. Chaque mot semblait s’élever dans l’air comme une mélodie, captivant Elias. Les descriptions vibrantes, les dialogues dynamiques, tout prenait vie dans l’esprit d’Elias, qui s’accrochait à chaque phrase comme à une bouée dans un océan d’obscurité.
Gabriel marquait parfois une pause, relevant les yeux pour vérifier l’expression d’Elias. Celui-ci, bien qu’incapable de voir, semblait absorber chaque mot avec intensité, ses lèvres s’étirant en un léger sourire lorsque l’histoire devenait légère ou amusante.
— Tu lis ça tellement bien, murmura Elias, presque pour lui-même.
Gabriel sourit en coin.
— C’est peut-être parce que je sais que tu m’écoutes attentivement, répondit-il doucement avant de continuer sa lecture.
Après avoir terminé le cinquième chapitre, Gabriel referma le livre avec précaution et le posa sur la table basse. Elias poussa un soupir satisfait, sa tête reposant maintenant contre l’accoudoir du canapé.
— C’était parfait. Merci, Gaby, murmura-t-il, sa voix emplie de gratitude.
Gabriel se leva doucement et tendit une main vers Elias, lui signalant qu’il était temps d’aller se coucher.
— Allez, viens. Tu vas finir par t’endormir ici sinon, dit-il avec un sourire amusé.
Elias accepta son aide, se levant avec précaution. Ensemble, ils se dirigèrent vers la chambre, où le lit partagé les attendait, symbole de la proximité qui les avait unis encore davantage ces derniers jours.
Allongés côte à côte, le silence de la nuit les enveloppant, Elias murmura doucement :
— Je pourrais t’écouter lire toute ma vie. Ça rend tout plus… lumineux, même si je ne vois rien.
Gabriel, touché par ses mots, se rapprocha légèrement, posant une main sur celle d’Elias.
— Alors je continuerai. Aussi longtemps que tu voudras, dit-il doucement.
Elias, apaisé par cette promesse, ferma les yeux, se laissant porter par la chaleur réconfortante de Gabriel à ses côtés. Et comme les trois nuits précédentes, ils s’endormirent ensemble, trouvant dans ce rituel une sérénité qu’ils ne voulaient plus abandonner.
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