Chapitre 31
La nuit était calme, bercée par le doux murmure du vent qui jouait avec les feuilles des arbres. Gabriel, assis sur le rebord de la fenêtre de sa chambre, laissait son regard errer dans le ciel dégagé. Les étoiles brillaient avec une intensité rare, des milliers de points lumineux sur une toile d’encre. Ce spectacle avait toujours eu le pouvoir de l’apaiser, mais ce soir, il ne parvenait pas à calmer son esprit.
Il repensa à la journée qu’ils avaient passée. Elias, malgré ses efforts, avait montré des signes de découragement. Son sourire avait semblé plus forcé, ses mots plus pesants. Gabriel pouvait sentir cette douleur invisible qui s’infiltrait dans chaque geste de son compagnon, et cela le rendait impuissant.
C’est alors qu’une lumière vive traversa le ciel, rapide et éclatante. Une étoile filante. Gabriel inspira profondément, son cœur s’accélérant. Il n’avait jamais été très religieux, mais dans ce moment précis, il sentit un élan qu’il ne pouvait ignorer.
— Si quelqu’un écoute… n’importe qui, murmura-t-il, sa voix tremblante. S’il vous plaît, aidez Elias. Donnez-lui une chance de retrouver ce qu’il a perdu.
Il ferma les yeux, ses mains se rejoignant dans une prière instinctive.
— Je ne sais pas à qui m’adresser, alors je vous parle à tous. Je suis prêt à faire n’importe quoi pour qu’il aille mieux, continua-t-il, ses mots s’échappant comme une supplication.
Le silence de la nuit l’entoura, seulement troublé par le bruissement des arbres. Gabriel resta immobile, les yeux fermés, espérant que son vœu atteigne quelqu’un ou quelque chose. Mais cette paix fut brisée par le vibreur de son téléphone posé à côté de lui.
Gabriel décrocha rapidement, son cœur battant encore à cause de la prière.
— Gaby ? murmura la voix d’Elias de l’autre côté de la ligne, légèrement rauque et endormie. Tu pourrais m’apporter un verre d’eau, s’il te plaît ?
Gabriel sourit légèrement, déjà debout pour répondre à sa demande.
— Bien sûr. J’arrive tout de suite, dit-il doucement.
En se levant précipitamment, il bouscula une pile de DVD sur son bureau. L’un d’eux glissa et tomba au sol avec un bruit sourd. Gabriel jura à mi-voix en ramassant rapidement le disque tombé.
De l’autre côté du téléphone, Elias, qui avait tout entendu, réagit avec une pointe d’amertume.
— Tout ça pour un film… Et dire que je ne pourrais plus jamais en regarder. Désolé d’être un poids, murmura-t-il.
Ces mots, bien que prononcés doucement, frappèrent Gabriel comme un coup de poignard. Il resta figé un instant, tenant toujours le DVD dans sa main, avant de répondre.
— Elias, ne dis pas ça, répondit-il, sa voix pleine de douceur mais aussi de fermeté.
Gabriel se précipita dans la chambre d’Elias, un verre d’eau à la main. Elias était assis sur le bord du lit, les mains croisées sur ses genoux, le visage tourné vers le sol.
— Elias, écoute-moi, dit Gabriel en s’agenouillant devant lui.
Elias releva légèrement la tête, bien qu’il ne puisse pas voir l’expression inquiète de Gabriel.
— Tu n’es pas un poids. Arrête de penser ça, insista Gabriel.
Elias secoua doucement la tête, son visage exprimant une douleur qu’il peinait à dissimuler.
— Mais c’est la vérité, Gaby. Depuis l’accident, tu fais tout pour moi. Je suis incapable de faire quoi que ce soit sans ton aide. Je te ralentis, avoua-t-il, sa voix se brisant sur les derniers mots.
Gabriel posa le verre sur la table de chevet avant de prendre doucement les mains d’Elias dans les siennes.
— Tu ne me ralentis pas, Elias. Ce qu’on traverse, on le traverse ensemble. C’est ça être une équipe. Et je ne fais pas tout ça parce que je me sens obligé, mais parce que je le veux. Parce que je t’aime, dit-il, sa voix remplie de sincérité.
Elias resta silencieux un moment, ses doigts serrant légèrement ceux de Gabriel.
— Je t’entends, Gaby. Mais c’est dur de croire que ça ne te pèse pas parfois, murmura-t-il.
— Bien sûr que c’est dur parfois, avoua Gabriel. Mais ce n’est pas à cause de toi. C’est à cause de ce qui t’est arrivé, parce que je voudrais pouvoir te soulager de tout ça. Mais Elias, tu n’es pas une charge. Tu es ma priorité.
Elias sentit ses lèvres trembler, une larme solitaire roulant sur sa joue.
— Merci… Merci de rester, murmura-t-il, sa voix pleine d’émotion.
Gabriel se redressa et posa une main sur son épaule, lui offrant un sourire qu’Elias ne pouvait voir mais qu’il pouvait sentir.
— Toujours, Elias. Je suis là, et je ne vais nulle part.
Gabriel tendit finalement le verre d’eau à Elias, qui le prit avec hésitation. Il but une gorgée, puis posa le verre sur la table à côté de lui.
— Tu sais, je ne pense pas que je te le dis assez, mais je t’aime aussi, murmura Elias, presque timidement.
Gabriel rit doucement, posant une main sur la tête d’Elias pour ébouriffer ses cheveux.
— Tu me le dis suffisamment. Mais si tu veux me le répéter, je ne dirai pas non, répondit-il en plaisantant, allégeant l’atmosphère.
Elias esquissa un sourire sincère, l’un des rares depuis des jours.
Alors qu’Elias s’allongeait à nouveau, Gabriel resta à ses côtés quelques instants, veillant sur lui. Il repensa à l’étoile filante et à la prière qu’il avait formulée, se demandant si quelqu’un, quelque part, l’avait entendue.
Dans le silence de la nuit, un sentiment étrange mais apaisant l’envahit. Peu importe les réponses, il savait qu’il ferait tout pour qu’Elias se sente aimé, soutenu, et jamais seul.
Quand il retourna dans sa propre chambre, Gabriel regarda une dernière fois les étoiles, un sourire léger sur les lèvres.
— Je ne sais pas si vous m’avez entendu, mais merci de me donner la force, murmura-t-il avant de se coucher.
La nuit était profonde, silencieuse, jusqu’à ce que des bruits étouffés brisent la quiétude. Gabriel, à demi réveillé, entendit un faible gémissement provenant de la chambre d’Elias. Il se précipita immédiatement, trouvant Elias assis sur son lit, le souffle court et le visage baigné de larmes. Lorsque Gabriel entra, Elias leva la tête, son expression dévastée.
— Gaby… murmura-t-il avant de se jeter dans ses bras, ses mains tremblant légèrement.
Il serra Gabriel comme si sa vie en dépendait, enfouissant son visage dans son épaule.
— J’ai rêvé que je te perdais… pour toujours, sanglota Elias, sa voix brisée par l’émotion.
Il se recula légèrement pour attraper les mains de Gabriel, les embrassant doucement, presque désespérément, comme pour s’ancrer à la réalité.
— Tu étais parti, et je ne pouvais rien faire pour te ramener, murmura-t-il, les larmes continuant de couler.
Gabriel, le cœur serré, posa une main sur la joue d’Elias pour essuyer ses larmes, avant de se pencher pour l’embrasser tendrement.
— Elias, je suis là. Je suis là, et je ne partirai jamais, murmura-t-il contre ses lèvres, comme une promesse gravée dans le marbre.
Elias hocha faiblement la tête, se laissant envelopper dans les bras rassurants de Gabriel, son souffle s’apaisant peu à peu. Dans cette étreinte, il trouva une sérénité qu’aucun cauchemar ne pouvait lui voler.
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