Chapitre 33
Elias n’avait pas cessé de parler du saut en parachute depuis leur retour. Chaque détail semblait gravé dans sa mémoire, et il le racontait avec une passion que Gabriel n’avait pas vue depuis longtemps.
— Et tu sais quoi, Gaby ? Le moment où j’ai senti le vent sur mon visage… c’était comme si j’étais enfin libre. Comme si tout le poids de ces derniers mois s’était envolé, dit Elias, un sourire radieux éclairant son visage.
Gabriel, assis en tailleur sur le canapé, l’écoutait avec une attention amusée. Le voir aussi animé lui réchauffait le cœur.
— Je suis content que ça t’ait plu, répondit-il avec sincérité.
— Plu ? Ce n’est même pas le mot. C’était magique, répondit Elias en riant doucement.
Pour Gabriel, ce sourire, cette lumière retrouvée dans les yeux d’Elias, valaient tout l’or du monde. Mais il savait aussi que cette euphorie ne suffirait pas à effacer les défis qu’Elias continuait de surmonter chaque jour.
Plus tard, lorsque la maison s’était calmée, Gabriel, seul dans sa chambre, scrollait distraitement sur son téléphone. Il cherchait une nouvelle idée pour surprendre Elias, quelque chose qui pourrait lui apporter un peu plus de bonheur, mais aussi une forme d’autonomie qu’il avait perdue.
C’est alors qu’une publicité attira son attention : "Lunettes intelligentes pour aveugles – une révolution dans l’autonomie."
Curieux, Gabriel cliqua sur le lien. Les lunettes étaient dotées d’une intelligence artificielle capable de prévenir leur porteur des obstacles, de lire des textes à haute voix, et même de reconnaître des visages.
— C’est exactement ce qu’il lui faut, murmura Gabriel pour lui-même, son esprit déjà en ébullition.
Mais son enthousiasme se heurta rapidement à une réalité : le prix. Les lunettes coûtaient une somme astronomique, bien au-delà de ce qu’il pouvait se permettre seul.
Gabriel passa une main dans ses cheveux, réfléchissant à toute vitesse. Puis une idée lui vint. Il décrocha son téléphone et appela la seule personne qui pourrait l’aider.
La voix de la mère d’Elias résonna à travers le combiné, un mélange de surprise et de méfiance.
— Gabriel ? Que puis-je faire pour toi ? demanda-t-elle, sa voix teintée d’hésitation.
Gabriel inspira profondément.
— Bonjour, madame. Je sais que les choses sont tendues entre vous et Elias en ce moment, mais j’ai une idée qui pourrait vraiment l’aider. Et… j’aurais besoin de votre aide, dit-il d’un ton sérieux.
Il expliqua rapidement le concept des lunettes, insistant sur le fait qu’elles pourraient changer la vie d’Elias.
— C’est quelque chose qu’il mérite vraiment. Je sais que ça ne réparera pas tout, mais ça pourrait être un début, ajouta-t-il.
Un silence se fit à l’autre bout du fil, puis la mère d’Elias répondit, sa voix empreinte d’émotion.
— Je veux faire ça pour lui. Si ça peut l’aider… alors oui, je participerai, dit-elle.
Gabriel sentit un poids se lever de ses épaules.
— Merci. Vraiment, merci, répondit-il sincèrement.
Le lendemain, Gabriel passa la commande en ligne, utilisant à la fois ses économies et la contribution de la mère d’Elias. Il vérifia chaque détail avec minutie, s’assurant que tout était parfait. Les lunettes arriveraient dans deux jours.
Il décida de garder la surprise pour Elias, se retenant à grand-peine de lui en parler. Chaque fois qu’il voyait Elias sourire ou rire, il imaginait à quel point ces lunettes pourraient transformer son quotidien.
— Deux jours, murmura-t-il pour lui-même, un mélange d’excitation et d’impatience dans la voix.
Les journées qui suivirent furent remplies de conversations légères et de moments complices entre Elias et Gabriel. Bien qu’Elias continue de parler du saut en parachute, Gabriel remarqua qu’il avait parfois du mal à cacher son envie d’être plus autonome.
— Je me suis cogné encore une fois dans la cuisine, hier. Je suppose que ça devient ma spécialité, plaisanta Elias un soir.
Gabriel rit doucement, bien qu’il sente un léger pincement au cœur.
— Tu devrais te ménager, répondit-il en posant une main rassurante sur l’épaule d’Elias.
Elias haussa les épaules.
— Ça va, je m’y habitue. Mais parfois, j’aimerais juste pouvoir me débrouiller sans avoir à te demander ou à chercher à tâtons, avoua-t-il doucement.
Gabriel sourit, bien qu’il se retienne de révéler la surprise.
— Ne t’inquiète pas. Les choses peuvent toujours changer, dit-il mystérieusement.
Elias fronça légèrement les sourcils mais n’insista pas, interprétant cela comme une simple tentative d’encouragement.
La nuit précédant l’arrivée des lunettes, Gabriel resta éveillé plus longtemps que d’habitude, assis sur son lit avec une liste de tout ce qu’il espérait accomplir pour Elias.
— Tu vas être tellement heureux, murmura-t-il, fixant la boîte de réception sur son téléphone pour vérifier que tout était en ordre.
Il s’imaginait déjà la réaction d’Elias lorsqu’il ouvrirait le paquet, l’excitation dans sa voix lorsqu’il réaliserait ce que c’était. Gabriel savait que ce n’était qu’un objet, mais pour Elias, cela pourrait être un nouveau départ.
Avec ce cadeau, il voulait offrir à Elias non seulement plus d’autonomie, mais aussi une preuve tangible qu’il croyait en lui, en sa capacité à continuer d’avancer et à s’épanouir.
Dans deux jours, leur quotidien serait peut-être différent. Et Gabriel, le cœur rempli d’espoir, était prêt à tout pour que cela devienne une réalité.
Le lendemain, alors qu’ils sirotaient des cafés en terrasse, Gabriel décida de confier son projet à Sofia. Le soleil brillait doucement, et l’air frais du matin rendait l’atmosphère légère, mais Gabriel semblait légèrement nerveux.
— Sofia, je dois te parler de quelque chose, murmura-t-il, jouant distraitement avec le rebord de sa tasse.
Sofia, curieuse, posa son téléphone et le regarda attentivement.
— Je t’écoute. Qu’est-ce qui se passe ? Tu as l’air préoccupé, répondit-elle.
Gabriel prit une profonde inspiration avant de tout lui expliquer : les lunettes, le prix, l’aide de la mère d’Elias, et surtout son espoir de rendre la vie d’Elias plus facile et plus joyeuse.
— Ces lunettes, Sofia… Elles pourraient vraiment changer les choses pour lui. Il pourrait se déplacer sans moi, être plus indépendant. Mais je t’avoue que j’ai peur que ça ne fonctionne pas comme prévu. Et, franchement, j’ai dépensé presque toutes mes économies, avoua-t-il, un mélange de fierté et d’anxiété dans la voix.
Sofia hocha la tête, un sourire doux étirant ses lèvres.
— Gabriel, c’est incroyable ce que tu fais pour lui. Elias a de la chance de t’avoir. Et même si ça ne change pas tout, rien que le fait que tu fasses ça prouve à quel point tu tiens à lui, dit-elle, posant une main rassurante sur son bras.
Gabriel esquissa un sourire, soulagé par ses mots.
— Merci, Sofia. J’avais besoin de l’entendre, murmura-t-il.
Sofia, toujours pragmatique, ajouta en plaisantant :
— Et si ça marche, je veux être la première à voir sa tête quand il les essaiera. Promis ?
Gabriel éclata de rire, le poids de ses inquiétudes s’allégeant légèrement.
— Promis, répondit-il, déjà impatient de voir le sourire sur le visage d’Elias.
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