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La pluie cessa sans que les cheveux ne se défigent. Trysol envoya une œillade à Analoum, constata qu’elle utilisait encore son flaire. Elle finirait par le regretter.

À peine le pensa-t-elle, que la brune glissa et disparut sous l’eau. Quand au bout de quelques secondes, elle ne la vit pas remonter, elle cria à Suan d’attendre et plongea rejoindre son acolyte.

L’eau était si trouble qu’elle remonta aussitôt, agitant ses bras sous le liquide pour y trouver Analoum. Manque de bol, c’est en ripant sur une masse lourde et dur qu’elle comprit que son amie était sous ses pieds.

— Merde ! siffla-t-elle, en se laissant couler pour la rejoindre. Aveugle, Trysol utilisa ses mains et les passa sous les aisselles de sa complice. Elle souleva le corps de la brune qui était tombait inconsciente et la tracta maladroitement, alors que des herbes se cramponnaient à ses cuisses.

— C’est pas vrai ! râla-t-elle

Suan quitta le brouillard qui colonisait ses pensées depuis le matin et se tourna vers elle. Trysol eut toutes les peines du monde à appeler à l’aide. Son égo venait d’en prendre un coup alors qu’elle n’avait pas bougé les lèvres. Son regard avait dû être clair parce que Suan détacha une longue corde qu’il avait trouvé sur le chemin et enroulait autour de son buste. Il la noua aux extrémité des queues de Tartanne qui d’un mouvement circulaire l’envoya dans sa direction. D’abord réticente, Trysol refusa avec dans l’idée que la poisse était la cause de leur infortune à patauger dans la boue et l’eau, puis elle se rendit vite à l’évidence, mieux valait-il être tracté par la malchance que prendre racine. Analoum pesait son poids et la fatigue de leur nuit torride aurait eu raison d’elle. Trysol lâcha un long soupir. Il était trop tard pour abandonner. De toute façon, elle n’avait plus grand-chose à perdre mis à par les deux garçons de neuf ans qui l’attendait au campement gardait par les sœurs d’Analoum. Peut-être aurait-il mieux valu les tuer avant de partir… Si elle ne revenait pas, qui sait ce qu’ils les attendaient dans le futur. Traqués ou utilisés. Disons le bien, pensa-t-elle, violés. Le doute à parvenir jusqu’à l’être démoniaque qui habitait les lieux battait au rythme d’une négativité qu’elle avait toujours nourri. Il était bien trop tard pour arrêter, et au fond, même si c’est la mort qui l’attendait, elle l’acceptait. Venir ici, avait été une volonté égoïste de récupérer son frère, maintenant qu’elle le savait mort, elle avait la ferme résolution d’au moins sauver d’autres gamins. Suan était la clé de leur victoire quelle qu’elle soit. Même si c’était jeter un caillou dans un lac pour ériger une ile en son milieu, ça valait la peine de se sacrifier. Fuir lui pesait trop. Depuis le début, elle savait que c’était un chemin sans retour, un suicide avec qui elle composait.

La corde en main, Trysol se laissa tirer par le matou ne manquant pas de boire une bonne dizaine de fois la tasse avant d’arriver au pied de la minuscule colline où le palais se nichait. Analoum n’avait pas recouvrait ses esprits et la portait avait été rude. Trysol se hissa lamentablement, les pièges sous l’eau avait fait ployer ses genoux qui tremblaient encore enfin libérés du liquide gelé. Hors de question de monter sur Tartanne et de mourir connement avant d’avoir vu ce que cachaient le mur grandiose du palais. Chaque pierre portait un motif différent qui représentait ensemble le dessin d’un singe, d’un ours et d’une oie. Les trois animaux des armoiries royal. Le singe, pour l’intelligence et la ruse de bon cœur. L’ours, pour la puissance et le soutient des efforts, des valeurs. L’oie, pour le travail et l’endurance. À l’heure où elle les regardait, que représentaient-ils ? Les mèches suspendues indiquaient combien leur symbolique n’avait plus de valeurs. Le mal, l’égoïsme, l’avarice et la concupiscence avait tout réduit à une malédiction sur le royaume des lianes. Si le dernier roi n’avait pas été un ogre affamé par le plaisir sexuel, peut-être que rien de tout ça n’aurait vu le jour.

Trysol tira Analoum jusqu’à un roché tout en évitant les cheveux que Tartanne enjambés sans le moindre mal, mais qu’elle devait contourner. La main sur le visage de la brune, elle analysa le temps qu’elle mettrait à se réveiller. Une heure tout au plus.

— Suan, lança-t-elle. Demande à ta sœur de commencer les recherches.

— Tu peux le lui dire toi-même. Xin-Shen entent très bien ta voix.

— Comment serais-je qu’elle m’entends, Abruti.

Suan roula les yeux sans toutefois répliquer. Il avait changé ou bien il était fatigué de se chamailler avec elle. Trysol opta cependant pour la première possibilité. Le voyageur lui paraissait de plus en plus serein, comme s’il composait avec l’univers, qu’il acceptait la charge qu’on lui ordonnait de porter. Pourquoi ne se rebêlait-il pas ? Elle commençait à le voir autrement. Il avait sa place dans leur quête plus qu’aucune d’elle. Dans son cœur, Trysol aurait accepté de le remercier, mais son orgueil était encore trop puissant pour se laisser attendrir. Puis, elle n’oubliait pas qu’il était un Hàng Xiè et qu’il montait un Akota à trois queues. Au final, il aurait été judicieux de le laisser et de partir sans lui, de le laisser se faire dévorer par les ondines dans le lac des morts.

— Elle est où ? demanda-t-elle en soupirant.

— Plantée devant toi. Elle regarde Analoum et elle pense que tu devrais retirer ta main de son nez avant de l’étouffer, répondit sur un ton monocorde Suan.

Il se détourna d’elle, fourrageant ses doigts dans le poil de Tartanne. Ces deux-là avaient déjà retissé leur lien. Leur appartenance l’un envers l’autre progressait à une vitesse qu’elle ne serait pas étonnée qu’ils communiquent déjà d’esprit à esprit.

Trysol glissa une œillade à Analoum endormi. D’un vif mouvement, elle retira sa main du visage de la brune. Mince ! j’étais vraiment en train de l’étouffer. Pourquoi n’avait-elle pas remarqué ? Commencerait-elle à perdre la tête comme ses parents des années plutôt ? Leur folie flotta un instant dans sa tête. Combien de fois avaient-ils failli les tuer, elle et ses frères ? Maintenant, alors qu’elle observait la capitale, elle voulait bien comprendre leur action. Qu’est-ce que ce monde leur promettait que la peur, le conflit et les pires bassesses ?

Ils étaient trois, quarte avec le fantôme et cinq avec le chat. Leur groupe ne ressemblait à aucun autre connu. Ils se hissaient à l’aveuglette depuis le début, alors quoi attendre de toute cette affaire ? Trysol n’en savait rien. Elle suivait les aspirations d’Analoum parce qu’elle avait perdues les siennes.

Le regard sur le vide, là où Suan avait pointé son doigt, Trysol inspira, puis expira.

— Xin-Shen, tu es en charge de trouver une entrée dérobée et de voir s’il y a un quelconque danger. Cette fois-ci ne prend pas ton temps.

Suan pivota vers elles attentif, puis porta ses yeux rosés sur elle. Leur couleur ne faisait qu’empirer et le halo autour de ses iris s’intensifiait tout comme les rayures qui se dessinaient au fur et à mesure que sa nature s’éveillait. Elles prenaient de plus en plus une couleur zinzolin alors que d’autres restaient dans un ton noirâtre persistant à s’étendre jusqu’à ses tempes. Il devenait indéfinissable de par l’étrangeté que prenait son aspect. Sur son visage se mêlaient beauté et puissance. Un quelque chose de dure et de doux à la fois se livrait batail. Elle n’aurait pas su décrire le sentiment qu’elle portait en le regardant. La peur demeurait suspendue dans son cœur, mais il y avait aussi une certaine admiration à le voir muter.

— Elle a déjà repéré deux tunnels. Un sous la main du singe sculpté et un plus loin vers le paquet de cheveux tout flagada. Elle part en éclaireuse.

— Elle commence par lequel ? s’informa la rouquine en observant Suan.

Il suivit le fantôme progresser.

— Ils se rejoignent, donc peu lui importe, le plus accessible. Celui dans la main est trop haut pour qu’elle y monte seule.

— Le chemin avec les cheveux est trop dangereux pour nous. Ton chat peut la faire monter, non ?

Elle arqua un sourcil. En fait, il ne réfléchissait pas plus qu’elle.

Il concéda un poil saoulé et demanda à Tartanne d’aider sa sœur. Ce que le chat géant fit sur le champ. Il se baissa à la hauteur de la gamine apprenant à Trysol que lui aussi la percevait, ce qui n’était pas une grande surprise. Il était relié par l’âme à Suan, donc voir l’esprit ne devait pas être trop compliqué pour lui. Quand il se hissa sur ses deux pattes arrière, avec dextérité et élégance, Trysol déglutit. L’impression d’être inutile naquit en elle. C’était dure à l’admettre, mais entre un fantôme, un réincarné-clairvoyant doublé d’une créature phénoménale et un Akota, qu’est-ce qu’elle apporterait à cette quête ? Analoum l’avait initiée. Elle, qu’avait-elle fait d’autre que suivre en grattant sur la harpe de jade pour éloigner les monstres ? Son frère était mort, elle n’avait plus personne à sauver. La déprime s’allongeait dans son sein, lorsqu’elle réalisa que c’était elle qui portait Analoum. Elle était le soutient. Et sans cela, jusqu’où sa compères serait allé. Elle pensa plus fort encore alors que Tartanne et Suan revinrent auprès d’elle ; je suis le sacrifice. Si je n’ai plus rien à chercher ou à offrir, je peux au moins donner ma vie.

Suan sauta du dos de l’animal avec panache. Sa confiance gagnait toujours plus de terrain, lui donnant un aspect plus mature, plus sage. Ses yeux renvoyaient un grand savoir qui ne ferait qu’augmentait et dont elle s’inquiétait. Qu’apprenait-il ? Savait-il plus de chose d’elle désormais ? Les deux mâles échangèrent un regard à demi-complice. Ça va vite entre eux, songea la jeune femme, la main caressant le thorax de sa camarade. Quel genre de lien possédaient-ils ?

Un haussement de bras plus tard, elle fixa l’homme dont le visage jeune et fin trahissait la fragilité passée. Peut-être qu’elle donnerait sa vie pour lui, si lui était prêt à sauver son monde. Dans ses mains, il portait l’espoir. Et dans ses yeux, un savoir plus grandissant à chaque minute écoulée.