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Suan n’avait rien dit depuis un moment. Il ne rapportait plus rien. L’eau montait et les nerfs d’Analoum commençaient à se nouer. Ils formaient des entrelacs comme les tresses bordéliques que portaient Shaeln. Ce gamin était une montagne devant elle.

Elle n’savait plus où commençait le débout de ses angoisses et la fin de ses doutes. C’était à ce demander si un jour elle avait vécu autre chose que les tourments.

Adaman se tenait à elle. Sa tête sortait de l’eau. Les gamins derrière commençaient à s’agiter, mais le silence régnait.

De ce qu’elle avait compris, Suan ou plutôt sa sœur guider le groupe de Trysol et Tartanne. Encore une situation qu’elle aurait bien volontiers évitée. La poisse aurait dû rester dehors à les attendre. De quoi leur avait été-t-il utile que de luire dans le noir ? Fatiguée, elle posa son front sur celui d’Adaman et serra sa taille plus fermement. Elle en profita pour sentir le son que produisait le cœur de ce dernier. Comment parvenait-il à garder son calme ? Cet enfant la surprendrait toujours. Déjà quand il était petite, il restait posé même devant un cataclysme. Jamais personne n’avait besoin de lui expliquer les choses, il les comprenait tout seul. Il avait le sens du détail, de l’analyse et de la réflexion. Il semblait savoir une chose que les autres mettrait du temps à saisir. Adaman avait toujours eu cette pointe de tristesse dans le regard, dans la parole, comme si la vie ne l’intéressait pas… Ou bien était-ce dû aux lois… Il savait qu’il n’en aurait pas, qu’on le garderait enfermé une fois qu’il serait jugé bon pour ensemencer les femmes.

Analoum le serra un peu plus fort en se jurant qu’une fois sortie d’ici, qu’une fois la chose morte, elle lui offrirait la vie. Celle qu’elle n’avait elle-même pas encore goûté. Elle construirait un village, en serait la chef et appliquerait de meilleures lois que celles qui avait régie son quotidien depuis sa naissance. Le temps serait son plus grand ennemi, mais l’acharnement la mènerait à la victoire.

— Suan,‘va rester longtemps dans la flotte ? Y’s’passe quoi de l’autre côté ? dit-elle enfin, avec un mouvement brutal.

Les deux garçons derrière elle sursautèrent. Adaman ne broncha pas occuper à nouer et dénouer ses doigts de la natte brune.

Suan coula son regard dans le sien.

— Il se passe que Tartanne et Trysol doivent à la fois gérer les pièges et faire avancer leur troupe rapidement pour éviter les gardes qui rodent.

— Y’en a beaucoup ?

— Pas tant que ça. Mais de ce que voit ma sœur, elles sont titanesques. Plus grande que toi, que Nyim ou Shealn. Leurs armes sont tranchantes et elles ne respirent pas la joie de vivre.

— Quoi d’autre ? C’pas pour ça que tu grimace depuis tout à l’heure.

Analoum avait suffisamment de visibilité pour voir le changement d’expression sur le visage du jeune homme. Et clairement, il y avait quelque chose qui clochait.

— Il y ‘a qu’ils ne pourront pas tous les éviter. Il y a deux groupes qui sont entrain de marcher dans la même direction que Trysol et Tartanne. Un des gamins panique, il ralentit le mouvement.

— Salvatoum ! C’est pas bon, ça !

Analoum serra le poing et se mordilla les lèvres nerveusement.

— Elles sont combien ?

— Quatre.

La brune hocha la tête, un brin rassuré. Trysol était bonne combattante. Elle pouvait tirer sur une belle distance comme se servir d’une flèche comme dague. Tartanne pouvait très bien grossir d’avantage et leur garantir une protection. Mais elle n’oubliait pas la réputation du chat niveau malchance. Et s’il déclencher un piège.

Analoum bouillait de l’intérieure et se forçait à garder un calme extérieur. Seulement plus les minutes passaient plus son masque de sérénité se fissurait.

— Salvatoum, ils vont claquer, marmonna-t-elle en portant plus haut son frère.

L’image de Trysol s’invita dans son esprit ; ce reverraient-elles ? Le doute grossissait alors qu’elle fixait Suan plongé dans sa propre tête.

La jeune femme commençait à s’en vouloir d’être venu jusqu’ici, et même si elle avait retrouvé son frère, ses convictions commencé à s’effriter.

— Que savait-elle vraiment de la fin de cette histoire ? Elle réalisait qu’elle avait enjolivé la victoire. L’espoir… C’était elle qui l’y avait fait croire.

— Tout ira bien, Ana chuchota Adaman à son oreille. Ne pense pas au pire avant de l’avoir vécu, il se pourrait bien qu’il n’existe que dans ta tête.

— T’pense qu’j’dramatise ?

— Je pense que tu es fatiguée et que tu as peur. Et tu as le droit. Moi aussi j’ai peur.

Il baissa les yeux, et Analoum revit cette étincelle de tristesse.

— Peur de quoi, au juste ? J’pas la sensation qu’tu parle d’la même chose.

— Parce que nous ne sommes pas faits avec les mêmes craintes.

— Réponds, Adaman.

Le jeune homme soupira, grimpant encore un peu plus haut sur sa sœur.

— J’ai peur de sortir, peur que rien ne change pour moi et que tout soit pire une fois devenue un homme aux yeux des femmes.

Un silence de plomb passa entre eux.

Le cœur d’Analoum tonna plus fort en se serrant plus douloureusement.

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