Suan tremblait très légèrement à chaque fois que Shaeln le hisser plus haut. L’adolescent sentait toute l’hésitation du jeune homme qui osait à peine serrer ses jambes autour de sa taille. Si la situation d’en laquelle ils se trouvaient n’était pas si précaire, il aurait laissé échapper un rire amusé. En toute logique, Shealn aurait dû avoir peur, mais il ne craignait plus l’obscurité depuis longtemps. Vivre dans une grotte avait eut du bon.

Doucement, il souleva Suan qui tressaillit sous la caresse de ses doigts. L’entendre déglutir bruyamment laissait monter dans son cœur la subtile image d’un prochain bonheur. Mais rapidement, il l’effaça. Est-ce qu’un homme en avait le droit ou le pouvoir ? Une fois dehors, que lui arrivera-t-il ? Il savait sa sœur morte ou bien trop blesser pour lui garantir une quelconque protection. Il ne savait rien des pensées de celui qu’il retenait, seulement que son odeur de sang l’attirer irrésistiblement. Et ici, c’était comme ça qu’on choisissait son partenaire, enfin… C’était ainsi que jadis on choisissait son autre. Ses parents avaient eu cette chance. Lui ne l’aurait sans doute jamais.

Shaeln crocheta ses yeux dans ceux de Suan. Il y chercha un signe que ce qu’il ressentait n’était pas à sens unique. Il se sentit idiot de songer à cela, alors que bientôt l’eau lui mangerait les épaules.

Il faudrait partir dans peu de temps avant de ne plus avoir pieds. Derrière lui Analoum semblait penser à la même chose ? Elle hissait son frère pour lui éviter la tasse.

L’adolescent ne comprenait pas pourquoi, ils se trouvaient tous encore là, et en sentant Suan osait enfin se cramponner un peu plus à lui dans un mouvement de fatigue, il conseilla de sortir.

— On ne va pas pouvoir rester plus longtemps, souffla-t-il à Suan. Ils ne vont pas tenir. Regarde-les. Ils sont en galère.

Il pointa du menton les gamins derrière Analoum qui montaient presque sur la tête de leur porteur. L’un d’eux en portait deux à bras le corps.

Suan tressaillit sous ses doigts et Shealn se rendit compte que leurs lèvres étaient rudement proches. Plus qu’il ne l’avait imaginé. Si prêt qu’il sentît la respiration chaude du jeune homme.

Suan baissa la tête pour éviter son regard.

— Je m’en doute bien, marmonna-t-il.

Shealn se demanda un instant si c’était à lui qu’il s’adresser, alors quand Suan lui lança une œillade de par-dessous, il eut l’impression que son cœur allait fondre.

Cet homme, bien que plus vieux que lui, lui donnait la sensation d’être l’adulte. Suan avait ce visage de gamin à peine sorti de l’adolescence et pourtant, Shealn voyait bien la maturité naissante qui balafrait ses yeux orangés. D’ailleurs, il remarqua enfin l’étrange lumière qui passait dans les veines de Suan et qui, de fait, éclairait son visage. Ce n’était pas seulement sur ses joues, ses temps, mais aussi dans son cou, sur ses bras dont les manches étaient relevées. Shealn glissa le regard au bas, dans l’eau. Les cuisses de Suan brillaient légèrement. Quoi que cet homme eut été, l’adolescent le trouvait plus beau encore, plus impressionnant que cet étranger qui avait tenu tête à ses compagnes quand ils avaient passé la nuit tous ensemble.

Shaeln désirait en découvrir plus sur lui, sur ce qu’il était. Parce qu’il n’avait pas connaissance que les hommes d’en-bas avaient ce genre de capacité. Les veines qui ressortaient comme un masque sur son visage tanné par le soleil, c’était la marque des enfants des lianes. Lui-même les portait, bien que très fine sur sa peau trop pâle.