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— Trysol souffrir.
— Tampo, Trysol est guérie. Elle n’a plus mal. Elle est un peu larguée. C’est tout. Le danger est loin d’elle. Laisse ta place à Suan. Trysol n’est pas ici ! Ressens-là. Sa blessure a disparu.
— Moi, entendu Trysol crier. Trysol danger. Trysol mal. Moi sentir détresse.
— Elle ne cri plus. Elle est debout, continua Tartanne.
Sa connexion avec Suan était toujours en vigueur. Il pouvait ainsi avoir accès aux pensées de la rouquine. Et il sentait son déséquilibre mental. Trop d’informations lui avait été révéler. Rien qui pouvait désamorcer Tampo. Il répondait à l’agitation émotionnelle de sa maîtresse.
— Ecoute-moi. Trysol est en sécurité. Tu le vois bien, insista Tartanne.
— Elle, mal à la tête. Elle, pas comprendre. Elle, en feu. Elle, tout casser. Moi, obéir.
Tampo crissa ses griffes au sol, formant des sillons. Un son guttural s’empara de sa voix. Ses lèvres décharnées se retroussèrent sur ses crocs. Le félin devinait qu’il était vu comme un danger. Il ne comprenait pas pour quelle raison. Trysol n’était nulle par ici. Et il songea à Tomma, cette vie passée de Suan, de ses premières transformations et de la créature déboussolée qui s’emparait d’elle quand sa guerrière gérait mal ses émotions. Il se souvint des carnages qu’elle provoquait et de la terreur qui emportait la personne qui la contrôlait. Trysol ne réalisait pas encore le pouvoir qu’elle avait sur tout ce qui les entourait.
Tartanne remercia les siècles de lui avoir permis un lien profond avec les multiples vie d’Adom. En esquivant, un coup de patte venu par sa droite, il communiqua avec Suan.
— Il faut que tu préviennes Trysol. Elle est la seule qui peut le calmer.
— C’est que ce n’est pas facile de m’incruster dans sa tête alors qu’elle a toutes ses pensées, répondit-il.
— Vous n’avez pas encore pu instaurer de barrières entre vous. C’est une bonne chose, alors sers toi en et sois intrusif. Tampo a pour ordre de protéger Trysol. Qu’elle soit ici ou non, il s’en fiche. Il n’a pas la même notion des choses que nous. Son esprit comme son corps sont une arme, il n’a pas de réelle conscience. Il est né pour tuer et être guidé. Les messages de danger s’accumulent en lui. Si Trysol ne se calme pas et ne le dirige pas de la bonne façon, il finira par tous nous dévorer. Je n’ai pas vécu tout ce temps pour me faire mâchouiller les moustaches par un Hàng Xiè. Quant à toi, tu n’as pas encore la force mentale suffisante pour devenir son maître.
Suan soupira, mais il comprit rapidement ce que Tartanne soulignait et cela ravit le chat. Une créature de ce genre, hors de contrôle, ça pouvait faire plus de dégât qu’une simple chevelure ensorcelée et habitée par un mal encore très flou pour s’en soucier.
Le Hàng Xiè fila droit sur lui. Sa rapidité n’était pas sur fait, loin de là. Et même pour en avoir vu, plus d’un à l’action, Tartanne trouva Tampo bien rapide pour son second rang. À savoir si le métissage de Suan ne jouait pas là-dedans.
Le félin rapetissa in extremis et passa entre les jambes-pattes de son assaillant.
— Tampo, si tu es rapide, je le suis moi aussi. Je ne suis pas ton ennemi ni celui de Trysol, argumenta-t-il pour l’occuper.
Mais il venait de faire une erreur qu’il réalisa après coup. Il ne gardait plus le couloir et à moins de retenter une glissade sous le monstre, ce dernier poursuivrait Analoum sans plus faire attention à lui. Car Tartanne avait compris que Tampo ne s’attaquait pas à lui parce qu’il voulait en découdre, mais parce qui lui bloquait le passage.
Non ! Elle n’a rien fait. Analoum aide Trysol, elle aussi.
Analoum être problème dans tête à Trysol. Analoum, mauvaise. Analoum, mourir.
Non ! Elle n’est pas mauvaise. Tampo !!!
En voyant le Hàng Xiè prendre appuie sur ses quatre pattes, Tartanne s’imagina, sans exagération, la suite. Dans un élan à peine contrôler, il courut entre les pattes de la bestiole et agrandit son corps en donnant un coup d’épaule et faisant valdinguer Tampo des mètres plus loin.
— Trysol et Analoum sont amies. Trysol ne te pardonnera pas si tu lui fais du mal. Tu sais qu’elle peut t’ordonner de mourir. Toi, tu veux vivre, pas vrai.
— Moi, obéir. Moi, mourir ou vivre pareil. Pas important.
— Trysol, en colère contre Analoum.
— En colère, oui. Mais elle ne veut pas la tuer.
— Obstacle pour aller bien. Analoum, mauvaise pour le cœur.
Tartanne était à court d’argument. Il avait bien compris qu’un sillon s’était creuser entre les deux femmes. Mais de là à ce que Trysol puise penser à attenter à la vie de son amie, ça lui paraissait gros. Mais que savait-il du cœur de chacune.
— Suan ! gronda Tartanne dans sa tête. Qu’est-ce qui se passe ? Est-ce qu’elle a reçu les informations ?
— Non. Elle pense trop. Je n’arrive pas à m’imposer. Elle semble en plein conflit intérieure. Analoum est en danger, si elle n’arrête pas d’y penser.
— Ça, je le sais. Fais en sorte que tes problèmes soient plus importants que les siens. Laisse-toi déborder par ta souffrance. Je sais que tu essaies de la canaliser, mais là, c’est une question de vie ou de mort. Je ne sais pas si je suis taillée pour me battre avec ce genre de créature. Je n’ai jamais cherché le conflit.
Tartanne entendait les chaines qui retenait Suan. Elle commençait à glisser sur le sol de la muraille. Il n’aurait bientôt plus la possibilité de bouger à l’intérieur de lui et le lien avec Trysol serait plus compliqué encore. Tampo s’accaparerait une grande partie du lien qui les unissait tous les trois. Il fallait que le félin détourne au plus l’attention de la créature. A la fois pour laisser du temps à Suan mais aussi à Analoum. Une fois que Tampo serait à ses trousses pas sûr qu’elle aurait la capacité de le contrer. Si tant est qu’elle soit encore en vie. Le palais regorgeait de dangers.
En se repositionnant devant le couloir, le matou hérissa son poil de quoi s’imposer plus gros qu’il ne l’était déjà.
Sa rencontre avec la dernier vie d’Adom lui promettait de nouvelles blessures.
Ses trois queues fouettaient l’air, et il se positionna de façon à prévenir son concurrent qu’il faudrait lui passer sur le corps pour accéder au couloir.
Tampo tapa ses mains griffues sur les dalles. Deux d’entre elles se fissurèrent. Quand sa gueule béante s’ouvrit sur un rugissement, l’avenir sembla incertain dans l’esprit de Tartanne.
Tout reposait sur la communication entre Trysol et Suan… et peut-être sur un peu de poisse bien distribué.
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