#2 Sybil. The end
Ça y est, ça doit être maintenant.
Tout le monde chez moi est paniqué.
Je ne comprends pas tout de suite ce qu'il se passe.
Ma mère court dans tous les sens.
Mes frères sont assis sur le canapé avec un sac accroché à leur dos. Ils sont très calmes, un peu trop même. Ils portent des imperméables bleu foncé avec une fermeture orange fluo.
Je crois que je viens de me réveiller parce que je suis toute engourdie.
C'est comme si moi aussi, je savais ce qu'il se passait.
Ma mère ouvre la grande porte, celle qui donne dans le hall et, alors qu'elle appelle les garçons pour qu'ils commencent à descendre, je suis prise d'un élan de panique. J'ai cette désagréable sensation d'être en retard, mon coeur bat beaucoup trop vite et fort dans ma poitrine. Elle m'avait laissée dormir alors que tout le monde se préparait...
Papa aussi dort.
Je me retrouve dans ma chambre et je prends mon énorme lutin vert, où il y à peu près toute ma tête : mes manuscrits, des paroles de chanson que j'ai imprimées mais que je connaissais déjà, tous les mots-cachés que j'ai inventés, et plein d'autres choses; mon classeur de français de 3e.
Ma mère rentre dans ma chambre alors que je m'apprête à les fourrer dans mon sac.
Ça sert à rien...
Si ! Moi j'en ai besoin...
Aussitôt ai-je craché ces mots, je me mets à pleurer.
Je suis prête, on peut descendre...
Papa qui a dû entendre tout le raffût, s'est levé. Il est dans ma chambre et a l'air encore endormi.
Je crois qu'on vient d'emménager parce qu'il avait un nombre impressionnant d'affaires un peu partout. Maintenant que je regarde bien, il y a énormément de casseroles sur le sol, des petites comme des grandes, dans des gros bacs transparents.
Il prend l'une d'entre elles, la plus grosse.
Tu veux que j'emmène un truc ? je lui demande.
Il ne me répond pas.
Je me retourne, du côté de mon étagère, et sens les larmes monter de nouveau. Il y a beaucoup trop de choses que je voudrais emporter...
J'attrape mes deux trousses, mon Instax ainsi que le premier lot de dix photos que j'ai prises et les jette dans mon bagage... Merde... Il n'y a plus de place...
J'empoigne mon sac en toile et j'y mets mon classeur de français, mon appareil photo pour ne pas l'abîmer et histoire que le poids sur mes épaules soit équitablement réparti.
Je continue à pleurer, mais j'ai fini de faire ce que j'avais à faire.
Je cours jusqu'à l'ascenseur, ne prenant pas la peine de fermer les portes derrière moi. De toute façon ça sert à rien... On ne reviendra plus, c'est sûr...
J'ai tout juste le temps d'appuyer sur le bouton, avant que celui-ci ne parte. Dans le hall de notre étage, tout le monde sort. Presque tous en même temps, et avec différents bagages. Sacs ici et valises là.
Lorsque l'ascenseur s'ouvre entièrement, j'y trouve ma mère, fatiguée, mes frères de même qu'une autre personne qui m'est inconnue.
Tout ce que je sais, c'est qu'il y a une aura verte autour de cette dernière et que les membres de ma famille deviennent bizarres... Un peu comme des zombies, ou un truc dans le genre...
Je presse le bras de la malade et celui des autres et... Ils reviennent à leur état normal.
Il n'y a plus de place, mais les gens veulent forcer pour entrer.
Une femme s'avance, entourée de l'aura verte. Je lui presse le bras. Elle semble à nouveau normale.
Je fais cela spontanément, comme si ce pouvoir de guérisseuse m'était connu.
Bon, on a enfin réussi à partir, on descend.
Je crois qu'il y a une élipse là, parce que nous nous retrouvons directement dans la voiture familiale, sur la route.
D'abord, il n'y a personne. Absolument personne. Mais, arrivés sur une place (devant l'église Jourdain), c'est comme si tout le monde entier était réuni au même endroit.
Élipse.
Les voitures sont garrées n'importe comment. Et les gens sont paniqués. De ce que j'entends, ils parlent tous de comment ils se sont réveillés, etc..
Je retrouve Cannelle, une de mes plus proches amies, elle est seule. Sans sa jumelle. Juste avant ce qui semble être la fin du monde...
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