Chapitre 40 : Ombre au milieu de la foule
L’appartement baigne dans une lumière tamisée, une douceur qui contraste avec l’agitation qui m’attend dehors. Devant le miroir, j’ajuste la robe que Gabi m’a prêtée – une pièce noire moulante, aux fines bretelles, qui épouse mes courbes comme une seconde peau et s’ouvre sur un décolleté audacieux, presque indécent. Je me tourne légèrement, observant le tissu tendu sur mes hanches, le profond V qui dévoile la naissance de mes seins. Mes tétons pointent sous la soie, libres, exposés, et un frisson me parcourt alors que je réalise à quel point je suis vulnérable dans cette tenue.
Derrière moi, Gabi est appuyée contre la porte de la chambre, une lueur amusée dans ses yeux verts, un verre à la main. Elle me détaille, un sourire en coin.
— Putain, t’es canon comme ça.
Je souris, mais mon regard s’attarde sur l’échancrure vertigineuse de la robe. Instinctivement, ma main se lève vers ma poitrine, prête à chercher un soutien-gorge pour masquer cette nudité qui me brûle la peau. Puis je me fige. Je n’en porte plus. C’est une règle. Mes doigts tremblent légèrement, suspendus dans l’air, et une chaleur sourde monte dans ma nuque, mélange de honte et d’excitation à l’idée de transgresser – ou plutôt, d’obéir.
Gabi, qui a suivi mon hésitation, attrape un de ses soutiens-gorge sur la commode – un truc en dentelle rouge – et me le tend avec un rire léger.
— Tiens, mets ça, sinon tes tétons vont saluer tout le monde.
Je hoche la tête, hésitante, mes doigts effleurant le tissu avant de s’immobiliser. Mon souffle se raccourcit, une pointe d’embarras me noue la gorge, et je murmure, presque malgré moi :
— Non, c’est bon, je vais faire sans.
Ses sourcils se haussent, une lueur intriguée traversant son regard.
— Ah ouais ? Nouvelle lubie ou t’as juste envie qu’on te matte ? Moi, en tout cas, je me régale !
Sa voix glisse sur la fin, un ton bas, presque rauque, qui trahit son attirance sans détour. Ses yeux s’attardent sur mes seins, sur la façon dont la robe les dessine sans rien cacher, et un sourire plus franc étire ses lèvres, une lueur joueuse mais sincère dans ses prunelles vertes. Je sens mes joues s’échauffer, un trouble délicieux mêlé d’une gêne que je ne peux pas tout à fait masquer.
Je ris pour esquiver, attrapant mon rouge à lèvres pour détourner son attention, mais son regard reste posé sur moi, pesant, chargé d’une tension qu’elle ne cherche pas à dissimuler. Elle ne pousse pas plus loin, mais ce silence est lourd, saturé d’une question qu’elle ne pose pas.
Alors que j’applique une touche de rouge, ses prunelles glissent vers mon cou, s’arrêtent sur le collier en cuir noir, l’anneau métallique luisant faiblement sous la lumière.
— Et ce collier, tu comptes le garder aussi ?
Son ton est léger, presque taquin, mais une infime tension perce dans sa voix, un fil fragile que je perçois sans pouvoir l’ignorer. Mes doigts effleurent le cuir, frais contre ma peau encore chaude de la douche, et une vague de vertige me traverse – ce poids, cette marque, ce lien avec lui.
— Oui. C’est un cadeau.
Silence. Gabi hoche lentement la tête, un sourire discret aux lèvres, mais ses yeux s’assombrissent, une ombre fugace passant dans son regard. Elle sait. Elle devine ce que ce collier signifie, ce qu’il représente, même si elle ne le dit pas. Une pointe de malaise flotte entre nous, un courant sous-jacent qu’elle choisit de taire.
— Si tu veux. Ça te va bien, en tout cas.
Mais je sens le fond de sa pensée, cette retenue qu’elle masque sous sa nonchalance. Mon ventre se noue, une tension diffuse que je repousse en attrapant mon sac.
— Allez viens, on va être en retard.
Elle saisit sa veste, et je la suis, le cœur étrangement plus lourd qu’en quittant la chambre, le cuir du collier pesant comme une promesse autour de ma gorge.
Le bar est un chaos vibrant, bondé, bruyant, saturé d’une énergie électrique qui me happe dès que nous franchissons la porte. La musique pulse dans les enceintes, un rythme sourd qui fait vibrer le sol, les conversations se mêlent en une cacophonie familière, et l’odeur d’alcool et de sueur flotte dans l’air moite. Gabi et moi rejoignons quelques amis, verres en main, et je me laisse emporter par l’ambiance, riant à leurs blagues, dansant légèrement sur place. Mes seins bougent sous la robe à chaque mouvement, libres, exposés, et je sens des regards furtifs se poser sur moi, une sensation qui me plait autant qu’elle me trouble.
Je me sens bien. Vivante.
Mais tout bascule quand mes yeux accrochent une silhouette au fond de la salle.
Vincent.
Un frisson me parcourt, froid et brûlant à la fois. Il est là, assis à une table, entouré de visages connus, un verre à la main, inconscient de ma présence. Mon souffle se coupe, mon instinct me hurlant de détourner le regard, de l’ignorer, mais Gabi remarque mon silence soudain, suit mes yeux.
— Merde… T’as envie de le voir ?
Je déglutis, la gorge sèche.
— Absolument pas.
Mais le destin ne me laisse pas ce choix. Vincent lève les yeux. Nos regards se croisent. Un instant suspendu, un choc muet qui me fige sur place. Puis il se lève, traverse la foule, et vient droit vers moi.
Gabi se tend à mes côtés, ses bras croisés comme une barrière, prête à intervenir, mais je lève une main légère pour l’arrêter, le cœur battant malgré ma froideur apparente.
Vincent s’immobilise à quelques centimètres, l’air incertain. Son regard glisse sur moi, s’attarde sur la robe, sur le décolleté qui dévoile mes seins nus sous le tissu, et je vois une lueur de trouble passer dans ses yeux, un éclat qu’il ne peut masquer.
— Salut, Cloé.
— Salut, Vincent.
Il inspire profondément, cherchant ses mots.
— Tu me laisses te parler, deux minutes ?
Je penche la tête, faussement désinvolte, un sourire crispé aux lèvres.
— Je vois pas ce qu’il y a à dire.
— S’il te plaît.
Son ton est bas, presque suppliant, et un pincement lointain me serre le ventre, un écho éteint de ce que j’ai pu ressentir pour lui. Mais il appartient à un autre monde, une autre vie.
— Pas ce soir, Vincent.
Je tourne la tête vers Gabi, qui observe la scène, impassible, bras toujours croisés. Vincent serre la mâchoire une seconde, puis hoche la tête.
— Ok. Mais tu devras bien m’écouter un jour ou l’autre.
— Non, Vincent. Je ne te dois rien.
Je ne lui laisse pas le temps de répondre et me détourne, son regard pesant encore sur moi alors qu’il s’éloigne dans la foule. Gabi me jette un coup d’œil, sondant mon expression.
— Ça va ?
Je prends une gorgée de mon verre, souffle du nez et force un sourire.
— Parfaitement.
Mais une tension persiste, une alerte sourde qui ne me quitte pas.
La soirée reprend, les rires et l’alcool chassant peu à peu le malaise, mais mon esprit reste aux aguets, comme si quelque chose planait au-dessus de moi. Puis mon téléphone vibre dans ma main, une secousse qui fait bondir mon cœur dans ma poitrine.
Marc : Je suis dehors. 200 mètres au bout de la rue. Viens immédiatement. Montre moi que tu es une petite chienne bien dressée.
Un frisson électrise ma colonne vertébrale, une vague brûlante déferlant dans mes veines. Mes yeux se lèvent instinctivement vers Gabi, qui rit à une blague, inconsciente de l’ouragan qui s’abat en moi. Il est là. Il m’appelle. Et je sais que je vais obéir.
Je pose mon verre sur la table, me lève d’un mouvement brusque, mes jambes tremblent sous l’urgence qui me dévore. Gabi tourne la tête, fronce les sourcils.
— Où tu vas ?
— Prendre l’air. Je reviens.
Elle plisse les yeux, sceptique, son instinct flairant quelque chose.
— Je viens avec toi.
— Non.
Le mot claque, trop vite, trop ferme, et je vois l’étonnement passer dans son regard. Mes joues s’échauffent, mais je n’ai pas le temps de m’expliquer.
— Cloé—
— Je reviens vite, promis.
Je ne lui laisse pas le loisir d’argumenter, me faufile déjà à travers la foule, le cœur battant à tout rompre, mes talons claquant sur le sol collant. Il le sait, je suis une chienne bien dressée, accourant au sifflet de son maître, et cette pensée m’excite autant qu’elle me terrifie.
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