Chapitre 46 : Surprise
Les néons de l’hôtel clignotent faiblement quand je pousse la porte de service, l’air froid de minuit me frappant comme une gifle après la chaleur étouffante de mon service. Mes jambes sont lourdes, mes épaules voûtées sous le poids d’une journée interminable, et je resserre mon manteau autour de moi, mes doigts tremblant légèrement alors que je traverse le parking désert. Mon téléphone pèse dans ma poche, saturé de ses messages – des dizaines de SMS, des appels rejetés qui s’accumulent depuis des jours, une litanie incessante que j’ai cessé de lire. "Tu m’appartiens, Cloé." "Tu peux pas me quitter comme ça." "Tu vas le regretter." Chaque mot clignote dans ma tête comme un avertissement que je refuse d’entendre, mais qui me noue le ventre malgré moi.
Je sors mes clés, mes talons claquant sur l’asphalte mouillé, et je me dirige vers ma voiture, garée sous un lampadaire vacillant. L’ombre bouge avant que je ne le voie – une silhouette massive qui se détache de l’obscurité, près du capot. Mon souffle se coupe, mes clés glissant presque de mes doigts alors qu’il avance, ses pas lourds résonnant dans le silence.
Marc.
— T’allais où comme ça ? dit-il, sa voix grave, froide, un sourire torve étirant ses lèvres.
Je recule d’un pas, mon cœur cognant dans ma poitrine, mais il s’approche encore, comblant l’espace en une seconde.
— Pourquoi tu réponds pas, Cloé ? reprend-il, son ton montant, chargé d’une menace qui fait trembler mes jambes. T’as cru que t’avais le choix ? Que t’allais juste m’ignorer comme une petite pute qui se croit libre ?
Il parle vite, les mots claquant comme des coups, et je secoue la tête, cherchant une sortie, une réponse qui ne vient pas.
— T’es à moi, tu comprends ça ? grogne-t-il, son visage se rapprochant du mien, son souffle chaud sur ma peau. Tu peux pas me quitter, jamais. T’es rien sans moi, juste une salope qui sait pas ce qu’elle veut.
— Laisse-moi, murmuré-je, ma voix tremblante, mais il ricane, un son sec qui me glace.
— Laisse-moi ? répète-t-il, moqueur, avant que ses mains jaillissent, s’abattant sur mon cou.
Ses doigts se referment autour de ma gorge, serrant avec une force brutale, et je sens mes pieds décoller légèrement du sol, mes talons raclant l’asphalte alors qu’il me soulève. Une douleur aiguë explose dans mon cou, un étau qui broie ma trachée, et je halète, mes mains griffant ses poignets, mes ongles s’enfonçant dans sa peau sans effet. Mes yeux s’embuent, des éclairs rouges dansant devant moi alors que l’air me manque, et je sens mes larmes couler, brûlantes sur mes joues alors que je lutte pour respirer. Ça dure – cinq, six secondes, une éternité – et mes jambes flageolent, mon corps s’affaissant sous son emprise.
Il me relâche enfin, me laissant tomber au sol, et je m’effondre à genoux, toussant, pleurant, mes mains serrant ma gorge tandis que l’air revient en brûlant. Mes yeux sont rouges, injectés de sang, et je le fixe à travers mes larmes, le visage flou mais son regard noir perçant dans le mien.
— Je… Je ferai tout ce que tu veux, dis-je, ma voix claire malgré les sanglots qui la brisent, un aveu désespéré qui jaillit comme une supplication. Laisse-moi tranquille.
Il ricane encore, un son rauque, et recule d’un pas, ses mains dans les poches comme si rien ne s’était passé.
— On verra ça, lâche-t-il, avant de tourner les talons et de disparaître dans l’ombre.
Je reste là, à genoux, le souffle court, mes larmes gouttant sur l’asphalte alors que je tremble de tout mon corps. Mes doigts frôlent mon cou, sentant la peau tendre, déjà marquée, et je me relève péniblement, ramassant mes clés tombées pour monter dans ma voiture. Le trajet jusqu’à chez Gabi est un brouillard – mes mains crispées sur le volant, mes yeux rouges piquants dans la lumière des phares, la douleur pulsant dans ma gorge à chaque inspiration.
Quand je pousse la porte de l’appartement, Gabi est là, affalée sur le canapé avec un livre. Elle lève les yeux, et son visage se fige instantanément, un éclat de panique traversant ses prunelles vertes alors qu’elle voit mon cou – une marque violette, large et brutale, qui encercle ma gorge.
— Putain, Cloé, qu’est-ce qu’il t’a fait ? s’écrie-t-elle, bondissant sur ses pieds, son livre tombant au sol dans un bruit sourd.
Elle s’approche en deux pas, ses mains tremblantes effleurant mon visage, puis mon cou, ses doigts s’arrêtant juste avant de toucher la peau meurtrie. Ses yeux s’écarquillent, sa mâchoire se serre, et une fureur brute éclate dans sa voix.
— Ce salaud t’a touchée ? Je vais le défoncer, je vais appeler les flics tout de suite !
Elle attrape son téléphone sur la table, ses gestes brusques, mais je tends une main, la voix rauque et cassée :
— Non, Gabi, pas la police. Je… Je vais régler ça moi-même.
Elle s’immobilise, son regard passant de moi à son écran, et je vois ses doigts se crisper, ses lèvres trembler de rage contenue.
— T’es sérieuse ? murmure-t-elle, sa voix basse mais vibrante de colère. Regarde-toi, Cloé ! Il t’a étranglée, putain ! Tu peux pas…
— S’il te plaît, coupé-je, mes yeux rouges croisant les siens, pleins de larmes et de détermination fragile. Laisse-moi faire.
Un silence lourd s’installe, ses épaules s’affaissant légèrement alors qu’elle repose le téléphone, ses mains tombant le long de son corps. Elle me fixe, la fureur brûlant encore dans ses yeux, puis elle s’approche, ses bras s’ouvrant pour m’enlacer. Je me blottis contre elle, mes larmes mouillant son pull, et elle me serre fort, trop fort, comme si elle voulait me protéger de tout ce qui menace encore dehors. Mais dans ce silence tendu, dans la chaleur de son étreinte, je sens la tempête qui gronde, prête à éclater.
Annotations
Versions