XII
Témoins
.Le lieutenant Chester entra dans la boutique, sa carte de police à la main :
— Bonjour, c’est vous qui avez déclaré à ma collègue ce matin avoir vu une moto noire monter dans un fourgon ?
— C’est bien moi, je nettoyais la porte vitrée et j’ai remarqué ce fourgon blanc stationné à quatre ou cinq mètres avec les portes ouvertes, le chauffeur avait mis une planche et attendait en fumant. Je n’ai pas vu sa tête, il était de dos, en combinaison de travail bleue. Une moto noire est arrivée et est montée directement dans le fourgon, le gars a aussitôt rentré la planche, fermé les portes et est monté à l’avant. Le fourgon a démarré immédiatement. Comme je l'ai dit à votre collègue ce matin, je ne suis pas sorti du magasin, je n’ai pas vu où il allait.
— Vous avez déclaré ne pas avoir noté le numéro d’immatriculation, mais peut-être avez-vous remarqué une inscription ou un détail sur ce fourgon, ou la marque de la moto ? Et le pilote, il est descendu de son engin ?
— Non, le gars est resté dans le fourgon pendant que le chauffeur fermait, les portes. Le fourgon n’avait rien de particulier, il semblait récent. Pour la moto je ne m’y connais pas, mais je crois qu’il s’agissait d’une sportive japonaise et le pilote était en combinaison et casque noirs. Mais vous savez, ça a été très vite, entre le moment où la moto est montée et le départ du fourgon, moins d’une minute, je pense.
— Entendu, le chauffeur, il était comment, grand, gros, blond, barbu ?
— Euh, barbu… je crois pas, mais je l’ai vu que de dos ! Je dirai plutôt grand et mince et maintenant que j’y pense... je n’ai pas remarqué les cheveux car il avait une casquette, genre marine, vous voyez ?
— D’accord, je vois ! Il faudra que vous passiez au commissariat pour signer votre déposition, je vous remercie.
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Pendant ce temps, les gendarmes procédaient au porte à porte interrogeant les occupants des quelques maisons situées à l’entrée de la petite route qui menait, un kilomètre plus loin,, au lieu de l’incendie. Une vieille dame, depuis son balcon, avait vu un fourgon blanc passer, mais ne se souvenait pas l’avoir vu revenir ni si c’était le jour où les pompiers ont éteint l’incendie du bout du chemin ! En parcourant cette petite voie, au bout de six kilomètres, elle débouchait sur une route départementale. Sur la gauche, à environ trois-cents mètres dans une sorte de clairière en bordure de route il y avait un campement de gens du voyage composé de trois caravanes et deux camping-cars. Un fourgon blanc était attelé à l’une des caravanes. En regardant à l’intérieur, les gendarmes se rendirent compte qu’il était aménagé en camping-car et n’aurait pu transporter la moto.
Ils repartaient quand un autre fourgon blanc vint se garer près du camp.
— Regardez, mon adjudant, sur le côté une inscription en gros caractères : Entreprise de peinture Florès Frères.
— J‘ai vu, allons voir l’intérieur…
Le véhicule était plein de pots de peinture. Sur les parois, des étagères remplies de rouleaux de papier peint. Des escabeaux, des éléments d’échafaudage encombraient l’intérieur. Le jour du meurtre, ils se trouvaient sur un chantier à quinze kilomètres de Clermont-Ferrand. Et pour preuve, ils exhibèrent un PV pour stationnement gênant ce matin-là. Une fois vérifié leurs dires les gendarmes les laissèrent, estimant que la piste s'interrompait là.
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Fleur Tiflé arriva Gare de Lyon à dix-sept heures, un collègue en voiture l’attendait à l’extérieur. Il lui confirma que ses instructions avaient été suivies à la lettre, une seule personne correspondait au signalement, une jeune diplomate qui avait effectué au moins trois fois, en train, le trajet Paris / Clermont-Ferrand au cours du dernier trimestre. Sous un prétexte fallacieux on l’avait convoquée d’urgence au Quai d’Orsay et là :
— elle vous y attend depuis vingt minutes, discrètement dans un bureau en compagnie de deux de nos collaboratrices , elle s’appelle Alwena Rivaine, et est détachée du ministère des affaires étrangères auprès du conseiller aux relations internationales. Vous devez savoir également que la capitaine Adache est arrivée à l’aéroport du Bourget. Elle est en ce moment en route pour Beauvau (ou l’Élysée on ne sait pas), où elle devrait arriver dans environ une demi-heure.
— Merci pour ces bonnes nouvelles, surtout, qu’aucune information ne transpire y compris à la DGSI, c’est un ordre ! Seul notre groupe doit être dans la confidence jusqu’à ce qu’on mette cette femme en sûreté. Pas un mot à la hiérarchie, j’assume l’entière responsabilité de l’opération. Quand arrivons-nous ?
— Nous y serons d’ici dix minutes environ.
— Parfait ! Nous allons enfin rencontrer cette femme brune et dans une demi-heure Adache va se rendre compte de son absence...
JI 15/09/23
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