Partie 4 - 1
Au bout de quelques heures, les effets de l’adrénaline s’estompèrent. Il ne fallait pas pour autant nous arrêter en chemin. Malgré la fatigue, la peur était toujours présente. Je me retournai à plusieurs reprises, le camp embryonnaire Alpha paraissait lointain. Pourtant la distance que nous avions parcourue était dérisoire. Ceux partis dans la vallée devaient mieux se cacher que nous. Je commençais à douter et regretter mon choix. Au loin, le générateur principal était toujours en proie aux flammes. Des arcs électriques striaient parfois ses parois. Un de mes compagnons m’indiqua qu’il faudrait plusieurs jours pour réparer les dégâts. Le générateur secondaire n’était qu’au début de sa construction.
Pourtant, nous pressions le pas. Une autre menace ferait bientôt surface. Les sondes et les robots tactiques MART-MKD seraient bientôt remis en service. Un peu plus tard, nous dépassâmes la crête d’un des massifs rocheux entourant le camp embryonnaire Alpha. Nous ne nous arrêtâmes pas pour autant, suivant une ligne de crête en déviant de notre trajectoire initiale. Je ne sais pas combien nous étions à ce moment-là, l’équivalent de trois ou quatre décuries. Mais nous étions silencieux et chuchotions, comme si nos murmures pouvaient éveiller l’un des monstres qui dormaient de l’autre côté.
Je ne sais pas si l’endroit avait été placé à notre intention. Mais une grande cavité nous accueillit pour nous reposer. Nous avions tous convenu de ne marcher que par intermittence pour éviter d’être repérés trop facilement par un simple survol. Nous n’oubliions pas que le Markind 55 Cancri était toujours entre leurs mains et que du renfort serait bientôt envoyé sous peu. Il fallait d’abord retrouver des forces dans le sommeil, si nous arrivions à fermer l’œil.
À mon réveil, je me rapprochais d’Olas et Matthias. Ce dernier n’avait, semble-t-il, pas fermé l’œil de la nuit. Il nous invita à nous rapprocher doucement du bord de notre refuge. Au début, je crus qu’une sonde ou des hommes étaient à notre recherche. Mais ce n’était pas cela qu’il souhaitait nous montrer. L’instant fut magique. Le rocher à quelques mètres de nous semblait changer légèrement de forme. Puis, sans même prêter attention aux trois humains l’observant, il déploya ses membres courts et musclés. Lentement, il descendit du talus où il avait passé la nuit. Je compris que l’insomnie de notre compagnon n’était pas due qu’aux événements passés, mais en grande partie à l’observation des animaux endémiques d’Ition-g et de leur mimétisme incroyable. Enfin, il avait l’impression d’avoir touché du doigt le rêve de son voyage vers ce nouveau monde. Il les nomma « animaux-roches ».
Jorald nous rejoignit pour nous indiquer que tous étaient prêts à quitter ce refuge temporaire. En parallèle, plusieurs personnes recensèrent le matériel et les ressources à notre disposition. Si la nourriture n’était pas, pour le moment, le centre de nos préoccupations, il nous faudrait rejoindre une source d’eau au plus vite. Nous avions remarqué plusieurs petits ruisseaux sur notre chemin. Nous espérions en rejoindre un et mettre autant de distance possible entre nous et notre prison.
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