Partie 4 - 3
Bien des jours plus tard, notre détention, les travaux forcés, notre évasion, tout cela me paraissait si lointain. Seule, la perte récente de Matthias continuait de me serrer le cœur.
Désormais, le petit groupe que nous formions avait trouvé refuge dans la végétation luxuriante d’une vallée encaissée entre deux hautes chaînes montagneuses. Les eaux de la rivière s’y écoulaient lentement. Nous profitions de l’instant pour retrouver une température plus clémente qu’au sommet. Un peu à l’écart du groupe, je remplissais les systèmes passifs de ma combinaison. Un bruit feutré me fit sursauter. Un animal-roche passait à moins de deux mètres de moi. Je restais figé, le regardant avancer vers l’endroit où il venait étancher sa soif. Je pus observer sa façon de plonger sa gueule et laper l’eau efficacement. Je me sentais arriéré face à lui. Nous humain, nous nous prévalions d’être l’espèce la plus évoluée parmi les mondes que nous avions conquis. Mais sans notre technologie, nous serions morts de faim, de soif ou de froid sur bien des mondes.
Olas vint doucement à ma rencontre, la main chargée de baies. Il m’en tendit une poignée tout en regardant lui aussi l’animal.
« Il semble ne pas nous avoir remarqués.
— À mon avis, nous sommes comme un élément du décor pour lui.
— Tu penses que l’on pourrait…
— Je ne m’y risquerais pas. Nous n’avons aucun moyen de savoir s’il est comestible.
— Pourtant, il représente une source non négligeable.
— Olas. Sérieusement. Avec quoi nous ferions cuire sa chair ? Non, je ne pense décidément pas que cela soit une bonne idée. Les baies me suffisent. »
Je voyais dans les yeux d’Olas, un regard différent guidé par la fatigue et la faim.
Si la faune et la flore étaient quasi inexistantes sur les sommets itionnais, les vallées foisonnaient de vie. Des arbustes portaient des fruits inconnus. Nous ne nous lancions pas à essayer de les goûter. Nous ne voulions pas risquer une intoxication quelconque. Cependant, notre régime alimentaire ne pourrait pas suffire encore longtemps. Déjà deux de mes compagnons souffraient de désordres intestinaux dont je tairai les conséquences. Pour l’instant, je m’en sortais bien.
Nous venions de terminer notre réapprovisionnement en eau des systèmes passifs de nos combinaisons légères quand nous entendîmes des cris. Nous ne perdîmes pas plus de temps. Je courus aux côtés d’Olas à travers la végétation dans la direction du bruit. La peur était revenue à la charge. Toutes ces agitations provenaient de nos compagnons. Je reconnus une ou deux voix. Une autre plaintive m’était totalement inconnue. Notre silence était la meilleure de nos couvertures. J’imaginais déjà le son se répercutant sur les parois rocheuses au loin et une sonde ou pire la récolter. Il fallait faire cesser ce chaos. Et pour cela, Olas était tout à fait prêt.
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