"J'ai 46 ans. Ça fait chier d'avoir 46 ans. Ça veut rien dire d'avoir 46 ans. Un âge bâtard entre deux. Vieux et vieux jeune. Ça nous laisse le choix, tu vois ?" Marc Duverger, 4h38 du mat', n'en revient toujours pas de se poser là, dans ce no man's land de la vie. "C'est dégueulasse !" s'écroule-t-il auprès de sa blonde décolorée en rousse, chialant encore une dernière larme dans sa Heineken. " C'est pile-poil (oui, Marc Duverger adore utiliser des expressions à la con) la moitié de l’espérance de vie en Suisse ! ...La moitié de la Suisse quoi. Je ne sais pas si tu te rends compte. C'est dégueulasse !". Marc Duverger a un peu trop abusé de son baba au rhum d'anniversaire, mais bon, en même temps, on n'a pas 46 ans plusieurs fois. "C'est dégueulasse ! Ça aussi, qu'on ne puisse jamais lever le pouce pour dire pause. Après, tout de suite, toujours, ça passe, après ça dégouline, ça glisse sur nos rides, nos ongles jaunis et sur le reste. C'est dégueulasse ! Je suis heureux, vois-tu ?". Il se plante là, le nez dans l'urbanosphère jaunie, du haut de son balcon, du haut de son trois pièces. "Tu entends là, j'ai envie de crier ô combien je suis heureux. A la terre entière ! Enfin du moins à ceux qui habitent dans cet immeuble, dans cette rue, peut-être bien !". Sa blonde décolorée en rousse, elle, roupille depuis quelques heures déjà.