Gamin
La télé crache, mes yeux se décrassent, mon corps tremble. La nuit dehors s'est immiscé, s'est faufilé partout. J'ai encore trop bu.
C'est devenu mon quotidien, c'est devenu ma vie. Dormir, manger, me saouler. Je m'écroule jour après jour, nuit après nuit, un peu plus encore. C'est un constat, c'est une vérité. Pas jolie à voir, à entendre mais pourtant bien réel, bien ancré.
Je ne sais même pas quelle heure est-il, quel jour nous sommes. C'est comme ça. A la télé, ça crache des débilités que je gobe volontier. Je finis le reste de ma dernière bière. C'est dégueulasse.
Oui, ma vie a ce goût déguelasse, une aigreur sans fraicheur qui remonte du dedans. L'intérieur qui pourrit tout autant.
Ma femme est partie. Je ne sais plus tellement si tout cela est arrivé avant ou après ma petite dégringolade. Cela n'a plus d'importance, elle n'est plus là. Seul. Comme un con. Ratata !
Regarde, vieux, ce que tu es devenue, regarde. T'es seul, triste à gerber, ton appartement est tout autant pourri que ta vie. T'as loupé quelque chose, gars ! Ta vie ! Voilà ce que tu as loupé, raté, gaché. C'est tout.
Qu'as-tu gamin ? Tu crois que tu m'apprends des choses ? Crois-tu que je ne le sais pas ? Crois-tu que je n'ai pas essayé ? C'est toi gamin qui m'a mené là. C'est toi gamin qui a trop rêvé, trop lu. C'est toi gamin qu'a trop lu, qu'a trop cru que la vie ça pouvait être comme les livres. C'est toi qu'a rêvé de la vie, de la grande, de l'aventure. Le parpaing dans la gueule, la réalité, c'est moi qui me suis le pris. C'est tout de ta faute tout ça, je te le dis, viens pas me faire la morale, viens pas me faire chier.
Aujourd'hui, j'ai quarante balais, tout à fait délavé !
Connard
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