La vie est belle!
— Yes Gauthier, mon poto, cette fois c’est fini ! hurla Alexandre tout en entrechoquant sa coupe de champagne à celle de son ami.
Assis sur la banquette en velours rouge d’une boite de nuit huppée, Alexandre, Brice et Gauthier avaient décidé de célébrer l’obtention, l’après-midi même, du diplôme qui clôturait de nombreuses années d’études et qui faisait officiellement d’eux des médecins.
Ne dérogeant pas à leurs habitudes, ils ne se refusaient aucun excès et pourquoi se le refuser alors qu’ils en avaient maintenant les moyens ? Le père de Brice, directeur d’une clinique privée dans le sud de la France, venait de leur annoncer qu’il leur offrait un poste et les attendait d’ici trois semaines. En plus d’être jeunes et beaux, ils se voyaient bientôt plus riches qu’ils ne l’étaient déjà.
Sans prévenir ses amis, Gauthier, blondinet au sourire ravageur, se leva de son siège et s’avança vers le groupe de jeunes filles qu’il avait repérées, munit d’une nouvelle bouteille de champagne. Après quelques minutes de discussion, il fit un clin d’œil à ses camarades qui s’approchèrent à leur tour. C’était leur signal, le clin d’œil qui signalait de bonnes cibles, c’est à dire des jeunes filles peu farouches ou très sensibles aux signes extérieurs de richesse. Du pain bénit pour eux en somme.
Alexandre Cotelet, 30 ans, était le plus âgé des trois mais aussi le moins bien né. C’était grâce à son oncle, alias tonton Magot, qu’il avait pu financer ses études longues et laborieuses. Beau brun ténébreux à l’allure de surfeur, il était à l’aise en toute circonstance, sûr de lui mais surtout très arrogant. Il partageait d’ailleurs ce dernier trait de caractère avec ses deux amis et c’est même grâce à celui-ci qu’ils s’étaient rapprochés dès la première année d’études: eux trois face à la médiocrité des autres.
Alex appréciait aussi beaucoup les femmes. De préférence pas trop habillées et pas trop bavardes non plus. Il les aimait tellement qu’il en faisait une grande consommation. D’ailleurs ce soir là, il avait jeté son dévolu sur une belle blonde moulée dans une robe noire pailletée.
Mais cette jeune fille respire la classe, se dit Alex en s’approchant.
— Je m’appelle Candice, se présenta la jeune femme en tortillant ses cheveux autour de son index.
Si tu savais ce que j’en ai rien à foutre de ton prénom, pensa le jeune homme.
— Candice, c’est mignon, lui susurra t-il dans le creux de l’oreille tout en profitant de l’occasion pour passer son bras autour de sa taille.
— Et tu fais quoi dans la vie ? demanda la jeune fille sans le repousser.
— Médecin, répondit-il pas peu fier de lui.
Le regard Candice s’illumina alors d’un éclat qu’Alexandre connaissait bien car il le voyait souvent lorsqu’il annonçait sa profession : c’était le Saint Graal pour ce type de fille. Il en était conscient et en jouait car après tout, au delà de la plastique, le reste lui importait peu et il savait très bien ce qu’il voulait de sa proie. Il ajoutait alors toujours la même chose :
— Oui. J’aime venir en aide aux autres.
Comme à chaque fois, la jeune femme sourit et se blottie un peu plus dans ses bras.
Je suis trop fort…Et un peu crevard quand même, ironisa-t-il intérieurement.
— On va chez toi ? proposa-t-il enfin à la jeune femme.
Elle, acquiesça timidement puis il l’entraina dehors.
— Mon lapin ? T’es mignon quand tu dors, mon lapin…Debout.
Alexandre ouvrit les yeux avec la gorge sèche et une main manucurée lui caressant la joue. Il mit quelques secondes à réaliser que les vêtements jetés à terre un peu partout étaient les siens mais quand ce fut fait, il se redressa énergiquement dans le lit.
Et merde, elle s’est réveillée avant moi.
À ses côtés, la jeune femme avec qui il avait passé la nuit le regardait en souriant. Elle l’embrassa sans qu’il ait le temps de réagir puis sortit du lit pour se rendre dans une autre pièce. Alex en profita alors pour rassembler ses affaires et commencer à s’habiller. Il était en colère après lui, jamais il ne s’était réveillé après une proie. En général, il arrivait toujours à s’éclipser avant que celle-ci ne s’en aperçoive. D’autant plus que maintenant qu’il avait eu ce qu’il voulait, elle n’avait plus aucun intérêt à ses yeux.
— Tu prends quoi pour le petit dèj ? lui demanda la jeune fille au loin.
Comment s’appelle-t-elle déjà ?
— Ben là tout de suite, la porte, répondit l’intéressé en repérant la sortie, allez c’était sympa, salut ! conclut-il en s’engouffrant dans la cage d’escalier.
— Quoi ? Espèce de sale fils de p..
La jeune femme n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’il avait déjà dévalé toutes les marches le séparant du bas de l’immeuble.
Malgré l’heure matinale, il faisait déjà doux. Alex fouilla dans les poches de sa veste et y trouva sa paire de lunettes de soleil qu’il mit aussitôt et ses clés de voiture.
Une chance qu’elles ne soient pas tombées chez elle, se dit-il en regardant sa conquête sur son balcon lui faire des signes peu amicaux.
Il lui fit un geste de la main aussi, puis de l’autre actionna le bip d’ouverture centralisée de sa voiture et s’engouffra à l’intérieur.
Une fois à son appartement, il alluma la télévision, par habitude, se prépara un café, car avec tout cela, il n’avait pas déjeuné, et démarra son ordinateur afin de vérifier ce que ses amis avaient publiés sur les réseaux sociaux.
Gauthier et Brice semblaient ne pas avoir été en reste puisque de nombreuses photos d’eux, torses nus et entourés de jeunes filles, le tout sous fond d’alcool, avaient envahis leurs pages.
— Ah, ça c’est mes potes ! ria Alexandre.
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