Carnet n°56 du Marquis Robert Jean Alphonse de Montyboulu;

Découvert le 2 octobre 2015 au Manoir de Montyboulu;

Notes du Marquis en date du 14 septembre 1995 :

"Ce que j’ai tenté de retranscrire dans cette série de carnets ne s’explique généralement pas.

J’ai écumé nombre de chemins à travers ce monde. Toutes les routes que j’ai pu emprunter ces dernières longues années, se sont révélées tortueuses. Et lors de mes errances, j’ai été témoin de choses impossibles.

Il y a 25 ans jour pour jour, mon père expirait entre les draps moites de son lit et je passais le pas de la porte du manoir en jurant de ne jamais y revenir.

Les serments que l’on s’impose ne sont que rarement tenus. Et chacun a besoin d’un point d’ancrage, d’un foyer. Même ceux qui, comme moi, l’ont abandonné sans une once de regret.

Nous finissons toujours par revenir sur les terres qui nous ont vu naitre.

J’ai tout dilapidé. Il ne reste rien des Montyboulu, si l’on excepte les quelques murs encore debout du sombre manoir. Envolée la fortune et la renommée. Envolé l’héritage de mon père. Il ne reste rien. Pourtant, j’ai encore tant de rancœur. C’était une vengeance vaine et désespérée. Comme seule peut l’être celle d’un enfant.

Je n’ai pas d’héritier. Il ne restera rien après moi. Sauf cette série de carnets.

Alors, si un jour quelqu’un s’attarde à feuilleter ces pages, je souhaite qu’il le fasse en reléguant tout au fond de ses entrailles ce qu’il tenait pour acquis. Je n’ai jamais été quelqu’un de facilement influençable. Je n’ai jamais tenu à croire. Mais ce que j’ai vécu m’a laissé bien trop d’incertitudes et d’incohérences pour me contenter d’une réalité commune et acceptable.

Je n’ai pas l’ambition de changer le monde. Mais, si votre curiosité s’éveille au détour de ces lignes, j’aurais eu le privilège de vous raconter un peu ce que l’on peut voir en regardant au-delà du visible."