La terre brulée du samourai épuisé
Je suis enchanté de savoir mon oiselle plus en paix et heureuse. Loin de moi l'idée de croire que son amant ne saurait représenter un obstacle à son vol le plus libre. J'espère de tout cœur qu'elle soit éprise d'un amour immense et parfaitement réciproque. Pour son épanouissement j'offrirai tout.
Sans prétention aucune, je crois avoir touché des contrées encore bien loin de ses jolies ailes, vogué sur des mers qui sont sûrement pour le moment des mythes à ses yeux. Survécu des naufrages qui transforment nos yeux, affronté des tempêtes qui font devenir pieux. Ainsi un jour comprendra t elle, après un tel voyage, elle verra la tristesse que je perçois dans les tréfonds de son âme.
J'entends la position qui est aujourd'hui la mienne. Je la prends avec plaisir. Fidèle à ma tâche je serai. La soutenir dans sa voie, ainsi est mon crédo. C'est tel le guerrier dévoué que je servirai, dans la joie et la peine, dans les encouragements comme le redressement.
Afin de protéger son bonheur je serai implacable. Forteresse, remparts de mon corps, gardien par mes mots, refuge pour les larmes, acolyte dans les escapades. Armée prête à défaire toute menace, pluie de flèche et de feu par mes bras, cavalerie effrénée de mes jambes, phalange déterminée de curiosité, chevalier devoué à la création.
Mais tel le samurai éploré devant la terre, par une vouivre brûlée, je patienterai. Mon sabre esseulé j'entrainerai. Mes pieds mutilés je fortifirai. Mes yeux fatigués, j'apprendrai à fermer. Chaque matin c'est à sa gloire que j'ecrirai, chaque soir je peindrai, à sa félicité. Méditations noctures ou prières trop pieuses comme unique sommeil.
Pour qu'au retour du dragon, ni la peur, ni la peine ne m'aveuglent. Pour qu'à son souffle enflammé, d'un coup d'épée je puisse riposter. Pour rivaliser de légèreté avec ses ailes déployées. Pour que mon geste d'élégance le terrasse, de simplicité le raisonne. Et dans le fracas du printemps, qu'il se pose et s'abandonne, acceptant la lame, froide libératrice. Ce jour, les milliers de cerisier que j'aurai planté dans le labour calciné, fleuriront ensemble, faisant de cette lutte une mémorable épopée, de cette attente ma leçon d'humilité.
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