De l'action !
Le jour suivant, la jeune femme suivait sa séance avec Ève après le petit déjeuner. Puis lorsqu'elle se redirigeait vers sa chambre, elle eut la surprise d'y trouver Aidan qui l'attendait. Il était assis sur son lit, l'air absent. Mouna prit le temps pour l'admirer quelques instants. Elle marchait avec des ballerines et il ne semblait pas l'avoir entendu entrer. La tentation était trop tentante, elle rompit le charme en claquant la porte. Elle espérait le faire sursauter, mais la réaction d'Aidan ne fut pas celle qu'elle imaginait.
En l'espace de trois secondes, il était sur elle, la bloquant contre un mur, son avant-bras en travers de la gorge. La jeune femme suffoquait comme un poisson hors de l'eau. Ses oreilles sifflaient et des taches noires dansaient devant ses yeux. Elle était tellement surprise qu'elle ne réagissait pas. Elle se sentait sombrer dans les abymes, les yeux de son Appolon qui la fixait comme un ennemi. Il n'y avait que le froid et un instinct primaire au fond de se regard.
Puis il semblait revenir à lui au dernier moment. Les yeux inquiets, il relâcha la jeune femme, qui tomba comme une poupée de chiffon. Il la rattrapa sous les bras avant qu'elle ne s'écroule par terre. Il l'accompagna lentement afin de l'asseoir contre le mur. Il lui maintenait la tête, les mains en coupe autour de son visage. Mouna suffoquait, sa vue se rétablissait progressivement. Il lui fallut quelques minutes pour reprendre son souffle convenablement. Elle avait la sensation désagréable de sa trachée enfoncée, elle n'arrêtait pas de déglutir.
Lorsqu'Aidan fût rassuré sur la santé de Mouna, il la porta jusqu'à son lit. Il s'en voulait visiblement pour sa réaction. Il tournait en rond comme un lion en cage, sa main posée sur sa nuque, il n'arrêtait pas de demander à Mouna de bien vouloir le pardonner. Il n'écoutait pas lorsqu'elle lui répondait à chaque fois qu'elle ne lui en voulait pas. Sentant la situation bloquée, elle la désamorça en tentant de plaisanter.
– Je crois que j'ai été aussi furtive qu'un ninja ! Pour la discrétion, je veux dire, parce que pour la partie suivante, j'ai beaucoup à apprendre de toi Senseî ! Elle ponctua sa réplique en s'inclinant, les deux mains jointes.
– Je ne voulais pas vous faire de mal. Comment puis-je me faire pardonner ?
Mouna prit la pose, un doigt posé sur sa joue, faisant mine d'y réfléchir.
– Alors j'ai deux requêtes : un, on se tutoie et deux, tu m'expliqueras un jour pourquoi tu as agis comme ça.
– C'est tout ?
– Tu trouves que ce n'est pas assez ? Tu as raison, je vais ajouter « faire un câlin » sur la liste.
Qui ne tente rien n'a rien, se disait Mouna. Elle qui n'était pas à l'aise avec les hommes habituellement, elle prit le taureau par les cornes. Aidan souris à la malice de la jeune femme, son sourire la faisant fondre comme neige au soleil. Mouna ne pensait pas qu'il rentrerait dans son bluff, mais il se pencha vers elle pour la serrer doucement dans ses bras. Sa chaleur et son odeur de musc blanc l'encerclaient, un petit coin de paradis.
– Je ne peux pas tout te dire, mais ce que tu peux avoir, c'est que moi aussi j'ai eu une autre vie dans le passé. Et celle-ci m'a laissé des cicatrices, qui ne sont pas toujours pas toujours visibles.
Il se redressa, mais resta assis à côté d'elle.
– Ok.
– Ok.
– Et sinon ? Tu es venu me voir pour une raison précise ou tu avais juste envie d'un câlin ?
– Je suis venu pour une raison précise, mais le câlin est un bonus qui ne se refuse pas. Surtout à un adorable chaton pareil.
En effet, Mouna portait une polaire noire et rose à capuche, douce comme un doudou avec d'adorables oreilles de chats cousues sur la capuche.
- Miaou ! Attention je peux mordre aussi.
- Je n'en doute pas. D'ailleurs, c'est une introduction particulière, mais je voulais te parler d'une formation. En art martial.
Mouna fronça les sourcils et attendis qu'il poursuive ses explications.
- As-tu déjà pratiqué un art martial ou un sport de combat ?
- Euh, non. Mettre des baffes à ses sœurs ça compte ?
- J'ai bien peur que non, même si les sœurs peuvent se montrer de véritables tigresses. Bien, as-tu déjà entendu parler du Wing Chun ?
- Nein mein General !
- Ah ! Du sprichst deutsch ?
- Euh on ne va pas dire ça. Mes parents m'ont obligé à faire allemand, mais je suis plus à l'aise avec l'anglais.
- Do you know Kung Fu ?
- Yes a litle. But in the movies only.
- Bon pour faire simple il y a deux écoles de Kung Fu, le Wu Shu et le Wing Shun. Le Wu Shu est assez connu, car c'est le plus popularisé par la Chine. Le Wing Chun a été créé par une femme. Elle fut la seule survivante des maîtres Shaolin d'une invasion des Mandchoues. Elle créa sa propre technique, qui ne s'appuie pas sur la force et la souplesse uniquement, puis elle l'enseigna. Et sa technique se perpétua.
Mouna se rappela certains détails sur les Manchoues qu'elle avait lu dans ses livres de stratégies militaires.
– Quelle différence y a-t-il entre les deux ?
– L'une est plus spectaculaire et nécessite des années de pratique pour avoir les bases. L'autre est accessible à tous et repose sur l'anatomie humaine. Elle est plus utilisée dans le cadre de l'autodéfense.
– Et tu veux m'apprendre le Wing Chan ?
– Le Wing Chun, oui, les bases au moins.
– Mais pourquoi ? Si je suis incognito, je n'aurai pas besoin de me défendre non ?
– Il faut te préparer à toute éventualité. Dans la vie, rien n'est prévisible à cent pour cent. Et ça fait parti du programme de réhabilitation. Tu te sens mieux ?
– Oui ça va aller.
– Bien alors, commençons.
Aidan l'accompagna dans un dojo. Il la fit courir sur un tapis de course, lui fit faire des pompes, abdos, tractions puis testa sa souplesse. Ce qui n'était pas un problème pour elle. Puis il expliqua la posture, un pied devant l'autre, les genoux légèrement fléchis, les bras lui protégeant toujours le centre de son corps. Il fallait toujours protéger ses organes vitaux. Il testa ses réflexes dans un premier temps. Elle devait juste le repousser et s'éloigner dès qu'il visait ces zones-là.
Ensuite il lui montra des enchainements à répéter sur un mannequin de bois puis deux clés pour réagir à une tentative d'étranglement. C'était de circonstance...
Mouna fut surprise du plaisir qu'elle avait pris durant cette première séance de Kung Fu. Ils firent une pause à midi et recommencèrent en début d'après-midi. Le fait de passer autant de temps avec Apollon près d'elle y était aussi pour beaucoup dans sa joie.
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