Chapitre 6
Les rayons du soleil me réveille tranquillement et je réalise que je suis encore en retard. Puis je me souviens que je commence à 10 heures 30 et qu’il n’est que 9 heures. Nolan n’a pas encore vu mon message d’hier. Je m’étire et sors de mon lit. Au petit-déjeuner, je grignote un muesli en regardant les infos.
- Une jeune femme de 21 ans retrouvée morte ce matin à 5 heures.
Je lève la tête de mon bol de fromage blanc et écoute avec attention.
- Rachel Steven est une femme de 21 ans étudiante à l’université de Portland. Elle a laissé un mot sur la table de son salon. Nous allons à présent le lire. Il est destiné à sa famille et à une certaine Julie Finn, qui serait son amie.
«Ma chère famille, et Julie Finn,
Je suis désolée de me séparer de vous de cette façon, mais je ne peux pas vivre comme ça. Nolan m’a quitté hier pour toi Julie, je suis d’ailleurs rassurée que tu ne sois pas avec lui quand même car tu as trouvé mieux. Ce n’est pas très dur. Nolan n’est qu’un coureur de jupons qui joue avec nos sentiments. Il t’a trompé et il m’a quitté pour toi. J’espère que tu seras heureuse avec Marius, Julie, parce que même si tu dis qu’il n’y a rien entre vous, je ne te crois pas. Je sais que tu l’aimes, et Nolan le savait aussi. Bonne chance avec lui.
Pour ma famille, je vous remercie pour tout. Je vous aime beaucoup, et sachez que vous comptez énormément pour moi. Bien sûr que j’ai pensé à vous en me donnant la mort, j’ai même failli renoncer pour rester avec vous. Mais je sais que je n’arriverais pas à vivre avec sur la conscience le fait que Nolan m’ait quitté. Je suis sensible, et ça me suffit. J’ai l’impression qu’il m’a quitté aussi parce que je suis nulle, moche, etc. Ma famille, je vous aime, tous. Papa, Maman, je vous aime. Ma sœur, mon frère, je vous aime. Ma tante, mon oncle, je vous aime. Ma marraine, mon parrain, je vous aime. Mes grands parents, je vous aime. Je vous aime. Je vous aime. Beaucoup. Vous allez me manquer.
Bisous, votre Rachel qui vous aime.»
J’ai les larmes aux yeux. Rachel s’est suicidée à cause de Nolan. Je le déteste encore plus. Rachel n’aurait pas dû faire ça. Ce n’est pas juste pour elle. C’est Nolan qui mériterait de mourir.
J’éteins le poste de télévision et vais avec lassitude dans ma salle de bain. Une fois que je suis prête, je rejoins la librairie de Marius.
- Salut, Julie. Ouh la, il s’est passé quoi ?
Je tombe dans ses bras et pleure. Les larmes déferlent sur mes joues, je suis secouée de sanglots. Il me serre contre lui et me demande ce qui ne va pas. Il me décolle légèrement.
- Julie, qu’est-ce qu’il se passe ?
- Rachel. Elle… elle s’est suicidée à cause… à cause de Nolan.
Je recommence à pleurer et Marius resserre son étreinte.
- Tu le détestes, hein ?
- Nolan ? Oui, dis-je.
Je me dégage de Marius et lui souris.
- Merci d’être là quand j’en ai besoin, Marius.
- De rien.
Je le serre à nouveau puis me rends compte de mon geste.
- Oh je suis désolée. Tu es peut-être en couple et moi je te fais un câlin. Je suis stupide, désolée. C’est-à-dire que je ne connais rien de toi, là-dessus.
- Julie, je t’ai dit qu’il n’y avait jamais eu d’autres filles.
Il me regarde dans les yeux. J’ai envie de baisser la tête. De ne plus le regarder parce que je sais que je vais craquer.
Ding
Je me retourne. Une vieille dame vient d’entrer dans la librairie. Marius et moi nous détachons et je pars vers l’université, comme si de rien n’était.
Quand j’arrive à la fac, Nolan est au bras d’une fille. Je me dirige vers lui.
- Nolan, tu vois, je te l’avais dit. Tu n’es pas capable de tenir 24 heures sans trouver une autre fille.
La femme à ses côtés le dévisage puis part de façon théâtrale.
- Merci d’avoir fait partir Blondie, raille-t’il.
- De rien.
- Ca va comment, avec Marius ? demande-t’il avec une pointe de jalousie dans la voix.
- J’ai dîné avec lui hier soir. Je crois que je l’aime.
Je vois son visage se décomposer avec joie.
- Sinon tu es au courant, n’est-ce pas ?
- Au courant de quoi ?
- Pour Rachel.
- Elle s’est remise en couple ? questionne-t’il.
- Oh non, bien pire ! dis-je amèrement.
- Alors quoi ?
- Elle s’est suicidée. Parce que tu l’as quitté.
Je lui montre la rediffusion des informations.
- Non… Rachel…
- Et si ! Ta Rachel est morte. Et c’est à cause de toi ! Tu vois ce que ça peut faire à quelqu’un, tout ce que tu fais subir aux filles ? Tu vas me faire gober que du jour au lendemain, tu ne m’aimes plus et tu aimes cette Blondie ? Tu penses à la famille de Rachel ? Elle doit te détester à l’instant !
J’ai un rictus amer. Il commence à pleurer, mais je ne m’arrête pas là. J’ai décidé de lui dire ses quatre vérités.
- Oh et puis Kim ! Tu te souviens la raison pour laquelle elle t’a quitté ? C’est honteux ! Elle avait peur que tu la trompes ! Et ces autres filles avec qui t’es sorti ? Tu as brisé le coeur à 15 filles ! Bravo, Nolan ! Tu détruis tout ce que tu touches. Des filles t’aiment, t’offrent leur coeur, mais tu ne le mérites pas, Nolan ! Tu mérites de vivre seul ! Je ne vois pas comment une pourriture comme toi peut exister. Qu’est-ce qui te pousse à être comme ça, Nolan ? Qu’est-ce qu’elles t’ont fait, ces pauvres filles ? Elles ne demandent qu’à être aimées, reconnues par toi ! Tu joues avec nos sentiments ! Mais l’amour n’est pas un jeu, et nous ne sommes pas des objets ! Quand tu auras compris ça, j’accepterais peut-être de te revoir. Mais pour le moment, n’ose même pas m’adresser la parole. Je te déteste, Nolan Oyama.
Je m’en vais vers ma salle de cours. Cassandra essaye de me parler mais je l’esquive.
- Il s’est passé quoi Julie ?
- Je viens de faire comprendre à Nolan tout le mal qu’il a fait.
- Ca a dû faire beaucoup d’un coup, vu son état.
- Je m’en fiche. Il a fait souffrir des filles, à moi de le faire souffrir.
- Bah, je suis pas sûre que ce soit la meilleure solution Julie. C’est assez radical.
- C’est peut-être pas la meilleure solution, mais au moins, il va comprendre. En tout cas, j’espère.
- Et sinon avec Marius ? Ça va comment ?
- Comme il y a trois mois. On est juste amis.
- Je vois.
Cassandra hésite à dire autre chose, je le sens. Mais elle s’arrête là et sort ses affaires en silence. Pendant les cours, je consulte discrètement mon téléphone. Le message que j’ai envoyé à Nolan est resté en non vu. Il serait peut-être temps qu’il le lise. Mais je ne sais pas pourquoi, j’ai comme l’impression qu’il n’ose pas ouvrir la notification. Je décide d’en taper rapidement, quand un SMS s’affiche sur l’écran.
Nolan : La seule fille que je trouve après avoir chercher, c’est toi. Julie, je ne peux pas nier mes sentiments pour toi.
Nolan : Je sais que tu ne veux plus me voir, mais je pense à toi. Quand tu me regardes, ça me procure des frissons. Enfin je t’aime quoi.
Nolan : Je peux voir que tu lis les messages, alors dis quelque chose s’il te plait.
Je ne sais pas quoi lui répondre. Cassie se penche sur mon écran.
- C’est Nolan ?
- Oui.
- Et ça dit quoi ?
- Lis, vas-y.
Cassandra plonge son nez dans mon écran. Elle fait défiler la conversation.
- Eh bah, il a pas l’air de t’aimer à moitié, ce mec. Mais si tu ne l’aimes pas, il a pas à te forcer à ce point. Je pense que tu as compris qu’il t’aimait, pas la peine de le répéter dix fois.
Elle me rend mon smartphone.
Nolan : Ca fait deux minutes que le message est marqué comme lu. Tu ne veux vraiment plus me parler.
Moi : C’est ça. Je t’ai dit que je ne voulais plus te voir, alors pourquoi tu continues à me parler ?
Nolan : Je te l’ai dit, Julie, je t’aime.
Moi : Lâche l’affaire, je t’ai dit que moi non.
Je repose mon téléphone et me concentre sur l’image d’une paupière projetée par le professeur de maquillage artistique. La paupière est d’un dégradé d’orange, tirant presque vers le jaune. Par-dessus ce fard à paupières, il y a une épaisse couche d’eye-liner rouge, et sur le bord sont collés des strass. C’est le genre de maquillage que je n’aime pas. C’est beaucoup trop excentrique, c’est d’ailleurs pour ça que je compte maquiller en institut, et pas en studio de film.
Mon iPhone qui vibre me donne envie de regarder les messages, mais je résiste. Parce que si c’est Nolan et qu’il voit que j’ai lu, il va me demander de répondre. Après tout, il a toujours détesté qu’on lui laisse des vus. J’allume juste l’écran histoire de voir le nom de celui qui cherche à me joindre.
Marius – 2 messages en attente
Je déverrouille mon téléphone et lis ses messages.
Marius : J’ai vu aux infos pour Rachel.
Marius : Tu as pu voir Nolan ?
Moi : Ouais.
Je lui envoie les captures d’écran de ma discussion avec Nolan.
Marius : Ok. Je te laisse !!! ^_ ^ ^3^
Ses deux smileys me laissent perplexe. C’est la première fois qu’il envoie un smiley «bisous». Est-ce qu’il essaye de me faire comprendre quelque chose ? Ou a-t’il simplement pas fait attention ? Je reste à fixer l’écran 5 minutes en me posant des questions sur les smileys choisis par Marius.
- Hé, Julie, le cours est fini.
Je sursaute et remarque que la salle se vide. Je remballe mes affaires et rejoins le self pour manger en présence de Cassandra. Elle parle mais je ne l’écoute que d’une oreille distraite. Je suis en train de fixer au loin Nolan, qui mange avec sa bande d’amis habituels, ceux qu’on appelait les populaires au lycée d’après Cassie.
Nolan est assis à côté d’une rousse aux cheveux bouclés que je n’ai jamais vu. Elle porte un mini-short en novembre. Avec ça, elle a un joli haut bien décolleté, ce qui me fait lever les yeux au ciel. Elle rit en cachant sa bouche de sa main aux ongles parfaitement manucurés. Elle secoue ses cheveux et se colle à Nolan autant que possible. Celui-ci à la main sur la cuisse de la rousse, mais il semble préoccupé par autre chose que les magnifiques yeux verts de la fille à ses côtés.
J’en étais sûre. Il peut se passer de moi, il trouve toujours quelqu’un d’autre. Il n’a pas compris ce que je lui ai dit tout à l’heure, même si j’avoue que là, on dirait plus que c’est la fille qui a fait le premier pas. Mais bon, qui se ressemble s’assemble. Elle a l’air aussi sûre d’elle que lui. Elle a de quoi. C’est vrai qu’elle est belle. Elle n’a pas un charme discret ou singulier. Elle est d’une beauté presque dérangeante.
- Tu m’écoutes, Julie ?
- Hein ?
- Pff, laisse tomber. C’est qui que tu fixes comme ça ?
- La fille à côté de Nolan.
- T’es encore sur lui ?
- Non, mais ma théorie comme quoi il change de filles comme de chaussettes se démontre tous les jours.
- Ah ouais. Elle, c’est Tessa, je crois.
Je hoche la tête vigoureusement. Le regard de Tessa croise le mien et elle donne un coup de menton, comme une provocation. Je crois qu’elle sait les sentiments de Nolan et qu’elle le veut. Mais je lui laisse, après tout, je suis passée à autre chose. Quelqu’un qui ne se rend pas compte de ce que je ressens pour lui, je crois. Nous sommes fin novembre, dans environ trois mois, c’est la St-Valentin. Je ne sais pas encore si je déclarerais à Marius mes sentiments ce jour là. Je ne sais pas non plus si Nolan a prévu quelque chose pour moi, mais je n’espère pas. Ce serait gentil, mais je refuserais.
J’arrête de penser à ça, étant donné que c’est dans assez longtemps. J’ai encore le temps de faire des rencontres, de ne plus aimer Marius, etc. Je jette à nouveau un regard vers Tessa. Elle embrasse à pleine bouche Nolan, qui semble gêné. Je crois qu’il ne la veut pas. Mais il lui rend quand même le baiser, sûrement pour faire croire qu’il se fiche de moi à Tessa, pour avoir une nouvelle fille à son tableau de chasse. Mais celle-ci est – je pense – le genre de filles qui ne se laisse pas draguer aussi facilement. C’est justement elles qui draguent.
- Julie ! Tu es distraite, aujourd’hui. Tu planes.
- Il y a trop d’évènements qui se bousculent dans ma tête, je n’arrive plus à suivre, dis-je.
- Comme quoi ?
- Nolan m’aime mais côtoie d’autres filles, Rachel s’est suicidée à cause de Nolan et je n’arrive toujours pas à cerner Marius.
- Comment ça, tu n’arrives pas à le cerner ?
- Je sais pas trop. C’est dur à dire. Dès fois, je plaisante et on passe dans un moment de grand malaise, sérieux, où il me fixe. Il semble en pleine réflexion, et puis plus rien. On se remet à parler normalement.
- Tu crois qu’il essaye de cacher des sentiments pour toi de peur que tu le repousses ? Avec Nolan qui te tourne autour, je comprendrais s’il faisait ça.
- Je ne sais pas… Je comprends rien. Les mecs sont difficiles à comprendre, me lamente-je.
Je m’allonge sur la table en soupirant.
- Et s’il ne m’aimait pas et que je me faisais juste des idées ? C’est possible aussi…
- Oui, tu n’as qu’à lui demander, c’est simple.
- Je ne me vois pas arriver vers Marius et lui dire «Au fait, tu m’aimes ou je me fais des idées ?».
- Pas faux…
Annotations