Chapitre 1
La salle du club de photographie était une ancienne classe de sciences, reconvertie en un espace créatif. Des photos en noir et blanc étaient accrochées aux murs, des paysages urbains aux portraits flous des élèves des années précédentes. L’odeur familière du papier et de l’encre planait dans l’air, mélangée à celle de produits chimiques que personne ne semblait reconnaître.
Corentin balaya la pièce du regard, se sentant étrangement hors de son élément. Le reste des élèves s’installait autour de grandes tables, feuilletant des magazines de photographie ou testant leurs appareils. Lara, en tant que membre du club depuis deux ans, prenait les choses en main, passant de groupe en groupe avec une assurance déconcertante.
— Allez, tout le monde ! Trouvez un partenaire pour l’activité d’aujourd’hui. On commence avec des portraits simples, expliqua-t-elle, un appareil photo dernier cri autour du cou.
Mira se tourna immédiatement vers Kenny, un grand sourire aux lèvres.
— Eh bien, ça sera nous deux, déclara-t-elle, sans laisser de place à la discussion.
Kenny se laissa faire, un peu résigné, tandis que Corentin cherchait un endroit où se poser. Il avait espéré pouvoir rester en retrait, mais c’était sans compter sur Lara, qui le rejoignit avec un sourire éclatant.
— Toi et moi, Corentin, d’accord ? proposa-t-elle, ses yeux pétillants de malice.
Il se figea un instant, mais se força à sourire en retour. Il ne pouvait pas se permettre de refuser, encore moins à Lara.
— Ça marche, répondit-il en ajustant son sac sur son épaule.
Ils se dirigèrent vers un coin de la salle où la lumière tombait en biais à travers les grandes fenêtres. Lara sortit son appareil, s'assurant que les réglages étaient parfaits, puis pointa l’objectif vers Corentin.
— Fais comme si je n’étais pas là, dit-elle avec un sourire encourageant.
Corentin leva les yeux au ciel, un sourire amusé flottant sur ses lèvres. Faire comme si elle n’était pas là ? Facile à dire. Il se força à se détendre, adoptant une pose décontractée. Le déclic de l’appareil résonna dans la pièce, capturant un instant fugace.
— Parfait ! s’exclama Lara. Tu as un regard très intense, tu sais ?
Il haussa les épaules, se sentant légèrement mal à l’aise sous l’attention. Il n’était pas habitué à ce qu’on l’observe de si près. Les gens avaient tendance à l’ignorer, à le prendre pour un élève parmi d’autres, ce qui lui convenait parfaitement. Mais là, sous le regard perçant de Lara, il se sentait exposé.
— Et si on essayait de capturer quelque chose d'un peu plus naturel, continua Lara. Genre... un sourire ?
Corentin fronça les sourcils, hésitant. Il jeta un coup d'œil à Mira et Kenny, qui semblaient s’amuser en prenant des photos absurdes l’un de l’autre. Mira riait aux éclats, tandis que Kenny faisait semblant de poser comme un mannequin, mimant des expressions dramatiques. Leur énergie insouciante lui fit un peu relâcher sa garde.
Il esquissa un sourire timide, un peu maladroit, et Lara appuya de nouveau sur le bouton. Cette fois, le flash s’alluma, éblouissant légèrement Corentin. Pendant une fraction de seconde, il eut un pincement au cœur. Un doute fugace. Et si... ?
Mais rien ne sembla anormal. Il jeta un coup d’œil rapide vers l’écran de l’appareil de Lara, et tout semblait en ordre. Son visage apparaissait normalement. Il poussa un soupir de soulagement.
— C’est super, vraiment ! s'enthousiasma Lara. Tu devrais sourire plus souvent.
Corentin hocha la tête, cachant son soulagement derrière une expression neutre. Tout se passait bien, du moins pour l’instant. Il avait encore du temps avant que les choses ne se compliquent.
Pendant ce temps, Mira observait tout en silence, son sourire éclatant n’étant qu’un masque pour cacher ses propres doutes. Elle aimait pousser ses amis dans ces situations, mais une part d’elle savait que Corentin n’était pas toujours à l’aise. Elle se promit d’être plus attentive à lui, de veiller sur lui, même si elle ne savait pas exactement pourquoi elle ressentait ce besoin de protection.
De l’autre côté de la pièce, Kenny continuait de prendre des photos, enchaînant les poses ridicules, insouciant du petit monde de mystères qui l’entourait. Pour lui, tout n’était que jeu et amusement. Et c’était mieux ainsi.
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