Chapitre 19

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Trois jours s’étaient écoulés depuis que Corentin avait surpris Nathaniel, Livia et Lara dans leur étrange discussion. Depuis cet incident, il s’était forcé à garder une apparence détendue, malgré la tension qui le rongeait. Mais ce matin-là, la sensation de danger devint une réalité brutale et inévitable.

L’alerte créature résonna dans les couloirs du lycée, une sonnerie stridente, urgente, qui figée tout le monde sur place. Les élèves, pris de panique, échangèrent des regards effrayés, et des chuchotements inquiets se propagèrent dans les couloirs comme une vague d’angoisse. Corentin, Mira et Kenny se trouvaient dans la salle de classe lorsque la porte s’ouvrit violemment, laissant entrer un surveillant au visage blême.

— Sortez immédiatement et dirigez-vous vers les couloirs, ordonna-t-il, la voix tremblante.

Sans poser de questions, les élèves se levèrent et se dirigèrent vers le couloir en file indienne. Leurs pas précipités résonnaient dans le silence oppressant, et chaque visage exprimait la même peur. En s’approchant des couloirs principaux, Corentin comprit pourquoi la panique s’était emparée de tout le lycée.

Devant l’entrée de la bibliothèque, il aperçut les jambes d’un jeune homme allongé sur le sol, immobile, dépassant de l’encadrement de la porte. Une large flaque de sang s’étendait jusqu’au couloir, maculant les carreaux pâles d’un rouge sombre. L’odeur métallique de sang s’insinuait dans l’air, un parfum froid et écoeurant. Corentin sentit sa gorge se serrer, l’horreur s’infiltrant dans chaque recoin de son esprit. Il avait faim... Si faim...

— Mon Dieu… souffla Mira, ses mains tremblantes.

Elle tira Corentin en arrière, les yeux baignés de larmes, ses doigts agrippant son bras avec une force presque douloureuse. Kenny, bien que visiblement sous le choc, tenta de la réconforter, posant une main rassurante sur son épaule.

— Ça va aller, Mira… on va sortir d’ici, murmura-t-il, bien que sa voix trahissait son propre effroi.

— Je… je hais ces créatures, s’étrangla Mira entre deux sanglots. Les zombies, les vampires… ils devraient tous disparaître.

Corentin sentit une vague de froid le traverser, glaçant son sang comme si la mort elle-même posait une main sur son épaule. Ces mots… entendre son amie dire ces mots avec autant de haine lui rappelait combien son propre secret le séparait de ce monde humain. Mira, sa chère Mira, qui le voyait comme un ami, ne savait pas qu’il appartenait à ce monde qu’elle détestait tant. S’il venait à révéler sa vraie nature, elle ne verrait sans doute que le monstre qu’elle redoutait.

Ils étaient sur le point de quitter le couloir lorsqu’une voix familière les appela. Nathaniel les avait rejoints, avec Livia à ses côtés, le visage grave.

— Hé, vous trois, murmura Nathaniel en se plaçant près d’eux, faites attention. Ne vous éloignez pas les uns des autres, d’accord ? Quoi qu’il arrive, restez toujours ensemble. Si vous avez besoin de quelqu’un, je serai là pour vous protéger, ajouta-t-il, ses yeux perçant chacun d’entre eux.

Corentin fixa Nathaniel, stupéfait par cette déclaration. L’attitude bienveillante de Nathaniel le déstabilisait, surtout en de telles circonstances. Pourquoi se montrait-il si protecteur envers eux ? Et pourquoi semblait-il toujours être là, précisément au moment où les choses s’obscurcissaient ?

Livia acquiesça silencieusement à côté de lui, ses yeux sombres reflétant une résolution tranquille.

— Nathaniel a raison, ajouta-t-elle. Cette situation est… extrêmement dangereuse. Nous devons tous rester prudents.

Mira et Kenny hochaient la tête avec empressement, trop bouleversés pour s’interroger sur les raisons de leur sollicitude. La présence rassurante de Nathaniel et Livia semblait leur offrir un réconfort inattendu, mais pour Corentin, ces paroles n’étaient qu’un mystère de plus.

Avant qu’il ne puisse poser davantage de questions, la directrice arriva en courant, ordonnant aux élèves de se regrouper et d’évacuer les lieux. Les cours de l’après-midi étaient annulés, et chacun devait rentrer chez lui. Elle leur demanda de maintenir la plus grande vigilance et de suivre scrupuleusement les consignes de sécurité. Sa voix, bien que ferme, portait un éclat de panique, et son regard évitait soigneusement de se poser sur la scène macabre derrière elle.

Corentin, Mira et Kenny se retrouvèrent dehors, sous le ciel gris qui semblait aussi lourd que leurs pensées. La conversation était rare, chacun plongé dans ses propres peurs et ses propres doutes. Après un échange de mots brefs pour se rassurer, ils prirent chacun le chemin de leur maison, comme des ombres dispersées par le vent.

En rentrant chez lui, Corentin sentit un poids peser sur ses épaules. La scène dans la bibliothèque restait gravée dans son esprit, chaque détail amplifiant sa propre peur et son sentiment d’isolement. Il n’avait personne avec qui partager cela, personne à qui confier la vérité de sa nature. Ce secret, qui devait rester caché, était désormais une barrière infranchissable entre lui et ses amis, une vérité qui l’éloignait du monde humain auquel il prétendait appartenir.

Sa mère l’attendait dans le salon, assise avec une tasse de thé entre les mains, l’air préoccupé. En le voyant entrer, elle se leva, posant immédiatement son regard sur lui, cherchant des indices sur ce qui avait pu se passer.

— Corentin, mon chéri… tu as l’air bouleversé. Que s’est-il passé ?

Corentin inspira profondément, rassemblant ses pensées avant de répondre.

— Deux élèves… ont été retrouvés morts dans la bibliothèque, murmura-t-il, les mots lui échappant avec difficulté. Ils ont été… attaqués. Ils… on leur a dévoré le cerveau et le cœur.

Sa mère pâlit, ses lèvres se pressant l’une contre l’autre dans une expression de peur contenue. Elle posa une main rassurante sur son épaule, ses yeux cherchant les siens, comme pour établir une connexion rassurante malgré le poids de leurs secrets.

— Mon garçon, tu sais ce que cela signifie, murmura-t-elle, une gravité dans sa voix qu’il connaissait bien. Cette situation est… dangereuse. Tu devras être encore plus prudent qu’avant. Nous ne pouvons pas nous permettre le moindre faux pas. Ton secret… il doit rester caché, quoi qu’il en coûte.

Corentin hocha la tête, sentant le poids des mots de sa mère lui tomber dessus comme un fardeau de plus. Il savait depuis longtemps qu’il devait cacher ce qu’il était, qu’il devait toujours se fondre dans la masse humaine. Mais avec chaque jour qui passait, chaque événement étrange autour de Nathaniel et Livia, il sentait que son monde devenait de plus en plus instable.

— Tu as raison, maman. Je ferai attention, je te le promets, répondit-il, tentant de la rassurer autant qu’il se rassurait lui-même.

Elle lui serra la main, l’attirant dans une étreinte protectrice. Dans ses bras, il retrouva un semblant de réconfort, un fragment de normalité qu’il chérissait dans cette existence fragile. Mais au fond de lui, une part de lui savait que cela ne suffirait pas. Les événements autour de lui devenaient de plus en plus chaotiques, et il ne pouvait s’empêcher de se demander combien de temps il pourrait encore cacher sa vraie nature.

Après un moment, il monta dans sa chambre et s’assit près de la fenêtre, observant le ciel qui s’assombrissait à l’horizon. La vision de la bibliothèque, du sang s’étendant jusqu’aux couloirs, les visages de Mira et Kenny, terrorisés… tout cela tournait dans son esprit, tissant un mélange de peur et de culpabilité qu’il ne pouvait plus ignorer.

Et au milieu de ce chaos, le visage de Nathaniel lui revint. Ce regard froid qu’il lui avait lancé quelques jours plus tôt, ces paroles ambiguës, et cette promesse de protection… Rien de tout cela ne faisait sens, et pourtant, tout semblait indiquer que Nathaniel jouait un rôle bien plus sombre que celui d’un simple camarade de classe.

Corentin savait qu’il était temps pour lui de découvrir la vérité, quel qu’en soit le prix. Car il pressentait que, bientôt, ce mystère le rattraperait, le forçant à affronter les ombres qui se cachaient derrière les sourires et les murmures des nouveaux.

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