Chapitre 24
Mira ouvrit la porte de sa maison d’un geste rapide, invitant ses amis à entrer. L’intérieur était immédiatement réconfortant, baigné d’une lumière douce et tamisée. Des murs aux tons crème étaient décorés de cadres photos, capturant des moments heureux de sa famille. Un cliché montrait une Mira plus jeune, un large sourire aux lèvres, entourée de ses parents et de ce qui semblait être une sœur aînée. Une guirlande lumineuse était accrochée au-dessus d’un buffet en bois où trônaient des bibelots : des figurines d’animaux en céramique, des bougies colorées, et un vase rempli de fleurs séchées.
Le salon, cosy et bien agencé, était dominé par un grand canapé gris et deux fauteuils dépareillés : l’un en velours vert bouteille, l’autre en tissu rouge brique. Une petite table basse en bois clair, ornée d’un chemin de table brodé à la main, complétait l’ensemble. Sur un côté de la pièce, une étagère débordait de livres et de petits objets décoratifs, témoins des goûts éclectiques de Mira. Une odeur légère de vanille flottait dans l’air, venant probablement des bougies qui avaient brûlé plus tôt.
— Bon, installez-vous, dit Mira en déposant son sac sur un porte-manteau près de l’entrée. Je vais faire du thé ou peut-être… du chocolat chaud ? Qu’est-ce que vous préférez ?
— Si tu proposes du chocolat chaud, la question ne se pose même pas, lança Kenny en haussant un sourcil. On n’est pas des grands-mères en quête d’une tasse de thé.
Mira roula des yeux, mais un petit sourire étira ses lèvres.
— Très bien, chocolat chaud, alors, répondit-elle avant de disparaître dans la cuisine.
Kenny s’affala sur le canapé, levant les bras comme pour s’étirer.
— Ah, enfin chez Mira, le seul endroit où le stress ambiant disparaît dès qu’on voit toutes ces petites figurines d’animaux. Sérieux, regarde ça, Corentin, lança-t-il en désignant le buffet. Je suis sûr qu’il y en a un qui est une licorne cachée.
Corentin, qui observait la pièce en silence, esquissa un sourire malgré lui. Kenny avait un don pour détendre l’atmosphère, même dans les moments les plus sombres.
— Peut-être qu’elle en a aussi un en forme de vampire, ajouta Kenny avec un clin d’œil. Juste pour s’assurer qu’il n’entre jamais ici.
— Je ne crois pas que les figurines soient efficaces contre eux, répondit Corentin, sa voix calme trahissant un léger amusement.
— Eh, on ne sait jamais. Une licorne vampire, ça existe peut-être, continua Kenny avec sérieux, en tapotant le coussin du canapé comme s’il réfléchissait profondément.
Mira réapparut à cet instant, portant un plateau avec trois mugs fumants. Elle posa le tout sur la table basse, son sourire s’élargissant un peu en entendant les derniers mots de Kenny.
— Une licorne vampire ? Tu es sérieux, Kenny ? lança-t-elle en s’asseyant en tailleur sur le tapis, sa tasse entre les mains.
— Aussi sérieux que toi avec ta collection de hérissons en céramique, rétorqua Kenny avec un sourire narquois.
— Tais-toi, dit Mira en riant doucement. Ils sont mignons, et tu le sais.
Les rires s’estompèrent rapidement, mais la tension dans la pièce s’était légèrement allégée. Chacun prit un mug, savourant la chaleur réconfortante du chocolat chaud. L’odeur riche et sucrée emplit la pièce, apportant un peu de calme dans leur nuit tourmentée.
Mira, cependant, ne pouvait s’empêcher de revenir sur ce qu’elle avait entendu plus tôt.
— Merci d’être là, murmura-t-elle après un moment de silence, ses yeux fixés sur sa tasse. Je sais que je suis… intense parfois. Mais ça me rassure de ne pas être seule.
— C’est normal, répondit Kenny avec un sourire rassurant. On est là pour toi. Pas vrai, Corentin ?
Corentin hocha la tête, bien que son esprit soit ailleurs. Il sentait encore le poids des mots de Livia et le regard insistant de Nathaniel.
— Oui, toujours, dit-il doucement.
Mira esquissa un sourire, mais ses traits restaient tendus.
— Je n’arrête pas de penser à ce que l’agent a dit, murmura-t-elle. Qu’ils savent quoi chercher, que les vampires laissent des traces. Mais qu’est-ce que ça veut dire ? Est-ce qu’ils savent vraiment ? Ou est-ce qu’ils disent ça juste pour éviter qu’on panique ?
Kenny haussa les épaules, prenant une gorgée de son chocolat chaud.
— Ils doivent avoir une idée. Enfin, c’est leur boulot, non ? De savoir comment ces trucs fonctionnent.
Mira secoua la tête, son regard sombre.
— Mais si c’étaient vraiment des vampires… et qu’ils sont si bons pour se cacher… alors pourquoi ils ne les ont pas encore trouvés ? Pourquoi ils sont toujours là, à nous terroriser ?
Le silence tomba à nouveau, lourd et oppressant. Corentin évitait soigneusement de croiser le regard de Mira, fixant sa tasse sans y toucher.
— Peut-être parce qu’ils ne savent pas tout, murmura-t-il presque à voix basse.
Mira releva la tête, fixant Corentin avec un mélange de curiosité et de frustration.
— Alors, qu’est-ce qu’ils ne savent pas, Corentin ? demanda-t-elle, ses sourcils froncés.
Corentin hésita, puis haussa légèrement les épaules.
— Je… je suppose que je ne sais pas non plus, répondit-il, sa voix tremblante d’incertitude.
Kenny, sentant la tension monter, posa bruyamment sa tasse sur la table.
— Bon, les amis, assez parlé de ça, hein ? On est ici pour se détendre, pas pour nous torturer avec des questions auxquelles on n’a pas de réponses. Et Mira, ton chocolat chaud est censé nous réconforter, pas nous donner des migraines existentielles.
Mira lâcha un rire nerveux, le premier depuis qu’ils avaient quitté le gymnase.
— Tu as raison. Désolée, je… je stresse trop.
— On te comprend, répondit Kenny avec un sourire. Mais relaxe un peu. On est en sécurité ici, entourés de hérissons en céramique. Que demander de plus ?
Le trio échangea un regard complice, et l’atmosphère s’allégea enfin un peu.
La conversation se dissipa peu à peu, chacun se perdant dans ses pensées. Mira finit par se lever pour ramasser les mugs vides.
— Vous pouvez rester dormir, si vous voulez, dit-elle en rangeant le plateau. Je préfère ne pas être seule cette nuit.
Kenny accepta immédiatement, et Corentin hocha la tête, bien qu’une certaine appréhension l’habitait. Ils montèrent à l’étage, où Mira leur distribua des couvertures pour qu’ils s’installent dans le salon. Le canapé et les fauteuils furent transformés en lits improvisés.
Alors que Mira et Kenny s’endormaient rapidement, Corentin resta éveillé, allongé dans l’obscurité, les yeux ouverts. Les mots de Livia et le regard de Nathaniel tournaient en boucle dans son esprit. "Nathaniel t’a remarqué." Que signifiait réellement cette phrase ? Et qu’était ce "Dylemme" dont elle avait parlé ? Les réponses semblaient aussi insaisissables que le sommeil qui lui échappait.
Il tourna la tête vers la fenêtre. La rue était déserte, mais quelque chose dans l’obscurité semblait attendre. Il ne savait pas quoi, mais il savait que ce calme apparent ne durerait pas.
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