Chapitre 30

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Le matin s’annonça gris et lourd, comme si la nuit oppressante refusait de céder sa place. La maison de Mira était plongée dans un calme relatif, mais une tension palpable flottait dans l’air. Mira était restée silencieuse depuis leur découverte de la veille, assise dans un coin du salon avec son carnet posé sur ses genoux. Kenny, quant à lui, essayait de détendre l’atmosphère, mais ses blagues semblaient manquer leur cible.

Corentin, toujours troublé par les inscriptions gravées sur la porte, fixait les rideaux tirés de la fenêtre, comme s’il s’attendait à ce que quelque chose ou quelqu’un apparaisse derrière. Une odeur de café froid flottait dans l’air, mêlée à celle du bois ancien de la maison.

Un bruit de moteur brisa soudain le silence. Une voiture noire aux vitres teintées s’arrêta devant la maison. Le vrombissement s’éteignit, mais l’aura intimidante du véhicule restait.

— C’est quoi, ça ? murmura Kenny, se redressant sur le canapé.

Corentin et Mira échangèrent un regard inquiet alors que deux hommes en costume noir et brassards officiels descendaient de la voiture. L’un d’eux était grand et imposant, ses traits anguleux et sévères. L’autre, plus petit, avait une expression froide et calculatrice. Ils se dirigèrent lentement vers la porte, leur démarche méthodique résonnant sur le trottoir.

— Ils viennent ici ? s’étrangla Mira, son visage pâlissant.

Un coup sec retentit contre la porte. Corentin sentit son cœur s’accélérer. Mira rangea précipitamment son carnet sous un coussin, tandis que Kenny, malgré son air nonchalant, semblait tendu.

— On ouvre ou… ? demanda Kenny, brisant le silence nerveux.

Mira inspira profondément et se leva, ses jambes légèrement tremblantes. Elle déverrouilla la porte avec précaution et l’entrouvrit, laissant apparaître les deux hommes.

— Bonjour, mademoiselle, dit l’homme imposant d’un ton neutre. Je suis l’agent Heller, et voici l’agent Mikhail. Nous enquêtons sur des événements récents dans le quartier. Puis-je entrer ?

Mira hésita, jetant un coup d’œil à Corentin et Kenny derrière elle. Corentin fit un signe discret de la tête. Elle ouvrit la porte en grand.

Les agents entrèrent, leur simple présence rendant l’atmosphère encore plus lourde. Leurs yeux balayèrent la pièce, s’attardant légèrement sur Corentin, puis sur les rideaux tirés.

— Nous avons reçu des rapports concernant des inscriptions gravées sur certaines portes du quartier, commença l’agent Heller. Et il semblerait que votre maison soit concernée.

Mira se raidit, ses mains croisées devant elle.

— Oui… C’est apparu cette nuit, répondit-elle, essayant de garder un ton détaché.

— Étiez-vous tous présents ? demanda l’agent Mikhail, ses yeux perçants fixant chacun d’eux tour à tour.

— Oui, répondit Kenny rapidement. On a entendu des bruits, mais on n’a rien vu.

L’agent Heller hocha la tête, mais son expression restait impassible.

— Ces incidents ne sont pas isolés. Nous avons des raisons de croire qu’ils sont liés aux récentes attaques signalées dans cette région.

Corentin sentit une sueur froide couler le long de sa nuque. Les agents semblaient savoir bien plus qu’ils ne laissaient paraître. Heller jeta un coup d’œil à la porte barricadée par le buffet.

— C’est vous qui avez fait ça ? demanda-t-il en désignant le meuble.

— Par précaution, répondit Mira. On avait peur que… quelque chose entre.

Heller esquissa un sourire froid, mais il ne répondit pas. Il tourna son attention vers Corentin.

— Et vous, jeune homme ? Vous avez remarqué quelque chose d’inhabituel ?

Corentin secoua la tête, se forçant à paraître calme.

— Rien de plus que ce qu’on vous a dit.

L’agent Mikhail, qui n’avait presque pas parlé jusque-là, fit un pas en avant, ses yeux perçant fixés sur Corentin.

— Vous êtes sûr ? Parfois, les témoins ne réalisent pas l’importance de petits détails.

Corentin soutint son regard, mais l’intensité de celui-ci le troubla profondément. Avant qu’il ne puisse répondre, Mira intervint.

— On a tout dit. Il n’y a rien de plus, dit-elle fermement.

Les agents échangèrent un regard, puis Heller prit la parole.

— Très bien. Mais restez vigilants. Si vous voyez ou entendez quoi que ce soit d’étrange, contactez-nous immédiatement.

Ils remirent une carte à Mira avant de se diriger vers la sortie. Mais avant de franchir la porte, Mikhail se tourna une dernière fois vers Corentin.

— Et vous… Faites attention, dit-il avec un sourire énigmatique avant de disparaître.

La maison retomba dans un silence pesant après le départ des agents. Mira s’assit lourdement sur le canapé, le carnet toujours caché sous le coussin. Kenny, visiblement mal à l’aise, se leva pour fermer la porte à clé.

— C’étaient qui ces types ? murmura-t-il.

— Des autorités, répondit Mira, mais sa voix manquait de conviction. Ils savent quelque chose, je le sens.

Corentin hocha la tête, ses pensées s’embrouillant davantage. Mais avant qu’ils ne puissent continuer leur discussion, un bruit de pas résonna à l’extérieur. Corentin regarda par la fenêtre et aperçut une silhouette familière. Nathaniel.

Il était là, au coin de la rue, les mains dans les poches, ses chaussures beige et blanches éclairées par la lumière vacillante d’un lampadaire. Il souriait légèrement, un sourire qui avait tout pour sembler amical, mais qui fit naître une boule d’angoisse dans l’estomac de Corentin.

— Je dois y aller, dit-il brusquement.

— Quoi ? Où ça ? demanda Mira, surprise.

— Juste… Je dois voir quelque chose, répondit-il sans s’expliquer davantage.

Avant qu’ils ne puissent l’arrêter, il sortit précipitamment et se dirigea vers Nathaniel. Ce dernier l’attendait, immobile. Corentin sentit son cœur battre plus vite à mesure qu’il approchait.

— Salut, Corentin, dit Nathaniel calmement. Tu voulais me voir ?

Corentin fronça les sourcils.

— Non, c’est toi qui traînes devant chez Mira. Qu’est-ce que tu fais ici ?

Nathaniel éclata d’un rire doux, mais son regard ne perdit rien de son intensité.

— Je voulais juste m’assurer que tu allais bien. Après tout, le Voile peut être… perturbant, pour ceux qui commencent à le voir.

Corentin sentit une sueur froide couler le long de son dos.

— Le Voile ? Qu’est-ce que tu sais ?

Nathaniel pencha légèrement la tête, comme amusé.

— Bien plus que toi, je suppose. Mais fais attention, Corentin. Ce n’est pas parce que tu vois que tu comprends.

Il s’approcha, réduisant la distance entre eux, et murmura :

— Une dernière chose : quoi que tu entendes ce soir, ne te retourne pas.

Puis, sans ajouter un mot, il s’éloigna, disparaissant dans l’obscurité. Corentin resta figé, le pendentif dans sa poche semblant brûler contre sa peau.

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