J’arrivai vers la table où étaient déjà installés Constance, Sam et Dorian. Je m’assois à côté de mon fils, déposant Eléa dans la chaise haute qu’avait demandé Constance. Après quelques minutes une serveuse arriva. Soudain tout s’arrête autour de moi, et je vois seulement la déesse qui marche vers notre table. Un magnifique corps svelte, une peau hâlée, des longs cheveux bruns, sublime, elle est sublime. Elle arriva à notre niveau. Je pus donc détailler son visage, des yeux bleus très clairs, des petites taches de rousseur constellaient son nez et le haut de ses joues, et un sourire éclatant aux fossettes qui lui donnaient un air enfantin.

- Bonjour, vous souhaitez commander ?

- Oui, s’il vous plaît.

- Dîtes-moi, ils ont l’air fort ces deux bonhommes, de vrais super-héros ! Alors les garçons, vous êtes quels super-héros ? demanda-t-elle tout sourire à Sam et Dorian.

- Batman ! s’exclama mon fils.

- Moi, je suis Hulk, c’est maman qui l’a dit, déclara Sammy.

- Waouh, je suis honorée de servir Batman et Hulk. Alors, que diriez-vous d’un menu de super-héros, composé de nuggets, de frites et d’une boisson au choix, et évidemment une glace et une surprise.

- Ouais, moi je voudrais ça maman, s’il te plaît ? me demanda Dorian.

- Moi aussi ! s’écria Sam.

- Bien sûr.

On commanda donc également pour nous. La serveuse repartit en cuisine. Je suivais discrètement du regard la jeune femme qui effectuait des allers-retours entre la cuisine et les différentes tables. Je vois soudain une main passer dans mon champ de vision. Je cligne des yeux et regarde Constance qui sourit en coin.

- Excuse-moi, j’étais dans mes pensées. Tu m’as parlé ?

- Rien d’important, assure-t-elle.

Bizarre. Je détourne à nouveau le regard et observe ma belle serveuse qui discute au comptoir avec Livia Perez, une auteure que j’apprécie tout particulièrement. La connaît-elle ? Est-ce qu’elles sont amies ? Plus qu’amies ?

- Tout va bien ? demanda-t-elle.

- Oui, pourquoi ?

- Non rien, pour savoir.

Je recommence à fixer les deux femmes au-dessus de son épaule.

- Mais bon sang, qu’est-ce qu’il y a de si intéressant derrière moi ? demande-t-elle en se retournant.

Oh la honte. Elle va comprendre, c’est sûr. Mon amie se retourne et me fixe en souriant.

- Quoi ?

- La serveuse, alors ? Je te l’accorde, elle est vachement belle.

- Je vois pas de quoi tu parles, j’ai juste aperçue Livia Perez, une auteure que j’aurais bien aimé pouvoir éditer, mentis-je.

- Mais oui, c’est ça.

Gênée, je me plonge dans mon téléphone. Constance continue à sourire en coin, je n’y prête pas attention. Quand j’entends la voix de la serveuse.

- Et voilà vos plats, dit-elle en déposant les assiettes devant nous.

- Merci, répond Constance en me donnant un coup de pied sous la table.

Je pousse un petit cri.

- Excusez-moi, je vous ai fait mal ? demande la serveuse.

- Non, non. Je me suis cognée, c’est tout, assurai-je.

- Me voilà rassurée, je m’en serais voulu d’avoir blessé une femme aussi jolie, déclare-t-elle en me faisant un clin d’œil, avant de partir.

Dorian et Sam descendent leur plat et leur boisson, grenadine pour l’un, limonade pour l’autre.

- Alors, contente ?

- Pardon, m’étranglai-je, j’ai failli mourir de honte.

- Mais maintenant tu sais que tu lui plais, s’enquit-elle.

-Ah oui ?

- Elle t’a dit que tu étais jolie et elle t’a fait un clin d’œil.

- Mais ça ne veut rien dire !

- Tu plaisantes, ça veut tout dire.

- De qui vous parlez ? demande Dorian.

J’avale l’eau de travers et manque de m’étouffer.

- Personne, mon chéri.

- De la jolie serveuse, là-bas.

Evidemment, Constance a balancé sa bombe en même temps que mon mensonge.

- C’est vrai qu’elle est jolie et puis elle est trop sympa. Elle a dit que j’étais un super-héros.

Je dois être toute rouge, voilà que même mon fils s’y met. Après quelques secondes à la fixer, il reprend sa conversation avec Sam. Je regarde méchamment Constance qui éclate de rire. Lasse, j’abandonne et termine mon assiette. Elle revient vers nous les joues légèrement rougies.

- Vous avez terminé ?

- Oui, répond Constance tandis que moi, je n’ose même pas lever la tête vers elle.

- Vous souhaitez peut-être prendre un dessert ? Et une glace pour ses bonhommes ?

- Bien sûr, vous les voulez à quoi les garçons ?

- Framboise ! s’exclame Sammy.

- Chocolat, déclare Dorian tout sourire.

- Un café pour moi, Stella ?

- Hum. Euh, la même chose, s’il vous plaît, dis-je sans grande conviction.

- Très bien, je vous ramène ça tout de suite.

Elle repart.

- Stella, ça va ? s’inquiète Constance.

- Oui, lui répondis-je d’une petite voix.

- Qu’est-ce qu’il y a ? Tu sais que tu peux tout me dire, hein ?

- Oui, tout va bien, je t’assure, promis-je en souriant faussement.

Mon amie ne semble pas du tout convaincue. Je tourne la tête et observe la serveuse qui s’active derrière le bar tout en parlant joyeusement avec l’auteure. Je repense à Romain que j’ai toujours considéré comme mon meilleur ami, et dire que je me suis cachée pendant des années. Seulement, maintenant, j’ai peur de n’adresser ne serait-ce que quelques mots à la femme qui m’attire. Découragée, je pousse un long soupir de frustration.